ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 342 - 16/03/1998

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Sénégal

Le sida en prison: une triple exclusion


by Alain Agboton, Sénégal, février 1998

THEME = SIDA

INTRODUCTION

Déjà "exclu des exclus",
le détenu atteint du sida subit de facto une triple exclusion
due à la pandémie qui, en Afrique, sévit plus qu'ailleurs.
Le prisonnier, plus que marginalisé,
vit dans des conditions de vie infra- humaines.

Une conférence internationale, la toute première en Afrique, organisée par l'Observatoire international des prisons (OIP) et ONU/SIDA, s'est penchée, du 16 au 18 février à Dakar, sur le sort des détenus séropositifs africains. Leur taux de prévalence, en raison des conditions de vie et notamment de la promiscuité qui règne dans ces "mouroirs", est largement supérieur à celui de la population générale.

Près de 200 chercheurs, experts dans le domaine de la santé, de la médecine, agents de l'administration pénitentiaire et représentants d'ONG venus d'une trentaine de pays, ont participé aux travaux. En prélude à cette manifestation, un Comité scientifique international, composé de sommités locales et étrangères, s'était déjà réuni les 7 et 8 janvier derniers, pour identifier et sérier les thèmes de réflexion.

Les organisateurs soulignent que, si le sida fait l'objet de divers programmes de lutte à l'intention de toutes les composantes de la société, les populations carcérales en ont été exclues. Or, même si les informations et les études sur le sida dans les prisons africaines sont rares et fragmentaires, elles confirment que les prisons africaines sont des foyers majeurs d'infection.

Autre élément de cette problématique, les "difficultés d'articulation" des missions sanitaires avec les lieux de détention, qui sont déplorables. Les détenus - groupe à risque s'il en est, en raison de la toxicomanie en prison, de l'absence de "séances intimes" avec les conjoints et de préservatifs dans l'espace carcéral - ne sont pas pris en charge par les services publics hospitaliers. De façon générale, l'hôpital et le corps médical désertent le milieu carcéral.

Les thèmes de la Conférence sont axés, selon les initiateurs, sur les aspects éthiques, socio-culturels et religieux, les aspects médicaux, le counselling et l'accompagnement des personnes vivant avec le VIH, les aspects juridiques relatifs à une politique pénale intégrant la variable VIH/SIDA et enfin l'IEC(Information- éducation-communication) en corrélation avec la prévention.

Cette rencontre de Dakar devra ainsi provoquer une prise de conscience "nette" du phénomène du sida en milieu carcéral, par toutes les parties intéressées et impliquées: personnel pénitentiaire, personnel de santé, programmes de lutte contre le sida et population carcérale. Un autre objectif est celui d'impliquer les autorités administratives, en vue d'une bonne gestion de ce problème et de la nécessité d'appliquer les directives de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) sur le sida dans les prisons.

Enfin, la conférence veut susciter une prise en compte "systématique et effective" de la population carcérale par les programmes nationaux de lutte contre le sida, et encourager des recherches plus nombreuses sur le sida dans le monde carcéral africain.

L'OMS a, en effet, édicté des directives dont les principes généraux affirment que tous les détenus ont le "droit" de recevoir, y compris à titre préventif, des soins semblables à ceux qui sont mis à la disposition de la communauté. Elle recommande également que, dans chaque pays, soient définies des "politiques spécifiques" pour la prévention du VIH/SIDA dans les prisons, et pour la prise en charge des détenus infectés, et que soient pris en compte les besoins des prisonniers atteints, dans la planification des programmes nationaux de lutte contre le sida. Et, qu'enfin, soit active, dans tout ce processus, la participation des ONG, des personnels et administrations pénitentiaires.

Au total, après avoir fait le point sur la situation générale du sida dans les prisons africaines,la conférence de Dakar devrait permettre d'établir une plate-forme d'action pour une politique de santé cohérente dans ce domaine, et étudier les moyens pour faciliter la coopération entre les structures sanitaires et pénitentiaires africaines.

END

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