ANB-BIA DOSSIER

ISSUE/EDITION Nr 320 - 15/03/1997

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Z A I R E

Acteurs et antagonistes au Zaïre - un rappel

Dossier préparé par ANB-BIA, Bruxelles, 6 mars 1997 - Reproduction autorisée en citant la source


2ème PARTIE


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2. LES PAYS VOISINS


A. Trois pays accusés de participer à la rébellion


L'implication du Rwanda, de l'Ouganda et du Burundi dans la rébellion a été affirmée depuis le début par le Zaïre et a été reconnue même par les Etats-Unis, qui ont demandé le retrait des forces étrangères.


RWANDA
Le Front patriotique rwandais (FPR), mouvement et armée des exilés Tutsi appuyés par l'Ouganda, a attaqué le Rwanda en 1990 et y a pris le pouvoir en 1994, après le génocide. Plus d'un million de réfugiés rwandais, dont les soldats de l'ex- armée rwandaise et les miliciens Interahamwe, se sont installés au Zaïre, tout près de la frontière. Il était important, sinon vital, pour le Rwanda d'instaurer une zone tampon à l'est du Zaïre pour se défendre contre les incursions hutu. L'intention du Rwanda d'étendre ses frontières est peu probable, bien qu'il y fut fait allusion. Un certain engagement de son armée, aux côtés des Banyarwanda zaïrois, est généralement admis, bien que toujours nié par le gouvernement.


BURUNDI
L'engagement de troupes burundaises au Zaïre est par contre bien moins probable, étant donné la guérilla à l'intérieur du pays; mais le Burundi semble bien avoir aidé les rebelles. Après l'assassinat du président élu, Melchior Ndadaye, et surtout après le putsch de Pierre Buyoya, la minorité tutsi a pris le pouvoir au Burundi. De nombreux Burundais s'étaient réfugiés au Zaïre et des groupes de guérilla hutu y avaient leur base dans la région d'Uvira. Ils en ont été chassés par la rébellion zaïroise.


OUGANDA
Le président de l'Ouganda, Yoweri Museveni, un Hima (apparenté aux Tutsi), a été fortement aidé par les Tutsi rwandais exilés, dans la guerre civile qui l'a porté au pouvoir. A son tour, il les a aidés quand ils ont envahi le Rwanda et a gardé avec eux de très bonnes relations. D'autre part, divers groupuscules rebelles ougandais, qui opèrent dans le nord de l'Ouganda et sont appuyés par le Soudan, avaient leurs bases de repli dans le nord-est du Zaïre. L'Ouganda a reconnu avoir usé du droit de poursuite pour franchir la frontière zaïroise, mais a toujours nié sa participation active à la rébellion. Un fait à noter cependant est que l'Ouganda a un programme de réarmement fort important. Selon certaines sources, il y dépenserait jusqu'à 30% de son budget national. Le gouvernement se défend en disant qu'il doit moderniser son armée face aux rebelles ougandais et aussi aux menaces du Soudan.





CADRE 3 : Soldats rwandais et ougandais au Zaïre

La présence de soldats rwandais et ougandais parmi les forces de l'Alliance, a été attestée presque depuis le début de la rébellion par des observateurs présents à Bukavu et Goma. Ces soldats se trahissaient par leur langue ou parfois par des indiscrétions.

En parlant de soldats non zaïrois au sein de l'Alliance, un témoin oculaire, au mois de janvier, nous déclarait: "Tous les soldats rencontrés sont Tutsi; ils parlent le kinyarwanda entre eux. S'ils parlent très mal le swahili, c'est un signe qu'ils viennent du Rwanda; s'ils le parlent trop bien (avec des mots sophistiqués que les gens ne comprennent pas), ils viendraient plutôt de Tanzanie ou de l'Ouganda... A Goma et à Bukavu, le passage de la frontière se fait en général de nuit, discrètement, en camions portant des plaques d'immatriculation zaïroises ou sans plaques du tout; il n'est pas rare cependant de rencontrer un camion portant une plaque rwandaise... Quand un véhicule militaire "rebelle" se présente, même de jour, à la frontière rwandaise de Gisenyi et Cyangugu, les barrières lui sont immédiatement ouvertes, sans aucun contrôle... Il est clair pour tous à Goma qu'il ne s'agit pas d'une "rébellion" (affaire zaïro-zaïroise), mais bien de l'invasion du Zaïre par des pays tiers."

Une réflexion de C. Braeckman, journaliste au Soir, de Bruxelles, est toutefois intéressante. Elle écrit (dans Le Soir, 24 février 1997): "La guerre au Rwanda, puis le génocide ont exacerbé les tensions: de jeunes Hutu vivant au Zaïre ont été enrôlés dans l'armée d'Habyarimana en 1990, mais surtout, par milliers, de jeunes Tutsi ont rejoint les rangs du FPR... Dans les rangs de l'Alliance, on retrouve bon nombre de jeunes Tutsi. Sont-ils originaires du Zaïre, ou venus directement du Rwanda, voire de l'Ouganda? Bien malin qui saurait les distinguer. En effet, des Tutsi vivent en Ouganda également, réfugiés de 1959 ou citoyens ougandais, et leur éventuel engagement au Zaïre est lui aussi une source de controverse. Mais l'Ouganda n'abrite pas que des Tutsi: se trouvent également dans le pays des populations azande, à cheval sur la frontière avec le Haut-Zaïre, et parmi elles des réfugiés, qui combattent également avec l'Alliance. En outre, après 60, de nombreux militants lumumbistes s'étaient réfugiés en Ouganda et leurs enfants se sont engagés dans le combat aujourd'hui. Comment qualifier ces descendants de réfugiés qui s'expriment en anglais: sont-ils Ougandais ou Zaïrois?"

Cependant, même s'il s'avère sans doute difficile de prouver une présence permanente des forces armées rwandaises et ougandaises, la rébellion zaïroise peut compter pour le moins sur un sérieux appui logistique et la complicité de ces deux pays.

FIN CADRE 3





B. Autres pays africains


ANGOLA
Dans la longue guerre civile en Angola, Mobutu a longtemps soutenu l'UNITA de Jonas Savimbi. D'anciens "gendarmes katangais", groupés dans le Front de libération nationale du Congo, se battent depuis des années dans l'armée gouvernementale angolaise. Non loin de Tshikapa, au Kasaï, un des principaux centres diamantifères, ils auraient attendu que l'ancien Simba Kabila leur fasse signe de traverser la frontière et d'attaquer les troupes de Mobutu. Cela a été confirmé par l'entourage de Kabila. Des troupes de Savimbi seraient en poste pour garder la frontière. A la fin de février, l'arrivée d'ex-gendarmes katangais (au nombre estimé de 1.500 à 4.000) était signalée à Bukavu. Ils auraient transité par l'Ouganda et la Tanzanie.
SOUDAN
Depuis des années le Soudan a des accords militaires avec le Zaïre. Mais Khartoum doit faire face, depuis janvier, a une forte recrudescence de la rébellion sudiste et d'attaques de l'opposition, regroupée dans l'Alliance démocratique nationale.
MAROC
Début février, le président Mobutu est allé voir le roi du Maroc, probablement pour demander son aide. On avait même dit que des avions étaient prêts pour acheminer des troupes marocaines, ainsi que togolaises et tchadiennes, dans l'est du Zaïre. Ces pays ont cependant nié vouloir envoyer des troupes.
LIBYE
En décembre 1996, le colonel Khadafi a déclaré: "Si le président Mobutu est chassé du pouvoir, le sort du Zaïre serait le même que celui de la Somalie après Siad Barre, et de la Yougoslavie après Tito".
En février, un message de remerciement de la part de Mobutu fut publié en Libye, et Khadafi exprimait son soutien au Zaïre et à son président. Ceci fait supposer aux observateurs que l'apport de la Libye serait devenu plus substantiel et certains rapports parlent d'une aide de l'Iran et de l'Irak par l'entremise de la Libye.





3. AU PLAN INTERNATIONAL

On a souvent souligné les prises de position différentes entre la France et les Etats-Unis, où on a vu une lutte d'influence.
LA FRANCE
La France, après les indépendances des pays africains, a toujours continué à jouer un rôle important en Afrique, où elle garde des détachements militaires, qui à maintes reprises sont intervenus pour venir au secours des gouvernements en difficulté (comme récemment en Centrafrique). Dans la région des Grands Lacs, elle a toujours soutenu Mobutu et aussi l'ancien président du Rwanda, Habyarimana, et a paru à certains, par son "Opération turquoise", avoir voulu protéger l'ancienne armée rwandaise. Elle semble aussi tabler sur un post-mobutisme, légalisé par des élections, qui permettraient à Kengo wa Dondo de rester aux commandes. La France, ainsi que la Belgique, a également insisté sur l'envoi de Casques bleus et d'aide aux réfugiés rwandais.

LES ETATS-UNIS
Pendant longtemps, les Etats-Unis ne se sont pas tellement intéressés à l'Afrique. Mais cet intérêt a certainement augmenté ces dernières années. Confrontés à certaines formes d'extrémisme islamique, ils ont par exemple pris position au Soudan, où ils appuient les forces opposées au régime de Khartoum, aidées par l'Erythrée, l'Ethiopie et l'Ouganda. Par ailleurs, l'année passée, ils ont lancé l'idée d'une force armée africaine, financée par eux, pour maintenir la paix en Afrique. Ceci au mécontentement de la France. Au Zaïre, pays aux richesses minières énormes (l'ancien président Bush est membre du conseil consultatif de la compagnie canado-américaine Barrick Gold Corporation, qui exploite la zone aurifère de Bunia), les Etats-Unis ont longtemps soutenu Mobutu comme un pilier contre le communisme en Afrique. Mais ils paraissent vouloir s'appuyer dorénavant sur l'Ouganda et le nouveau pouvoir au Rwanda, comme bases de leur politique en Afrique, et semblent vouloir laisser le champ libre aux rebelles zaïrois. Les pays anglo-saxons ont été aussi les plus réticents à une intervention onusienne dans la crise des Grands Lacs.
Toutefois, les prises de position de la France et des Etats-Unis se sont depuis lors fortement rapprochées. Toute la communauté internationale, Etats-Unis inclus, défend l'intégrité du territoire zaïrois et condamne toute ingérence extérieure.

O.N.U. et O.U.A.
Le secrétaire général de l'ONU a nommé un représentant spécial pour la région des Grands Lacs, M. Mohammed Sahnoun.
L'Organisation de l'unité africaine (OUA) a fait appel à quatre pays (Afrique du Sud, Zimbabwe, Kenya et Cameroun) pour former un Comité de paix pour cette même région. Fin février, à l'invitation du président Mandela, M. Kabila et un représentant du président Mobutu ont eu, séparément, des contacts avec des autorités sud-africaines et américaines. Mais Kabila a rejeté la proposition d'un cessez-le-feu.
Le 19 février 1997, le Conseil de sécurité a accepté un plan de paix, tel que proposé par M. Sahnoun. Il comporte cinq points: 1. un cessez-le-feu immédiat; 2. le retrait de toutes les forces armées étrangères; 3. l'intégrité territoriale de tous les Etats de la région; 4. la protection des réfugiés; 5. l'organisation d'une conférence de paix internationale.



CADRE 3 : Zaire - Brève chronologie

18 octobre 96 - début des combats autour d'Uvira
26 octobre - prise d'Uvira par les rebelles
30 octobre - prise de Bukavu
1 novembre - prise de Goma
20 novembre - des centaines de milliers de réfugiés rwandais rentrent au Rwanda
3 décembre - les rebelles annoncent la prise de Bunia
12décembre - rapatriement forcé des réfugiés rwandais de Tanzanie
17 décembre - le président Mobutu rentre au Zaïre
31 décembre - la prise de Bunia est confirmée
2janvier 97 - Kinshasa annonce une contre-offensive "foudroyante"
3 janvier - présence de rebelles à Watsa et à Bafwasende
25 janvier - combats sur la rivière Oso
3 février - prise de Kalemie (sud) et Watsa (nord)
6 février - prise de Shabunda
11 février - on annonce la prise de Isiro
17 février - des mercenaires bombardent Bukavu
22 février - prise de Kalima
28 février - prise de Kindu. Les réfugiés quittent le camp de Tingi-Tingi

FIN CADRE 4


Dossier préparé par ANB-BIA, Bruxelles, 6 mars 1997 - Reproduction autorisée en citant la source

FIN

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