ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 347 - 01/06/1998

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Togo

Beaucoup de prétendants pour un fauteuil


by Pascal Dotchevi, Togo, mai 1998

THEME = POLITIQUE

INTRODUCTION

Contrairement aux précédentes présidentielles de 1993, boycottées par l'opposition,
celles de juin prochain s'annoncent serrées, avec cinq candidats de l'opposition
contre le président sortant Eyadéma, au pouvoir depuis 1967.

Initialement prévues le 7 juin pour le premier tour et le 21 juin pour le second tour, les élections présidentielles au Togo auront finalement lieu avec une semaine de retard, soit les 14 et 28 juin 1998. Telle a été la décision de la Cour constitutionnelle consultée par le premier ministre pour départager son gouvernement et l'opposition qui jugeait les dates non conformes à la Constitution.

Les révisions des listes électorales organisées par le gouvernement, en février dernier, se sont déroulées dans l'indifférence et la confusion totales. L'opposition dans son ensemble conteste toujours la fiabilité de ces listes et réclame carrément la reprise de ces opérations de révision. D'autant plus que la Commission électorale nationale (CEN), organe de contrôle de ces révisions, a reconnu que la participation à ces révisions a été faible, notamment de la part des jeunes, alors que ce sont eux qui composent en majorité le corps électoral.

Cette situation s'explique par un manque de sensibilisation par les pouvoirs publics et les partis politiques. Les partis de l'opposition ont écrit au ministre de l'Intérieur pour sensibiliser la population sur l'importance de ces révisions, mais ils ont essuyé un refus cuisant de la part du ministre, qui a interdit toute manifestation politique pendant ces périodes. Dans son rapport de synthèse, la CEN a promis de trouver, en accord avec le gouvernement, des solutions concrètes à ces problèmes. Mais à quelques jours du scrutin, les problèmes demeurent.

De plus, d'autres soucis viennent s'y greffer pour l'opposition. En effet, elle ne sait pas jusqu'à présent le type de bulletin qui sera utilisé pendant ces élections. Elle souhaitait un bulletin unique qui limiterait les fraudes, alors que le gouvernement soutient l'usage des bulletins multiples, parce que moins compliqué pour les populations en majorité illettrées.

Comme si cela ne suffisait pas pour diviser la classe politique togolaise, le gouvernement vient d'adopter, en son conseil des ministres du 30 avril dernier, un décret portant la caution, que les candidats aux présidentielles doivent verser au trésor public, de 10 à 20 millions de francs CFA ( 200.000 FF). Certains partis de l'opposition qualifient cette décision de "manoeuvres du pouvoir visant à écarter certains de la course", d'autant plus qu'à 45 jours du scrutin rien ne justifiait cette "surenchère". "Si on n'a pas vingt millions, et qu'on veut devenir président de la République, c'est plutôt difficile", commente un membre influent de la sensibilité présidentielle. Malgré cela, les candidatures à la présidence foisonnent partout.

Une opposition dispersée

Depuis les dernières élections, il y avait certes des problèmes de leadership et d'intérêts personnels entre les partis de l'opposition. Mais l'on espérait qu'ils pourraient s'entendre avant ces présidentielles, capitales pour le pays.

L'espoir de cette entente a été brisé le 14 mars, lorsque, au terme de sa convention, la Convention démocratique des peuples africains (CDPA) désigna le prof. Léopold Gnininvi comme son candidat au fauteuil présidentiel. Sa candidature a surpris, car il était le farouche défenseur du slogan bien connu au Togo depuis 1993: "Démocratie d'abord, multipartisme ensuite". L.Gnininvi se défend en déclarant que son parti a pris ses responsabilités après avoir réalisé que l'union de l'opposition n'était plus possible.

Il s'est fait rattraper par le Rassemblement du peuple togolais (RPT), qui a investi son président, le général Gnassingbé Eyadéma, au pouvoir depuis plus de 30 ans. Quelques semaines plus tard, ce fut au tour de Me Aboyibor, du principal parti de l'opposition, le Comité d'action pour le renouveau (CAR), de se positionner pour le fauteuil présidentiel.

Le 27 avril, date anniversaire de l'indépendance du pays, Gilchrist Olympio, fils du tout premier président togolais Sylvanus Olympio, assassiné le 13 janvier 1967 par Eyadéma, revient au bercail après six années d'absence. Il était parti, en effet, le 5 mai 1993, suite à un attentat dans une localité au nord pays. Un de ses bras droits, le Dr Marc Atidépé, y avait perdu la vie. "Je suis content de revenir au pays... et j'espère que cette fois ce sera la bonne", a-t-il lancé dès son arrivée. Des milliers de Togolais se sont déplacés à la frontière avec le Ghana pour l'accueillir. Le même jour il accepte sa candidature sous les couleurs de son parti, l'Union des forces du changement (UFC). "Le propriétaire est arrivé, le locataire doit partir", scandaient ses partisans, en faisant allusion au général Eyadéma. M. Olympio reste en effet le challenger le plus sérieux du président sortant. Les deux hommes ne se sont jamais rencontrés. "(Eyadéma), je ne le connais pas", répète souvent M. Olympio. Selon certains observateurs, ces élections risquent de se polariser entre ces deux hommes, malgré la floraison de candidatures.

On ne l'attendait plus cette année, mais il a décidé de revenir. Il s'agit de Jacques Amouzou, qui s'était présenté en indépendant "contre" Eyadéma, en 1993, et a recueilli moins de 2% des suffrages exprimés. Cette fois, il est revenu sous la bannière du parti qu'il vient de créer, l'Union des libéraux indépendants (ULI).

Enfin, une nouvelle candidature de l'opposition vient d'être annoncée: celle de Zarifou Ayéva, du Parti des démocrates pour la République (PDR). En tout donc, pour l'opposition, cinq candidatures pour le même fauteuil. Ce qui fait dire à certains que l'opposition risque de se battre elle-même, si elle n'arrive pas à recentrer ses forces. Tout compte fait, beaucoup pensent que ces élections, qui peuvent sonner le glas pour le Togo si cela capotait, ne seront plus comme celles de 1993. Mais, pour le commun des Togolais, que peuvent bien apporter de nouveau ces batailles de politiques ?

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