by Felix Kunda, Lusaka, Zambie, août 1997
THEME = ARMES
"Nous n'avons pas vu son corps; nous avons entendu une
explosion et, tout de suite après, nous avons vu ses
vêtements qui volaient de toutes parts". Alphonsine
Urayaneza témoignait de façon émouvante
à l'Atelier sur la conscientisation du public en vue
d'interdire les mines antipersonnel dans le monde. Elle
décrivait comment sa soeur avait été
tuée au Burundi en mettant le pied sur une mine.
Melle Urayaneza racontait comment sa soeur et trois autres
personnes, après avoir couru longtemps dans la brousse pour
échapper au génocide dans leur pays, le
Burundi, se croyaient enfin saines et sauves. Tout-à-
coup, elles entendirent un grand coup. En se retournant, elles
virent de la poussière partout, avec du feu là
où avait été leur soeur. D'elle, il n'y avait
plus trace.
Melle Urayaneza et les autres sont maintenant
réfugiées en Zambie. Elles suivent des cours de
journalisme au Collège Evelyn Hone des arts appliqués
et du commerce. Elles ont fait l'éloge des ONG qui font
pression pour qu'on interdise les mines terrestres.
Des accidents comme celui-là coûtent des vies
innocentes un peu partout dans le monde. C'est dans ce contexte que
le Monitoring Team zambien indépendant et
Afronet ont organisé un Atelier d'un jour pour
sensibiliser les gens sur l'importance d'interdire les mines
antipersonnel dans le monde.
A l'ouverture officielle de l'Atelier, Mgr Medado Mazombwe,
évêque de Lusaka, a déclaré que l'Eglise
catholique continuera à sensibiliser le monde jusqu'à
ce que tous soient d'accord pour interdire les mines terrestres.
L'Eglise désapprouve tout engin qui apporte des souffrances
inutiles aux gens. Il a rappelé à ses auditeurs que
Dieu a créé un monde où chaque homme devrait
vivre et jouir de la vie jusqu'à ce que Dieu lui-même
le rappelle à Lui.
Au même Atelier, le général Kingsley
Chinkuli a fait un exposé sur: "La politique de
l'usage des mines antipersonnel en Zambie, pendant la
Première et la Seconde République".
D'après lui, le premier accident dû à des mines
terrestres en Zambie s'est produit en 1970. Un lieutenant
envoyé pour déminer la région autour de
Livingstone, capitale touristique de la Zambie, avait gardé
une mine antipersonnel dans sa chambre de la caserne Arakana de
Lusaka. "Jusqu'à maintenant, on ne sait pas bien ce
qui s'est passé. Il a pu faire exploser la mine
accidentellement mais, quoi qu'il en soit, ce qui restait de lui
était un triste spectacle. Il avait été
déchiqueté et les morceaux avaient été
projetés sur les murs". Depuis lors, on a
décidé d'envoyer les officiers suivre une formation
spéciale en matière de mines antipersonnel.
Cela est arrivé à une époque où la
Zambie était entourée par des voisins hostiles
parce qu'elle soutenait toujours la libération de l'Afrique.
Des voisins tels que la Rhodésie (actuellement
Zimbabwe), le Sud-Ouest africain (actuellement Namibie), le
Mozambique, l'Angola et l'Afrique du Sud. Ces
ennemis pouvaient frapper la Zambie de différents
côtés et, ainsi, il eût été
difficile pour la Zambie de participer activement à
répandre des mines antipersonnel. La Zambie était sur
la défensive, dit le général Chinkuli, et
c'est pourquoi elle n'a pas semé de mines le long de ses
frontières. Mais des mines plantées par les
"rebelles" de l'époque pourraient se
trouver encore le long des frontières.
Selon le professeur Kevin Haworth, président de la
Croix-Rouge de Zambie, les mines antipersonnel ont aujourd'hui
tué et mutilé plus de gens dans le monde que les
bombes nucléaires et les armes chimiques: s'il suffit de
trois dollars pour fabriquer une mine terrestre, cela
coûterait 1.000 dollars ou plus pour l'enlever. Beaucoup de
pays, surtout en Afrique, ne suivent pas les lois humanitaires
internationales sur l'utilisation des mines.
Le professeur Haworth citait la loi qui demande que l'on ne vise
pas les civils et qu'on conserve les plans des endroits où
les mines ont été plantées pour qu'à la
fin des hostilités on puisse les enlever. On a bien
inventé une machine pour déminer; mais elle
coûte 300.000 US $: beaucoup trop cher pour un pays
d'Afrique. De plus, les résultats de cette machine ne sont
pas garantis à 100%.
Où trouve-t-on des mines terrestres en Afrique? L'Angola a
de 29 à 50 millions de mines; le Mozambique 2 millions; le
Libéria 18.000. Pour le Rwanda, on n'en connaît pas le
nombre.
Toujours selon le prof. Haworth, depuis 1979, la Croix-Rouge
zambienne a produit 100.000 jambes artificielles qui coûtent
200 US$ chacune; 700.000 chaises roulantes; 140.000 paires de
béquilles. Les frais médicaux pour soigner les
victimes de mines antipersonnel peuvent s'élever
jusqu'à 1.000 $ par personne. De janvier 1995 à mars
1997, la Croix-Rouge zambienne a aidé 9.000 nouvelles
victimes.
Les organisateurs de l'Atelier sont décidés à
ce que la Zambie participe pleinement à la campagne mondiale
contre les mines antipersonnel. Mais Alfred Zulu,
président du Monitoring Team a déclaré
qu'ils sont déçus parce que le gouvernement a
refusé de prendre part à l'Atelier, sous
prétexte que "l'annonce était arrivée
trop tard". Le gouvernement a été
invité à présenter un document sur la
politique du pays en matière de mines terrestres. Interdire
les mines antipersonnel devrait être l'affaire de tout le
monde.
END