by Yvonne Sampoda, Kenya, juillet 1997
THEME = SANTE
Tous les jours, Jemimah Kemunto, après avoir aidé ses parents au travail de la ferme, consacre son après-midi à assister à la réunion d'un groupe dont elle est membre. Elle a terminé l'école secondaire il y a deux ans, mais n'a obtenu que des résultats médiocres. C'est pourquoi elle n'a pas pu trouver d'emploi. A la mi-1995, elle a appris que des filles ayant quitté l'école allaient former un groupe pour faire quelque chose afin de gagner de l'argent. Le groupe, établi près du marché Tombe, dans le district de Nyamira, est composé de jeunes filles de 13 et 15 ans. Elles sont 19 et se réunissent tous les jours dans une salle qu'elles louent pour ksh 300 (environ 6 US<+>$), où elles s'aident mutuellement pour apprendre la couture, la broderie, le tricotage et d'autres techniques. Elles vendent leurs produits au marché le plus proche.
Les efforts que ce groupe fait pour se former ont tellement impressionné l'assistante sociale locale (CDA), qu'on a décidé de faire participer ce groupe au projet pilote concernant la santé socio-économique et la procréation, organisé par la Fondation de la recherche médicale en Afrique (AMREF).
Le projet, soutenu par l'Agence internationale de développement suédoise, a pour but d'améliorer et promouvoir le bien-être des jeunes, en s'intéressant à leurs besoins cruciaux dans le domaine socio-économique et celui de la santé. Il lance et soutient des activités socio-économiques viables, développe une information socio-économique et sur la procréation, dans le but de réduire l'incidence de grossesses non-désirées, d'avortements et de maladies sexuellement transmissibles.
Le premier objectif du projet, ce sont les jeunes entre 10 et 25 ans qui ne fréquentent pas l'école, célibataires ou mariés, résidant sur les lieux du projet. Le second objectif est d'amener de plus en plus les parents, l'Eglise, les communautés et les gens du même âge à s'impliquer pour promouvoir un changement d'attitude dans les habitudes sexuelles.
Dans la province de Nyamira, le projet intervient à deux endroits: à Kiogutwa, dans le district de Manga, et à Nyabisimba, dans le district de Nyamira. Les sites de contrôle sont établis dans la localité de Nyankoba, dans le district de Rigoma, et à Boisanga II, dans le district d'Ekerenyo.
Dans les diverses implantations, les parents, les responsables de la communauté et les dirigeants d'Eglises sont totalement impliqués dans les comités locaux d'organisation, où ils apportent une aide importante sous forme de conseils aux jeunes. Il y a aussi des éducateurs, ayant comme point d'attache le quartier-général de l'implantation, avec un rôle de conseiller.
Selon Mr Josaphat Nyagero, directeur du projet pour la province, une première étude a fourni des données sur la situation socio-économique et l'état de santé des jeunes. Les données portaient sur les caractéristiques socio-économiques, les préférences et pratiques sexuelles, la fréquence des grossesses, la prévention de la grossesse, les maladies sexuellement transmissibles (connaissance et fréquence), les connaissances au sujet du SIDA.
Ces données ont révélé que 90,5% des 613 jeunes interviewés avaient déjà eu des expériences sexuelles, et un pourcentage élevé de victimes du SIDA. L'enquête a aussi montré que, si les jeunes sont prêts à discuter de leurs problèmes sexuels avec des gens de leur âge et leurs amis, ils sont par contre très réticents à le faire avec des amis membres d'Eglise, et avec leurs parents.
Lors de l'enquête, les jeunes ont exprimé leurs besoins: un soutien financier et matériel, de l'emploi, l'organisation d'un projet et des connaissances techniques, y compris un accompagnement et des conseils en matière sexuelle.
Depuis le début du projet, il y a deux ans, 26 groupes de jeunes ont jusqu'ici reçu une aide matérielle pour un montant de 440.000 ksh (environ 8.000 US<+>$). Cette aide a été fournie sous forme de matériel récréatif, jeux d'intérieur, matériel de théâtre et de musique. On a donné aussi des machines pour des activités fermières et agricoles ainsi que pour des formations. A souligner, le dialogue et le partage d'informations entre les membres, l'accompagnement et les conseils.
Selon Mr Nyagero, le projet a adopté une méthode participative multisectorielle, à laquelle prennent part toutes les personnes concernées, le gouvernement, les Eglises, les parents, la communauté entière plus les jeunes.
Le Dr Minou Fulesang, consultante de l'Agence internationale de développement suédoise, a inspecté le projet après deux ans de fonctionnement. D'après elle, il s'agit d'une organisation unique; plusieurs organisations non gouvernementales ont tendance à se perdre car "elles font cavalier seul", sans la participation du gouvernement et des communautés de base. Ce projet a progressé rapidement et bouclé son calendrier en temps voulu.
Selon Mme Fulesang, les caractéristiques principales de ce projet sont la stabilité et la continuité de l'équipe du projet. Elle a aussi été heureusement surprise en apprenant que la majorité du soutien technique et spécifique provenait de conseillers des divers départements gouvernementaux. Cela a fortement réduit les frais de fonctionnement du projet qu'on aurait dû payer à des spécialistes étrangers.
Maintenant, les jeunes filles pensent à l'avenir, quand elles seront toutes capables de tirer des bénéfices de leurs activités, et que chacune sera apte à faire démarrer sa propre entreprise.
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