by James Pod, Kenya, avril 1997
THEME = VIOLENCE
Depuis quelque temps, la criminalité au Kenya est en augmentation, comme il y a aussi prolifération de gangs armés prêts à tuer pour pouvoir fuir. La police se justifie en disant que tuer est le seul moyen de mettre un terme à cette situation.
Le 15 février 1996, des voleurs inconnus
attaquent la banque Habib de Nairobi, tuent un gardien et
s'enfuient en voiture avec un butin de 200.000 shs. La police,
aidée par un
hélicoptère, se lance à la poursuite des
malfaiteurs et abat Evans Luvusi, qui circulait dans l'enclos de
son employeur à la recherche d'une poule
égarée. Cela se passait à Limuru, à
plusieurs kilomètres de Nairobi. Les policiers
déclarent que Evans Luvusi était un des voleurs,
tandis que parents et amis affirment qu'il était innocent.
Cela provoqua des protestations et, quatre jours plus tard, le
ministre de la Justice, Dans certains cas, dit-on, les policiers eux-mêmes seraient
complices de crimes pour lesquels des innocents sont
tués, et "on se débarrasserait"
de suspects qui pourraient révéler
l'identité des vrais meurtriers.
Il y a plus d'un an maintenant que Luvusi a été
tué et la population avait tendance à devenir
blasée au sujet de cet accident et d'autres du même
genre. Mais lorsque, en décembre passé, trois
étudiants universitaires ont grossi la liste des victimes,
les Kényans ont ouvertement reconnu que les policiers
dépassaient probablement leurs pouvoirs.
D'après Amos Wako, les policiers ne peuvent utiliser leurs
armes que quand c'est strictement nécessaire, et ils
doivent faire bien attention à ce qu'il s'agisse d'une
réelle nécessité. La loi stipule
formellement que les policiers ne peuvent utiliser leurs armes
que s'il y a danger pour leur vie ou pour empêcher des
criminels de s'enfuir.
Cependant depuis que l'ancien ministre des
Affaires
constitutionnelles, Charles Njonjo, a adopté il y
a seize ans la politique de "tirer pour tuer",
les policiers ont la gâchette facile et peuvent tuer ceux
qu'ils décrivent comme suspects.
Le 14 mars 1997, le Standard publiait une interview
téléphonique d'un homme connu de tous sous le nom
de "Rasta", recherché par la
police comme criminel, sa tête étant mise à
prix. Rasta, selon le journaliste, a raconté qu'il
était devenu "criminel recherché"
après un désaccord avec un officier de police haut
placé pour qui il travaillait. Le
"travail" particulier de Rasta consistait
à modifier la couleur et les numéros de moteur et
d'enregistrement de véhicules d'origine inconnue que
l'officier lui amenait. Rasta raconte que, quand il avait
menacé de dénoncer l'officier à ses
supérieurs parce qu'il refusait de lui payer son dû,
celui-ci lui jura de "l'achever".
--> 1996 --> 1997 Ces faits parlent d'eux-mêmes. Nos policiers ont la
gâchette beaucoup trop facile, et devraient faire de
réels efforts pour respecter la loi et protéger la
vie et les biens de la population.
END
L'opinion publique
Selon des militants des droits de l'homme, des Kényans
innocents furent tués par des policiers voulant absolument
débusquer des criminels. Ils accusent la police d'avoir
monopolisé la loi...: "les policiers
procèdent aux arrestations, font les enquêtes, sont
les procureurs, le tribunal et le bourreau à la
fois".
Statistiques
On a des statistiques sur ces personnes tuées par la
police en dehors de tout contexte judiciaire. On a relevé
45 cas en 1994, et 120 en 1995. Et qu'en est-il des morts
récentes? Le Daily Nation a publié les cas
suivants qui se sont passés entre le 14 décembre
1996 et le 14
février 1997.
* 17 décembre: Festo Etaba Okongo,
étudiant à l'université d'Egerton, est
tué par des policiers au cours de manifestations violentes
au campus.
* 18 décembre: deux étudiants
universitaires kényans sont abattus sur le campus par la
police au cours d'une manifestation de protestation contre le
meurtre de Festo Etaba.
* 20 décembre: deux hommes suspectés d'être
des gangsters sont abattus à Kikuyu.
* 23 décembre: les policiers tuent quatre suspects dans
la cité.
* 5 janvier: la police abat quatre gangsters,
soupçonnés d'avoir violé une femme
âgée à Kiambu.
* 6 janvier: Un homme soupçonné de cambriolage est
tué dans le quartier de River Road, à
Nairobi.
* 10 janvier: les policiers de la cité tuent trois
suspects dans la zone industrielle de Nairobi.
* 14 janvier: Elizabeth Wamalwa est tuée lors d'un
échange de tirs entre policiers et gangsters
armés.
* 15 janvier: les policiers abattent un suspect dans une rue de
Nairobi.
* 22 janvier: un missionnaire catholique et un garde sont abattus
par des policiers de l'administration.
* 24 janvier: un inspecteur de police suspecté
d'être un voleur est abattu par des agents de la
sécurité à Machakos.
* 2 février: Un policier de l'administration tue un
suspect à Kakamega.
* 3 février: Deux personnes
soupçonnées de vol sont tuées par la police
dans le district de Kikuyu Kiambu.
* 5 février: Un suspect est abattu par des policiers
à Nyali, Mombasa.
* 14 février: N'gan'ga Kabui meurt à Elburgon
à la suite des blessures infligées par les
policiers qui l'avaient pris erronément pour un voleur.