ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 344 - 15/04/1998

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Malawi

Les musiciens en reviennent à leurs racines


by Patrick Mwanza, Malawi, janvier 1998

THEME = CULTURE

INTRODUCTION

Les musiciens malawiens ont atteint la majorité
et ont découvert leur propre style

Des musiciens malawiens ont retravaillé les chants traditionnels que l'on chantait à l'occasion des mariages et des cérémonies d'initiation des garçons et des filles et ils sont arrivés à produire des "hits".

"Ce que nous jouons maintenant est une musique enracinée dans nos propres traditions. Nos ancêtres ont créé cette musique, et elle nous appartient", dit Emmanuel Manda, chef de Love Aquarius, un groupe à succès de Blantyre.

Depuis plus de vingt ans, les groupes malawiens se battent pour trouver leur style propre. Ou bien ils jouaient tout simplement la rumba ou du reggae, dont les gens disaient que c'était étranger à leur culture. Et quand ils jouaient ce type de musique, ils copiaient généralement des autres. Alors, pourquoi ce changement aujourd'hui?

Musique malawienne authentique

Manda est membre d'une association de musiciens. "En 1995, nous avons assisté à un atelier musical au Zimbabwe. Nous avons découvert que les Zimbabwéens jouaient leur propre type de musique. Les Zambiens aussi. On écoutait une chanson, et on pouvait dire que c'était sud-africain. Quand on nous a demandé de jouer notre musique, nous n'avons pas pu. Il fallait que nous trouvions quelque chose".

Les racines de la nouvelle musique se trouvent dans les danses traditionnelles comme le Ngoma, une danse de guerre, ou le Mganda, le Mwinoghe, le Manganje et le Beni, que l'on exécute après la moisson ou aux mariages.

Les musiciens écrivaient des chansons parlant du couple et de l'amour; ils ont fait un pas en avant, et composent des chansons qui traitent du sida. D'autres chansons sont politiques, elles invitent les autorités à apporter une solution à la vie chère, au chômage, à la corruption et à la criminalité.

Les adolescents de la ville avalent la culture occidentale. Maintenant ils ont l'occasion d'écouter de la "nouvelle musique". Dans leurs fêtes, des jeunes gens sophistiqués, à la coiffure fantaisiste, avec des casquettes de base-ball devant derrière, des tee-shirts de marque, des pantalons à mi-mollet et des bottes, dansent sur cette musique. Il n'y a pas si longtemps, seul un rustaud campagnard écoutait ce genre de musique.

Mwiza Ndovi est un fan de musique. Il constate que les musiciens malawiens qui aimaient copier les autres pays, ont finalement compris que leur propre musique est la meilleure.

Selon Funsani Malikebu, la demande pour la musique malawienne est très forte. Le retour des orchestres aux racines du Malawi rappelle les années '70, lorsque l'orchestre de la Radio du Malawi composait et jouait ce que beaucoup estimaient être de la musique malawienne authentique.

Patrick Simakwell, dans le monde des affaires musicales depuis 1973, dit que la musique étrangère coûtait moins cher, ce qui écartait beaucoup de musiciens.

L'avenir incertain des musiciens n'encourageait pas les jeunes espoirs à s'engager dans le monde de la musique. Des gens comme Eddie Mwakamo qui jouait dans l'orchestre de son école et avait songé à faire carrière dans la musique, a rapidement changé d'avis: "Il n'y a pas d'argent à gagner dans la musique et je devais faire autre chose", et il est devenu un homme d'affaires.

Exportation des talents

L'exploitation a déçu plusieurs musiciens parmi les plus talentueux du Malawi. Certains ont abandonné la musique pour s'orienter vers ce qui pourrait mieux leur assurer le pain quotidien, ou bien ils ont quitté le pays.

On avait Maria Chidzanja Nkhoma qui, pour son talent, a été comparée à Myriam Makeba, la célèbre chanteuse sud-africaine. Elle chantait à la radio du Malawi; elle l'a quittée pour travailler à la Compagnie de radiodiffusion sud-africaine, où elle est toujours. Sidney Banda est actuellement un des meilleurs musiciens de jazz aux Etats-Unis. Il a joué lors de l'investiture du président Clinton en 1992. Chris Kandoje est allé en Afrique du Sud où il joue avec la vedette du reggae, Lucky Dube. Ceux qui sont restés au pays et jouent de la folk-music ne sont arrivés nulle part. Le Dr Daniel Kachamba, un génie musical qui jouait d'une guitare à 12 cordes, est mort pauvre en 1989. Il avait été nommé docteur honoris causa en musique à l'occasion d'un concours en Autriche. Il y a encore Allan Namoko, ce musicien aveugle qui jouait du banjo: il est allé jusqu'en Finlande.

Piraterie

Et puis il y a la question des droits d'auteur. On a essayé de réprimer la piraterie effrénée qui règne au Malawi. L'année passée, la Société des droits d'auteurs du Malawi, des musiciens et des policiers sont descendus dans les magasins de disques et confisqué des milliers de disques pirates qui, plus tard, ont été brûlés au festival de musique de Blantyre.

Manda estime qu'il faudrait faire plus pour protéger les musiciens du Malawi même. Les musiciens souhaiteraient que le gouvernement contrôle la quantité de musique étrangère diffusée par la radiodiffusion du Malawi. Mais tout le monde n'est pas d'accord sur ce point. Le Malawi sort à peine d'une période de dures lois de censure, où l'Etat contrôlait tout ce que les gens pouvaient voir, entendre ou lire. En rejetant le système à parti unique qui a duré 30 ans, les Malawiens ont fait entendre qu'ils ne voulaient plus être régentés. Ils ont voté pour avoir le droit de recevoir l'information sans entraves.

Laissons à Emmanuel Manda la remarque finale: "Nous avons ici une musique magnifique. Nous avons des tas de talents. Un peu de soutien nous ferait du bien."

END

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