ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 326 - 15/06/1997

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Togo

Peau de chagrin pour la population

by Pascal Dotchevi, Togo, 5 mai 1997

THEME = VIE SOCIALE

INTRODUCTION

Les problèmes de la population togolaise deviennent inquiétants.
Il n'y a plus de jour où l'on n'annonce une augmentation sur tel ou tel produit.
Et rien ne se pointe à l'horizon pour dissiper la peur des consommateurs togolais.

Depuis le début de l'année, on assiste à une litanie de majorations sur les produits dits pourtant de première nécessité. Tout a commencé par le vote du budget 1997 dans lequel le Premier ministre a demandé une unification des taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Ces taux étaient de 7% sur les produits de première nécessité et de 18% sur les autres. Depuis le vote du budget '97 par l'Assemblée nationale, il n'y a plus qu'une seule et unique TVA à 18%.

La flambée des prix

Tout de suite après, on a assisté à une flambée des prix sur le marché togolais. Ainsi le petit sac de riz de 5 kg qui s'achetait à 2.800 CFCA est passé à 5000 F. Le sucre, l'huile, etc. ont suivi également la hausse.

Six jours après l'entrée en vigueur de cette hausse de la TVA, un communiqué du ministère du Commerce annonce l'augmentation du prix des produits pétroliers. Ainsi le litre de mélange pour les motos, qui se vendait à 220 F, est passé à 380 F. Cela a obligé les chauffeurs de taxis à augmenter leurs tarifs de 25%.

A peine les travailleurs togolais ont-ils eu le temps de réfléchir, qu'une autre augmentation les surprend. Un communiqué conjoint du ministre des Sociétés d'Etat, du ministre de l'Equipement et du ministre d'Etat chargé de l'Economie, annonce que le prix de l'eau a augmenté: la tranche dite sociale, comprise entre 1 et 10 m3 par mois, passe de 155 F/m3 à 165 F/m3; la tranche intermédiaire (de 11 à 30m3) de 250 à 310 F le m3. Pire! Dans quelques semaines, l'eau aux fontaines publiques, qui était gratuite, deviendra payante.

Réajoustement des salaires

Ce bombardement de hausses des prix a poussé l'Union nationale des syndicats indépendants du Togo (UNSIT) à monter au créneau. Dans un communiqué, l'UNSIT demande "impérieusement au gouvernement la revalorisation des salaires". Elle lui demande en outre de "s'atteler à une politique volontariste de réduction du train de vie de l'Etat". L'UNSIT appelle enfin le gouvernement à "refuser, au nom du droit de souveraineté, l'application des politiques d'ajustement et de relance, dont les conséquences sont, parmi d'autres, la dégradation des conditions de vie et la misère des populations."

Quand on sait que le Togo est resté pendant longtemps le seul pays qui n'ait pas réajusté les salaires de ses travailleurs à la suite de la dévaluation du franc CFA en janvier 92, on ne peut que s'indigner. Les fonctionnaires togolais, surtout les enseignants, sont presque réduits à la mendicité. Les fins de mois s'allongent et vont jusqu'à 63 jours. La devise est toujours la même: l'Etat n'a pas d'argent. Mais d'autre part, cet Etat organise de grandes rencontres à coup de millions.

L'autre réalité

En quelques semaines, le Togo a ravi la vedette à toutes les capitales africaines en matière d'organisation de grandes conférences.

Le ballet a été ouvert par les manoeuvres militaires France, Bénin, Burkina, Togo, dont l'apothéose a été un gigantesque défilé à Atakpamé à 180 km au nord de Lomé. De sources proches de l'organisation, il y aurait eu 700 millions de nos francs dévalués comme dépenses. La France, selon ces mêmes sources, n'y aurait contribué que pour 30%.

Puis vint le sommet extraordinaire de l'organe central de l'OUA pour le Zaïre, les 26 et 27 mars à Lomé. Près d'un milliard de FCFA dépensés. Une fois encore il n'y aurait eu que 30% de contribution de la France. Quelques jours plus tard, c'était le Conseil international pour le sport militaire qui tenait sa 52e Assemblée générale à Lomé, du 1er au 14 avril dernier. Là aussi, des centaines de millions ont été enregistrés au trésor public comme dépenses.

Le Togolais moyen éprouve des difficultés à concilier un Etat qui dit n'avoir pas les moyens et ce même Etat qui "investit énormément dans des activités qui ne rapportent rien à la population". La misère créée par les arriérés de salaire et les hausses des prix font naître chez les travailleurs un sentiment antigouvernemental. C'est le Premier ministre Kwassi Klutsè qui est le plus fustigé. Il ne cesse d'être interpellé pour se conformer à ses engagements de revalorisation sociale, pris lors du vote du budget devant l'Assemblée nationale en décembre dernier.

"Nous n'avons plus confiance en ces politiciens qui font des promesses sans les réaliser", avoue cet enseignant de lycée qui dit attendre trois mois d'arriérés de salaire. Le Premier ministre togolais, qui a battu le record des voyages officiels en un an de fonction, sans grands résultats, convaincra-t-il les travailleurs qui risquent d'extérioriser leur ras-le- bol?

Déjà les enseignants des 2e et 3e degrés observent un arrêt de travail depuis plusieurs jours. L'Intersyndicale a rencontré le Premier ministre à la veille du 1er mai qui a promis de résoudre tous ces problèmes d'ici peu. Mais ces difficultés de paiement du gouvernement ne donnent-ils pas raison à ce député qui a trouvé "le budget irréaliste, en attente d'un appui des institutions de Bretton Wood"?

En tout cas, les décaissements de ces institutions promis à cor et à cri par le gouvernement pour sauver l'économie, tardent toujours à se concrétiser.

END

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