ANB-BIA SUPPLEMENT - ISSUE/EDITION Nr 335 - 01/12/1997

ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 335 - 01/12/1997

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Libye

Ce dont on ne parle pas

by Kenneth Dareng, Nigeria, septembre 1997

THEME = VIE SOCIALE

INTRODUCTION

La Libye, pays d'Afrique du Nord riche en pétrole, avec une population d'environ 2,4 millions d'âmes,
est toujours gouvernée par un des dictateurs africains, le colonel Muammar Khadafi,
qui préside aux affaires libyennes depuis 27 ans

La Libye accueille plusieurs centaines d'immigrants qui y ont échoué. Ils sont venus du Nigeria, du Niger, du Soudan, du Tchad, du Ghana, de l'Algérie... Plusieurs d'entre eux, surtout les plus jeunes, immigrants ou réfugiés économiques, y sont allés à la recherche de meilleures conditions de vie; d'autres, dans l'espoir de passer en Europe.

Malgré les dures conditions de voyage, des centaines de gens sont passés en Libye, beaucoup sans documents en règle. Quand la police ou les militaires les arrêtent, on les emmène parfois au désert où on les abandonne pour les punir. Un "traitement" alternatif consiste à les déporter jusqu'au dernier poste frontière de Madama, où on les laisse sans bagages. Beaucoup de ces "hôtes" de la Libye finissent au centre de détention tristement notoire, connu populairement sous le nom de "Zazou". On sait qu'on y torture les "résidents".

Racket des passeports

Entre-temps, les officiers libyens postés aux zones frontières profitent du trafic florissant qu'est le racket des passeports internationaux. Ces officiers particuliers, après avoir examiné les passeports des voyageurs, souvent ne les rendent pas à leurs propriétaires. Au lieu de cela, ils les vendent à un syndicat spécialisé dans la revente de ces passeports à des voyageurs qui ont perdu le leur, ou qui, de toute façon, ont besoin d'un passeport "particulier" pour Dieu sait quoi. On soupçonne des fonctionnaires importants d'être mêlés à ce racket. Certains ont même le culot de se faire passer pour la personne décrite sur le passeport volé.

En plus de saisir les documents de voyage des passagers, les fonctionnaires libyens de l'immigration se livrent à des fouilles corporelles sur les voyageurs des deux sexes, la plupart du temps à la recherche de valeurs. Les voyageuses sont laissées au "bon vouloir" des fonctionnaires de l'immigration.

Supériorité libyenne

On regarde ces immigrants avec grande circonspection, car Khadafi a convaincu ses concitoyens que les Libyens sont supérieurs à toute autre race au monde. Qu'arrive-t-il alors à ces immigrants entrés illégalement dans le pays? Les hommes arrivent parfois à trouver de l'emploi chez les Libyens, pour laver la vaisselle, nettoyer des toilettes et des salles de bain, balayer, etc. Ceux qui n'ont pas la chance de trouver ce genre de job, vont à "Shogol Ground", un endroit où on engage des laboureurs payés à l'heure pour des travaux subalternes. Mais les immigrants doivent faire attention à ne pas se faire ramasser par les autorités militaires.

Les femmes entrées illégalement ont encore plus de problèmes pour trouver du travail, car en Libye musulmane les femmes ne sont habituellement pas autorisées à travailler au-dehors. Leur place est à la maison. Alors, leur seule alternative pour gagner leur vie est de se tourner vers la prostitution, un "métier" contrôlé par un syndicat dénommé "Syndicat des relations".

Conditions de service

Les immigrants qui aboutissent en Libye doivent s'en prendre à eux-mêmes, car ils n'ont pas cherché une information sérieuse avant de se mettre en route, ou bien ils ont été mal informés. Beaucoup sont venus parce qu'ils ont entendu dire que la Libye est un pays "où coulent le miel et le lait". Ils les attendent toujours!

Ceux qui sont exploités comme paysans ne reçoivent qu'un maigre salaire. Certains patrons même disent que, puisqu'ils fournissent trois repas par jour, l'ouvrier n'a plus droit à rien. Souvent ces maigres salaires sont payés en retard, et le pauvre ouvrier préfère ne rien dire de peur d'être arrêté. Néanmoins, certains préfèrent le travail à la ferme parce que là ils sont à l'abri du harcèlement de la police.

Les Tchadiens sont les plus nombreux parmi les immigrants. La plupart d'entre eux travaillent dans le transport. De ce fait, ils sont responsables de l'entrée en contrebande en Libye de la majorité des immigrants illégaux. On sait que, au Tchad, la Libye soutient plusieurs factions rebelles, tout en armant, en même temps, l'armée tchadienne. Parmi ces factions rebelles figurent des barons de la drogue qui ont bâti leur fortune par des moyens douteux. Actuellement ils contrôlent tout un réseau de drogue.

Et dans tout cela, le gouvernement...

Le service libyen de l'immigration a catégoriquement rejeté les accusations lancées contre ses fonctionnaires. Mais en même temps, il ajoute que les fonctionnaires ne peuvent pas simplement se contenter de regarder des gens à l'identité douteuse entrer dans le pays, sans aucun document de voyage ni certificat de santé. Le service de l'immigration a promis d'enquêter sur la mort récente dans le désert, de 120 personnes, pour la plupart des immigrants clandestins allant du Niger en Libye.

Dans une déclaration qu'elle vient de publier, l'ambassade du Nigeria à Tripoli affirme qu'elle ne peut aider que les Nigérians séjournant légalement en Libye. Ceux-ci ont eu la réaction rapide. "Après tout", disent-ils, "nos ambassades ne sont-elle pas censées aider tous les nationaux?" Ils accusent aussi leur ambassade de ne s'intéresser qu'aux affaires pour lesquelles on leur offre des "compensations" financières.

La situation de ces immigrés est bien malheureuse. Il faudrait prendre des mesures pour venir en aide à ceux qui, pour une raison ou une autre, ont dû quitter leur pays et chercher asile dans un autre pays... qui, dans ce cas, se trouve être la Libye.

END

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