ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 337 - 01/01/1998

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"Au commencement était la peur,
et la peur était avec la loi,
et la peur était votre unique loi"

(Christian Bobin, Le Très-Bas, Ed. Gallimard)

EDITORIAL

AFRIQUE - LE POUVOIR JUDICIAIRE

by ANB-BIA, Bruxelles, décembre 1997

Le Bulletin d'Information Africaine (BIA) s'est fixé comme objectif de suivre pas à pas les progrès de l'Afrique sur la route de la démocratie, et de voir comment cette démocratie est vécue au quotidien. Des mots comme "démocratie", "liberté", "droits de l'homme" reviennent presqu'à chaque page de notre publication.

Toute société bien organisée se doit d'avoir des lois, des règlements et des structures, sans lesquelles ce serait le chaos. La façon dont ces lois seront concrètement interprétées dans la vie de tous les jours, dépendra du type de société dans laquelle on vit. Mais qu'est-ce qui, en définitive, assure l'ordre dans cette société et se porte garant des libertés fondamentales? C'est le pouvoir judiciaire - ce groupe d'hommes et de femmes, juges, magistrats ou avocats, et leurs collaborateurs. C'est ce pouvoir qui veille au respect de nos droits fondamentaux.

BIA a demandé à un certain nombre de journalistes africains (pour la plupart, vivant et travaillant en Afrique) d'étudier le fonctionnement actuel du pouvoir judiciaire dans leur pays. Ce numéro spécial est le résultat de cette analyse. Celle-ci n'a rien d'officiel. Elle reflète simplement le point de vue du journaliste sur cet aspect délicat de la situation dans son propre pays.

Anciens systèmes juridiques

Il ne faudrait pas oublier que, bien longtemps avant l'arrivée des Européens et la législation que l'autorité coloniale a imposée, l'Afrique possédait déjà un système juridique, avec des lois non écrites mais bien réelles. Chaque ethnie possédait ses coutumes et traditions, qui régissaient la vie quotidienne des gens et qui étaient transmises de génération en génération. Ces coutumes et ces lois faisaient partie intégrante de l'ancienne Afrique.

Depuis lors, les temps ont changé, tout comme les situations concrètes de chaque pays. Comme nous le rappelle Abdul Koroma, juge à la Cour internationale de justice: "Bien sûr, dans le passé, il y avait des lois en Afrique! Mais si l'Afrique veut devenir un continent moderne, nous devons en tirer les conséquences. Cela ne signifie cependant pas que nous devions renier notre africanité".

Il est toutefois important de souligner que, en plus du système juridique hérité du temps de la colonie, certains pays ont d'autres types de tribunaux, adaptés à leurs situations particulières. On peut noter ainsi le "système des tribunaux" propre au Ghana, les tribunaux coutumiers en Afrique du Sud et ailleurs, les cours islamiques en Mauritanie, etc.

Indépendance

Un des problèmes les plus actuels en Afrique semble être celui de l'indépendance du pouvoir judiciaire face à l'exécutif. Dans certains pays la Constitution en parle explicitement, dans d'autres il existe une politique établie de non-interférence dans l'exercice du pouvoir judiciaire. Mais l'application concrète de ces principes varie de pays à pays, surtout en ce qui concerne les nominations des juges et des magistrats. Très souvent, la totale indépendance judiciaire reste un idéal à atteindre. Mais une chose est certaine, un pouvoir judiciaire impartial et indépendant est la pierre d'angle de toute législation d'un Etat de droit.

Les nominations

L'indépendance du pouvoir judiciaire dépend largement de la procédure de nomination des juges et de qui ils dépendent. Beaucoup de pays ont une instance bien précise chargée de ces nominations, qui présente au chef de l'Etat une liste de noms de personnes susceptibles d'être nommées juges ou magistrats. Mais le problème est que souvent les membres de cette instance sont eux aussi nommés par le même chef d'Etat!

Certaines Constitutions certifient l'indépendance du pouvoir judiciaire, mais elles n'explicitent pas comment l'assurer. Le cas typique est celui des membres du pouvoir judiciaire qui dépendent du ministère de la Justice, un organisme administratif de l'exécutif. En bref, il semblerait que, dans la plupart des pays africains, le pouvoir judiciaire fait partie de la fonction publique qui, elle, n'est pas indépendante.

Heureusement, tout n'est pas sombre. Dans ce tableau du pouvoir judiciaire, on parle de juristes exceptionnels, décidés à faire respecter le droit, et qui se montrent très courageux face aux empiétements de l'exécutif; comme on note aussi les efforts de pouvoirs judiciaires pour se restructurer eux-mêmes.

Problèmes de traduction

Un petit mot sur la traduction des termes juridiques. En gros, on peut dire que l'Afrique a hérité de deux systèmes juridiques: celui dérivant du code napoléonien (surtout les anciennes colonies francophones) et celui dérivant du droit commun anglais (surtout dans les ex- colonies britanniques). Une traduction littérale de certains termes juridiques n'est pas toujours possible, et souvent une traduction ne correspond pas à la terminologie de l'autre système. Le terme français "magistrat", par exemple, ne correspond pas nécessairement à la réalité du terme anglais "magistrate", et vice versa. Dans la traduction française, nous avons gardé le terme "High Court" (qui correspond plus ou moins à un tribunal de grande instance). En général, nous avons essayé d'employer une terminologie que mette le lecteur à l'aise. D'avance nous nous excusons auprès du lecteur et des auteurs des articles si nous n'avons pas toujours pu atteindre ce but.

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