ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 342 - 16/03/1998

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Zimbabwe

Vétérans de la guerre de libération


by Tendai Madinah, Zimbabwe, janvier 1998

THEME = JUSTICE

INTRODUCTION

Vers la fin de 1997, le gouvernement du président Robert Mugabe
s'est mis à croiser le fer avec ses alliés de toujours,
les vétérans de la guerre de libération,
créant ainsi une situation gênante.

Tout a commencé avec l'installation d'une Commission judiciaire d'enquête, présidée par le juge Godfrey Chidyausiku, au sujet du pillage, en huit mois, par des membres du gouvernement et des politiciens, du Fonds de compensation des victimes de guerre. Les anciens combattants étaient convaincus que cette Commission d'enquête avait été installée, en 1997, pour les harceler et, en même temps, pour protéger des politiciens et des membres du gouvernement.

Le 10 novembre 1997, les anciens combattants ont perturbé les audiences de la Commission. Au moment où leur président national, M. Chenjerai Hunzvi, montrait des preuves concernant les allégations selon lesquelles il avait aidé des parents (dont son père de 77 ans) à obtenir des compensations, grâce à de faux certificats médicaux, les vétérans se sont lancés dans une série de quintes de toux exagérées.

Poussé par cette réaction, le juge Chidyausiku ajourna les audiences. Les vétérans ont alors commencé à chanter et à danser, tout en dénonçant la Commission, des membres du bureau des vétérans de la guerre, le ministre de l'Intérieur Dumiso Dabengwa et le général à la retraite Tapfumanei Mujuri. Les manifestants portaient des pancartes avec des inscriptions telles que: "Z$ 50.000, aujourd'hui; sinon, la guerre!"

Les Zimbabwéens sont inquiets et craignent qu'il ne s'agisse là d'une importante tentative de dissimulation par les autorités.

Points de vue

Gabriel Shumba, président de l'Union des étudiants de l'université du Zimbabwe, s'exprime ainsi: "Nous sommes d'accord que M. Hunzvi pourrait devoir répondre d'une accusation; mais nous sommes inquiets devant le nombre grandissant de ceux qui essaient d'étouffer d'énormes combines. Tant que les gros poissons ne seront pas, eux aussi, interpellés publiquement et interrogés de manière approfondie, la dite Commission restera une comédie".

Reginald Matchaba-Hove, président de ZIMRIGHTS, organisation pour les droits de l'homme, affirme que la Commission donne l'impression de poursuivre des cibles de moindre importance, et d'aborder avec ménagement les gros requins.

John Makumbe, expert en science politique à l'université de Zimbabwe, estime que les vétérans ont raison de dire que la Commission ne sert à rien. En décidant en effet de verser une prime de Z$ 50.000 aux anciens combattants de la liberté, le gouvernement est passé au-dessus de la tête de la Commission. Et il ajoute: "Si quelqu'un comme Hunzvi n'a reçu que Z$ 12.000, et si d'autres ont reçu 8 fois ce montant et sont actuellement au Canada, alors il y a un problème". M. Makumbe fait allusion à Reward Marufu, qui a illégalement réclamé Z$ 800.000 et obtenu un poste de diplomate au Canada.

Selon Alois Masepa, de l'opposition, secrétaire général du Front populaire pour la démocratie, la Commission d'enquête est un truc politique du ZANU-PF au pouvoir, destiné à lui donner l'occasion de jouer à la transparence du gouvernement. Le fait que l'objectif dernier de la Commission est, non de révéler la vérité, mais de l'étouffer, en dit long. Cela nous invite à jeter un regard sur certains membres de la Commission.

Membres de la Commission

Le président de la Commission, le juge Chidyausiku, est membre du ZANU-PF, et il a été député désigné au Parlement, jusqu'à sa nomination comme juge à la Haute Cour. Gula-Ndebele est aussi militant du ZANU-PF et, jusqu'il y a peu, il travaillait au très puissant Bureau des adjudications. De plus, il émarge au Fonds des victimes de guerre et il faudrait examiner de près sa requête! L'évêque Peter Hatendi est membre depuis fort longtemps de la Commission de supervision des élections, tellement critiquée. Il a été nommé à cette place par le président Mugabe. Les organisations des citoyens et l'opposition, qui s'appuie sur une large base, considèrent la Commission de supervision des élections comme le bras du parti au pouvoir. Implicitement, on estime que l'évêque est ami et sympathisant du parti au pouvoir. D'autres membres de la Commission ont été, selon Masepe, nommés à la Commission d'enquête pour l'équilibrer au point de vue de la race et du sexe.

Le financement

A la suite des manifestations de l'an dernier, le président Mugabe consentit à verser une prime de Z$ 50.000 à tous les anciens combattants et une pension mensuelle de Z$ 2.000 tous les mois, à partir du 1er janvier 1998. Cet accord conclu dans la hâte engage le gouvernement dans une dépense de Z$ 5,7 milliards pour la première année d'application de l'accord, ce qui mettrait l'économie du pays dans la pagaille la plus complète. Dieu sait combien cela coûtera à l'avenir!

Le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale ont immédiatement réagi. Pour apaiser la situation, le ministre des Finances du Zimbabwe, Herbert Murorwa, a annoncé à la mi-novembre qu'il entamait des coupes radicales dans les frais généraux afin d'avoir les fonds nécessaires pour les vétérans. Il niait que le déficit dépasserait les objectifs officiels du gouvernement, et il ajoutait qu'il mettait son espoir dans des mesures générant des recettes que son ministère était en train de préparer.

Le président Mugabe a fait savoir que les anciens combattants de la liberté ne seront pas les seuls à comparaître devant la Commission d'enquête Chidyausiku. Et il a insisté sur le fait que la Commission n'a pas été créée pour harceler les vétérans, mais pour fournir au gouvernement un rapport qui lui permettra de déterminer ce qu'il faut faire par la suite.

END

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