ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 329 - 01/09/1997

CONTENTS | ANB-BIA HOMEPAGE

Mali

Collusion entre politique et justice

by Alexis Kalambry, Mali, juin 1997

THEME = JUSTICE

INTRODUCTION

Plusieurs affaires judiciaires concernant des hommes politiques font parler d'elles.
S'agit-il de procès politiques?...

Mady Diallo

En octobre 1996, Mady Diallo et plusieurs autres militaires sont arrêtés, accusés d'une tentative de coup d'Etat. Tombé malade en détention, Diallo a été évacué sur la France pour être soigné. Pendant sa convalescence en France, il s'est répandu sur Radio France Internationale en critiques acerbes contre les pouvoirs publics qui s'acharneraient sur un opposant politique. L'homme est une personnalité influente du Mouvement patriotique pour le renouveau (MPR), un parti se réclamant de l'héritage de l'ex-parti unique constitutionnellement interdit. Il est revenu au pays le 5 mars 1997. Le juge d'instruction de Kati est chargé de son dossier.

Le cas Mao

Le 31 mars, M. Mohamed Lamine Haïdara, dit Mao, a été interpellé et écroué. Il était candidat du MPR aux législatives en Commune II, du district de Bamako; d'où une levée de boucliers de la part de ce parti, qui a crié au procès politique. En effet, Mao est un important bailleur de fonds du MPR et sa popularité était réelle dans la commune. La justice reproche aujourd'hui à Mao l'escroquerie, la concussion et le faux en écriture publique, les deux derniers chefs d'inculpation entraînant des peines criminelles. La concussion est une infraction commise par un agent du service public qui perçoit de l'argent pour un travail qui devrait être gratuit. Ses auteurs encourent une peine d'emprisonnement de 5 à 10 ans si le montant dépasse 50.000 FCFA, et de 2 à 5 ans s'il est en-dessous de cette somme. Pour ce qui est du faux en écriture publique, la peine peut aller de 5 à 20 ans de prison. Mao, dont le dossier est toujours en instruction, sera jugé à Dioïla, à quelque cent kilomètres de la capitale. En tant que maire, il est officier de police judiciaire et celui-ci doit être jugé dans une juridiction autre que la sienne.

Les événements de Niamakoro

L'élection présidentielle du 11 mai, on le sait, s'est déroulée dans une atmosphère de tension à cause des marches, meetings et mots d'ordre de boycott de l'opposition. Certains ont décidé de passer outre aux consignes de leurs leaders qui prêchaient la non- violence et, le jour même du vote, au marché de Niamakoro dans une banlieue de la capitale, ils ont semé la mort et la désolation avec une grenade offensive. Fodé Coumaré, un garçon de 15 ans, a trouvé la mort; Drissa Sidibé (16 ans) et Bacary Bagayoko (65 ans) ont été blessés.

L'enquête de la police a permis d'appréhender 12 personnes qui ont été déférées devant le parquet. Parmi elles il y avait Amadou Alassane Cissé, candidat du MPR aux législatives, et Mamadou Ba Traoré, candidat UDFP (Union des forces démocratiques et populaires), un autre parti de l'opposition. Les chefs d'accusation retenus sont: assassinat, association de malfaiteurs, et coups et blessures volontaires. L'assassinat est puni par la peine de mort. Pour l'association de malfaiteurs, les auteurs peuvent encourir de 5 à 20 ans de travaux forcés.

Le militant zélé de Kéniéba

Désireux de suivre à la lettre le mot d'ordre des responsables de boycotter le scrutin du 11 mai, M. Dougatié Dembélé a tenté manu militari d'empêcher des citoyens d'exercer leur droit de vote à Kéniéba, dans la région minière du sud du pays, parce que ceux-ci auraient été des militants de son parti. Devant le refus de M. Dembélé de quitter le bureau de vote, il a été interpellé. Déféré devant la justice, il a écopé d'une peine d'un mois de prison avec sursis et interdiction d'exercer ses droits civiques pendant 5 ans.

Le saccage du siège Adéma de Ségou

Dans la nuit du 10 au 11 mai, dans le climat délétère que l'opposition avait créé pour faire échec à l'élection présidentielle, des individus ont mis à sac le siège de l'Adéma (Alliance pour la démocratie au Mali - le parti au pouvoir) à Ségou, la seconde ville du pays, et endommagé la voiture d'un de ses responsables. Une enquête de la police a permis d'arrêter Adama Kouyaté, le cerveau présumé de l'opération, et 11 autres personnes. Il leur est reproché l'incendie volontaire, l'association de malfaiteurs et l'atteinte aux biens d'autrui.

L'incendie du cabinet

Le cabinet de Me Tall, principal opposant, a reçu la visite d'individus dans la nuit du 12 au 13 mai. Ils ont réussi à incendier le matériel au cocktail Molotov. Les dégâts sont importants: la bibiothèque, 4 ordinateurs, 4 photocopieurs et diverses autres machines ont été brûlés. Une enquête a été ouverte contre X sur plainte du propriétaire. Elle suit son cours.

La Céni contre Me Tall

Le 5 mai, au cours d'une rencontre avec la société civile dans le cadre de la médiation dans la crise politique, Me Mountaga Tall, président du Cnid-Fyt (Comité national d'initiative démocratique), a exhibé des cartes électorales affirmant qu'il les avait achetées au marché noir. Le président de la Céni (Commission électorale nationale indépendante), Me Kassoum Tapo, a déposé plainte contre X pour abus de confiance et vol de cartes électorales.

Au cours de son enquête, la brigade d'investigation judiciaire a interpellé Me Tall. Ensuite, le 20 mai, le juge d'instruction lui a signifié son inculpation pour recel de cartes électorales. Il risque une peine de prison de 5 à 20 ans. Les avocats de sa défense ont invoqué la nullité de la procédure. Selon eux, le bâtonnier doit être saisi préalablement, avant toute poursuite judiciaire contre un avocat, sous peine de nullité de la procédure. Me Tall n'a pas hésité à qualifier son inculpation de procès contre "un homme politique qui dérange".

END

CONTENTS | ANB-BIA HOMEPAGE

PeaceLink 1997 - Reproduction authorised, with usual acknowledgement