by Pascal K. Dotchevi, Togo, janvier 1998
THEME = POLITIQUE
Le 6 janvier dernier, seize mois après
son investiture,
le chef du gouvernement togolais, Kwassi Klutsè, a présenté
son bilan au Parlement.
Le 21 août 1996, le président de la République désignait Kwassi Klutsè comme Premier ministre, à la suite des élections législatives partielles qui ont fait basculer la majorité parlementaire en faveur de la mouvance présidentielle.
En se présentant devant le Parlement pour son investiture, le 3 septembre 1996, le nouveau Premier ministre articulait son programme en cinq points clés pour, dit-il, "répondre à l'attente du peuple". Il promettait notamment de "consolider la démocratie et assurer la sécurité pour chacun; construire un Togo plus uni, solidaire et prospère; engager des mesures pertinentes de redressement économique pour une croissance soutenue et durable; relever le défi éducatif et culturel" et, enfin, "conduire une diplomatie active axée sur une coopération agissante".
Conformément à ce programme, le Premier se réjouit, seize mois après, d'avoir atteint certains objectifs. Il a porté à son actif la mise en place de certaines institutions prévues par la Constitution, telle la Commission nationale des droits de l'homme, la Cour constitutionnelle, le Conseil supérieur de la magistrature, la Cour suprême et la Haute autorité de l'audiovisuel et de la communication. Il a également fait remarquer que des efforts ont été fournis par son gouvernement pour le renforcement du système judiciaire et de la sécurité.
Sur le plan économique, il a noté que grâce à l'action de son gouvernement dans le cadre de l'amélioration des finances publiques, le découvert auprès de la Banque centrale de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO), a été ramené de 38 milliards de fcfa à 18 milliards, au 31 décembre 1997.
Dans son discours fleuve, le Premier ministre a dressé un bilan positif, même si la plupart de ses actions sont tournées vers l'avenir. "A l'entendre, on dirait que l'on est au paradis ici... et pourtant !", se révolte un étudiant. Les députés présents au Parlement ont, quant à eux, jugé avec plus de pertinence le bilan du chef du gouvernement: il reste beaucoup à faire!
Même si toutes les tendances politiques représentées à l'Assemblée nationale ont été unanimes à féliciter le Premier ministre pour son courage de venir se présenter devant eux de son propre chef, chaque parti a jugé le travail accompli par l'équipe gouvernementale selon sa propre sensibilité.
Pour Me Koffigoh, ancien Premier ministre, unique représentant de la Convention de forces nouvelles (CFN), proche de la mouvance présidentielle, il reste pour le gouvernement beaucoup de choses à faire sur le plan politique. Sur le plan économique, il s'étonne, avec un certain humour, que "malgré que la courbe de croissance du Togo soit plus élevée que celle des pays industrialisés, en réalité nous soyons plus pauvres qu'eux..."
Pour l'Union togolaise pour la démocratie (UTD), de l'ancien Premier ministre Edem Kodjo, le gouvernement doit mettre plus l'accent sur la formation technique et l'initiative privée. Elle a déploré "l'inflation galopante" et la privatisation de certaines sociétés publiques.
Quant au Comité d'action pour le renouveau (CAR), il se réjouit que le Premier ministre soit de son avis en ne dissociant pas l'économie de la politique: "Il n'y a pas un temps pour la politique et un temps pour l'économie", a souligné M. Aidam. Il a demandé au Premier ministre de faire de son mieux pour que les institutions mises en place fonctionnent efficacement. "L'élément politique majeur à stigmatiser auprès des Togolais", a-t-il poursuivi, "c'est qu'il faut oeuvrer en sorte que les rancoeurs se taisent". Enfin, le CAR exhorte le gouvernement à s'efforcer davantage pour que les prochaines consultations électorales se déroulent dans la transparence, dans la liberté et dans la paix, norme majeure de toute démocratie. "Nous avons accepté un modèle universel de dictature en Afrique; il n'y a pas de raison que nous ne nous accrochions pas au modèle universel de démocratie", a conclut le CAR.
La majorité parlementaire, représentée par le Rassemblement du peuple togolais (RPT), a de son côté rappelé au Premier ministre que "l'ajustement structurel ne règle pas tout...; c'est un moyen qui peut déstabiliser l'ensemble de ses efforts". Le RPT a par ailleurs souhaité que le Parlement soit associé au processus de privatisation des sociétés publiques en cours. "Car c'est un principe démocratique selon lequel l'aliénation des biens publics résulte d'une autorisation parlementaire régulièrement vérifiée". "C'est aussi un atout démocratique que la majorité parlementaire puisse critiquer l'action du gouvernement qu'elle a investi", s'exclame un observateur.
C'est un signe que la démocratie est en marche au Togo. Il est impérieux que les différentes sensibilités recherchent le consensus pour que les prochaines élections se déroulent avec transparence. Souhaitons que celles de 1993, émaillées de violences, ne seront que de vieux souvenirs pour une population qui n'aspire qu'à une vie paisible.
END
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