ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 320 - 15/03/1997

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Zambie

Eglise et Etat

by Patu Mwanza, Zambie, janvier 1997

THEME = EGLISES

INTRODUCTION

Il y a tout juste quelques mois que les Zambiens se demandaient avec perplexité où le gouvernement du président Frédérick Chiluba allait mener le pays. Quelques jours après les élections du 18 novembre 1996, certains, surtout les responsables d'Eglises, devenaient encore plus perplexes.

Que se passe-t-il? D'abord la création, au State House (la résidence du président) d'un secrétariat des Eglises, dirigé par l'ancien ministre adjoint de la Jeunesse, des Sports et du Développement de l'enfant, le rév. Peter Chintala.

Le secrétariat des Eglises

La création de ce secrétariat a causé le désarroi dans les Eglises de Zambie; beaucoup de responsables religieux se demandent si, en somme, le gouvernement ne cherche pas à gagner le soutien des Eglises. Certains craignent que cette décision ne crée des dissensions au sein des Eglises dans le pays. D'autres pensent que le secrétariat des Eglises ne favorisera que les pentecôtistes, étant donné que Chiluba est membre de cette Eglise et qu'on sait qu'au cours des cinq dernières années, il a donné à ses coreligionnaires le libre accès à sa résidence. La crainte a également gagné les partis de l'opposition qui estiment que le secrétariat sera utilisé pour politiser les Eglises dans le pays. Ils estiment que le président Chiluba a été mal conseillé de créer ce secrétariat, puisque le pays compte déjà des organismes d'Eglise tels que le Conseil chrétien de Zambie, la Conférence épiscopale de Zambie et la Communauté évangélique de Zambie, qui tous peuvent être consultés en matière de relations entre l'Etat et les Eglises. Plus préoccupant est le rôle que le secrétariat des Eglises est censé jouer. Au moment de la rédaction du présent article, les termes de référence spécifiques n'ont pas été rendus publics; en revanche, une réunion consultative avec les responsables des Eglises avait été convoquée avant Noël 1996 par le rév. Chintala. Cette réunion faisait suite à une autre, officieuse et introductive, que le rév. Chintala avait eue à Lusaka avec les responsables des Eglises. La réunion, qui avait pour but de discuter des tâches du secrétariat, a eu lieu au Centre du Gospel Outreach Fellowship, une Eglise dont le dirigeant, le rév. Helmet Reuter, est censé être parmi les hommes d'Eglise proches de Chiluba. Juste avant la nomination du rév. Chintala, un responsable de l'Eglise de Dieu pour la région de l'Afrique centrale, l'archevêque John Mambo, révélait que certains hommes d'Eglise, qui se rendaient à la State House pour prendre le thé avec Chiluba, étaient devenus des informateurs de l'Etat: ils se faufilent le soir pour informer Chiluba sur la manière de penser des autres responsables d'Eglise.

Institutions d'Eglise

L'archevêque Mambo se trouve parmi les nombreux hommes d'Eglise qui ont critiqué l'"ordination honoris causa" du président Chiluba par la Communauté des pasteurs de Zambie. Pour lui, cette ordination est "une insulte aux Eglises de Zambie" et "contraire aux institutions d'Eglise", puisqu'il existe pour tout le monde une procédure à suivre avant d'accéder à un ministère. "Une fois qu'on élimine ces procédures, on ne crée que des problèmes. Lorsque nous nous affairons à servir des doctorats théologiques à des personnes qui ne les méritent pas, nous en arrivons à oublier que Dieu est suprême. Nous apprécions ce que le président Chiluba fait pour les Eglises, mais il n'est pas des nôtres, même s'il est responsable devant tous les citoyens", opine l'archevêque Mambo. Il ajoute qu'accorder au président Chiluba une place spéciale dans l'Eglise est "décevant et inouï", et il insiste auprès des Eglises pour qu'elles ne s'empressent pas d'offrir des doctorats honoraires à Chiluba.

Une marche de solidarité

Une autre surprise devait suivre les réflexions de l'archevêque: une marche de solidarité fut organisée par des gens qui se disaient des "citoyens préoccupés", mais qui se révélèrent plus tard être des dirigeants et membres du mouvement des chrétiens régénérés. L'un des orateurs qui s'est adressé aux marcheurs de la solidarité, le rév. Ernest Chelelwa, est le pasteur d'une Eglise à laquelle appartient le vice-président du pays, le général Godfrey Miranda. Le rév. Gedeon Siminga, de l'Eglise de la porte de l'espoir à Lusaka, estime que la création du secrétariat est une bonne idée - même s'il ne sait pas encore ce que celui-ci va faire - car les Eglises doivent encore attirer l'attention du gouvernement sur une série de questions, et ce secrétariat pourrait s'en charger. Les Eglises, dit-il, se sont plaintes depuis longtemps des problèmes de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Même les dons arrivant de l'étranger avaient été assujettis à la taxe alors que, dans la plupart des cas, ils étaient destinés à venir en aide aux plus pauvres du pays. Du train où vont les choses, avec des responsables d'Eglise qui chantent les louanges du parti au pouvoir, le gouvernement de Chiluba semble bien avoir réussi à mettre les Eglises en poche. Si les Eglises de Zambie ne sont pas unies, il leur sera difficile de réaliser l'unité et la liberté dont elles ont besoin. L'Esprit de Dieu a peut-être bien plané sur la Zambie, mais si les récents événements se poursuivent, il pourrait bien s'envoler et laisser derrière lui un pays en crise...

END

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