ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 322 - 15/04/1997

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Sénégal

La succession du cardinal Thiandoum

by Justin Mendy, Sénégal, 23 février 1997

THEME = EGLISE

INTRODUCTION

Le cardinal Thiandoum, archevêque de Dakar, a donné sa démission depuis le 2 février 1996. Qui va lui succéder?

L'absence du cardinal Hyacinthe Thiandoum, archevêque de Dakar, aux travaux de la Conférence épiscopale régionale CEREAO , du 4 au 9 février, sur le territoire de sa juridiction, a relancé l'attention de la communauté catholique, en particulier celle du Sénégal, sur la succession du prélat. Celui-ci a, comme le stipule le règlement, présenté sa démission au pape le 2 février 1996, au terme de ses 75 ans.
Maintenu à son poste, le cardinal continue à présenter des troubles de santé pour le moins inquiétants. Le 9 juin dernier, on fêtait les 150 ans de la plus ancienne église de Dakar, celle du Sacré- Coeur. Au cours de la cérémonie organisée dans les jardins de l'Hôtel de ville, devant une assistance nombreuse, le cardinal fut pris d'un malaise, s'affaissant dans son fauteuil; il dut être évacué. Ce genre d'accident lui était déjà arrivé deux fois au cours de célébrations à la cathédrale de Dakar.
A la réunion de la CEREAO , le vicaire général, présentant les excuses du cardinal, les motivait par sa convalescence en Italie exigée après une opération du genou. Cette annonce a suscité pas mal de commentaires: l'intervention chirurgicale n'aurait-elle pas pu être retardée? ou bien y avait-il eu urgence? En fait, le mal au genou s'était révélé le 27 décembre, à la suite d'une chute. Les signes d'extrême fatigue du cardinal sont visibles. En outre Mgr Thiandoum serait atteint de trypanose.

Une succession difficile

Le cardinal Thiandoum est un homme de dialogue. Excellent diplomate, il a su maintenir un certain équilibre entre les composantes variées de son diocèse, et même de l'ensemble du Sénégal. Difficile mission, dans cette mégapole dakaroise qui abrite l'ensemble des pouvoirs centraux politiques et administratifs, les tenants principaux des pouvoirs économiques et sociaux du pays, et aussi les représentations diplomatiques.
Par ailleurs, le Sénégal, où le libéralisme politique et syndical engendre d'assez fréquentes agitations sociales, est un pays où les chrétiens ne représentent pas plus de 7%, et les musulmans, divisés en communautés souvent rivales, plus de 90%, et où existent encore, parallèlement, des structures coutumières.
Cette complexité place la communauté catholique du Sénégal, de Dakar en particulier, dans des situations inconfortables que le cardinal Hyacinthe Thiandoum réussit à plutôt bien gérer.
Mais, étant cardinal et archevêque de la capitale, Mgr Thiandoum est considéré par les différents pouvoirs et même par les individus comme "le" chef de l'Eglise au Sénégal; il est ainsi devenu l'interlocuteur privilégié, voire unique. Cela n'est pas sans créer des frustrations chez des confrères.
D'autres désappointements se manifestent à divers niveaux dans la communauté catholique à propos de décisions prises par le prélat, suite auxquelles certains fidèles et certains religieux se sentent marginalisés. Ceux-ci attendent avec impatience des changements dans l'Eglise du Sénégal, lors de la nomination d'un nouvel évêque.

Supputations quant à l'avenir

Il y a bien des chances que l'archevêché de Dakar soit confié à l'un des cinq évêques actuellement en poste à l'intérieur du pays et qu'un nouvel évêque soit nommé à sa place dans ce diocèse. Ce schéma apparaît pour beaucoup d'"initiés" comme plausible et même vraisemblable.
Les plus audacieux avancent même deux noms: celui de l'évêque de Saint-Louis (diocèse du nord), Mgr Pierre Sagna (Spiritain), et surtout celui de l'évêque de Kaolack (diocèse du centre), Mgr Théodore-Adrien Sarr, depuis longtemps président de la Conférence épiscopale des évêques du Sénégal, de Mauritanie, du Cap-Vert et de Guinée-Bissau. Il a été reconduit dans cette fonction en décembre dernier.
Une chose est certaine, c'est que le choix du nouvel évêque et du prochain archevêque pourra s'appuyer sur les prières et sur le discernement qui les accompagnent, mais il devra tenir compte du contexte local qui demande une ouverture d'esprit très large et une convivialité de tous les instants.
En effet il y aura, d'une part, les relations avec le gouvernement, dominé par la formation politique du chef de l'Etat, Abdou Diouf, avec les partis d'opposition, les différentes centrales syndicales et autres formations sociales, culturelles et diplomatiques; et d'autre part, les rapports avec les autorités religieuses musulmanes. Tout cela exigera des nouveaux promus des qualités particulières, dont l'équilibre et la fermeté.
Le pape Jean-Paul II, à l'issue de son voyage au Sénégal en février 1992, remarquait que "les chrétiens sénégalais étaient appelés, plus que d'autres Africains, au dialogue et à la compréhension". Il parlait évidemment du dialogue islamo-chrétien qui pourrait peser d'un poids déterminant dans les choix à venir.
Le caractère transitoire de la période actuelle empêche parfois des prises de décision et l'exécution de certaines tâches. D'où une impatience qui, vu l'état de santé du cardinal, tourne même à l'inquiétude.

La CEREAO

La première session de la CEREAO s'est tenue à Anyama, près d'Abidjan (Côte d'Ivoire), le 14 juin 1963. Elle était présidée par Mgr Bernardin Gantin, alors archevêque de Cotonou (Côte d'Ivoire), aujourd'hui préfet, au Saint Siège, de la Congrégation pour les évêques. Ce n'est que le 6 février 1985 que les statuts furent approuvés, lors de la réunion ordinaire de Lomé (Togo).
Le texte stipule que l'institution "a essentiellement pour but de favoriser la coordination de toutes les activités qui intéressent l'ensemble des Eglises locales et de promouvoir, dans la mesure du possible, une pastorale d'ensemble."
La CEREAO regroupe actuellement 50 membres, évêques et archevêques, de onze pays: Bénin, Burkina Faso, Cap Vert, Côte d'Ivoire, Guinée, Guinée-Bissau, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et Togo. Le siège est établi à Abidjan (Côte d'Ivoire). - J.M., février 1997, Sénégal

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