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by Joseph Seydou Allakaye, Niger, avril 1998
THEME = VIE SOCIALE
Une idée originale et enivrante
dans un pays aux ressources touristiques insoupçonnées
Pays de transition entre l'Afrique arabe et l'Afrique noire, le Niger abrite des ressources touristiques jusqu'ici insoupçonnées. Il est donc temps, au moment où le monde devient unitaire, de jeter un coup d'oeil sur les pittoresques paysages, tantôt immenses et âcres, tantôt verdoyants de ce pays.
Du coup, l'organisation d'un défilé de mode s'avère une idée passionnante, enrichissante, originale et enivrante. L'objectif premier d'un tel projet est de mettre face à face et en parallèle, la mode africaine et européenne. Pour réussir cette osmose entre les collections de ces deux continents, un défilé de classe internationale haut en couleurs et en fastes sera organisé en principe du 11 au 13 septembre 1998.
L'homme qui est à l'origine du Festival international de la mode africaine au Niger (FIMA), s'appelle Alphadi, couturier nigérien et président de la fédération africaine des créateurs de mode. Enfant du désert, il est aujourd'hui l'un des stylistes les plus connus du continent africain. Il parcourt le monde avec sa gentillesse et avec, dans ses valises, les dernières inventions composées avec toutes les matières d'Afrique: cuir, argent, bronze et broderie se mêlent dans les tissages de coton brut et de lin.
La mort de Chris Seydou (couturier malien bien connu), son compagnon et frère, lui a conféré des responsabilités pour porter les couleurs de l'Afrique dans le domaine de la couture. Depuis quatre ans, en tant que membre fondateur et président de la Fédération des créateurs africains, Alphadi oeuvre pour sensibiliser les financiers et décideurs africains sur l'importance de ce secteur, du point de vue du développement économique, social et culturel.
Ce que d'aucuns considèrent comme un rêve, celui d'Alphadi n'est pas une utopie, mais bien un rêve devenu réalité. Cela grâce à l'appui du président Maïnassara Baré et du ministre du Tourisme et de l'artisanat, et grâce à l'efficacité des organisateurs, mais surtout grâce à la beauté de la mode africaine. Un projet qui peut s'ouvrir au-delà de l'Europe et de l'Afrique de l'Ouest et trouver son plein épanouissement dans la rencontre avec d'autres créateurs, d'autres pays tels que le Japon, les Etats-Unis, la Russie.
Selon Alphadi, la culture, l'art et la mode peuvent aider au développement du continent africain. Notre continent peut trouver une nouvelle voie de développement à travers les différentes formes de création que sont la danse, la musique et la mode. L'industrie de la mode apporte des millions de dollars aux pays développés. Pourquoi pas en Afrique? Ce premier grand rendez-vous de la mode africaine dans le merveilleux désert du Ténéré nigérien, sur un site de toute beauté, sera un bel exemple de cette Afrique unie, créative..., de cette Afrique attractive, de cette Afrique qui marche...
Cela fera bientôt dix ans qu'Alphadi nourrissait ce rêve. Les milieux bien informés de la mode estiment à trois milliards de fcfa le coût financier d'une telle opération. Mais l'initiateur du festival pense que les besoins ne dépasseront pas le milliard. Selon Alphadi, le financement est pratiquement acquis. Reste maintenant l'épineux problème de la sécurité, le Ténéré étant un désert où persiste encore une insécurité résiduelle malgré la signature de l'accord de paix avec la rébellion le 24 avril 1995. Malgré tout, le gouvernement nigérien a donné de fermes garanties quant à la sécurité de tous les participants.
Le festival international de la mode africaine au Niger sera une grande rencontre d'échanges culturels dont le décor pour la première édition sera le désert de l'Aïr-Ténéré. Ce grand rendez-vous de la mode africaine aura lieu tous les deux ans sur le continent. Stylistes créateurs, musiciens, chanteurs, artisans et opérateurs économiques se rencontreront pendant trois jours. Le point d'orgue de ce festival sera un grand show-défilé de mode auquel prendront part une vingtaine de chanteurs africains de renommée internationale et une trentaine de créateurs.
Les objectifs essentiels sont d'offrir aux créateurs et stylistes africains un cadre d'expression, de promotion et d'échanges avec leurs homologues venus d'autres continents. Etablir également un dialogue inter-culturel entre le continent africain et l'Occident et valoriser l'image de la mode africaine. Diffuser des messages de paix et d'espoir. Insister sur les immenses potentialités du continent et sur le formidable dynamisme de certains de ces créateurs. Création d'une fondation pour la lutte contre la progression du sida et pour l'aide à l'insertion des jeunes en difficulté.
Le lieu où se déroulera cet événement est Agadez-Tiguidit. Un village du désert sera reconstitué sur place. En effet, le soir, du sommet des collines d'Agadez et Tiguidit la nature offre au regard du voyageur un spectacle émouvant de pierres et de verts arbustes; un vent frais souffle légèrement et le murmure des gravillons qu'il caresse, parvient telle une berceuse à l'oreille sensible. Le lieu du défilé sera visible de très loin. Il faut que le rêve d'Alphadi soit pour cette nuit l'"Oasis de la mode" dans le désert. Ce village du désert qui est en fait un village nomade, construit entièrement en tentes des différents pays ayant en commun le désert, reflétera l'art et les différentes cultures du désert (artisanat, habitat, art culinaire, musique, etc....).
Le festival sera animé trois jours durant par des groupes d'artistes venant des quatre coins du Niger (sédentaires et nomades), composés d'Arabes, Haoussas, Gourmantchés, Kanouris, Zarmas, Peuls, Songhaïs, Touaregs et Toubous. Un opéra du désert mettra en scène une vingtaine de musiciens africains mondialement connus. Chacun des chanteurs exprimera dans sa langue un message de paix et d'espoir, qu'ils reprendront en choeur. L'opéra sera dirigé par le célèbre chanteur sénégalais Youssou N'Dour. Ont déjà confirmé leur participation: Aicha Koné, Nayanka Bell, Meiway, Manu Dibango, Na Awa Doumbia et Oumou Sangaré.
Pour le défilé, une trentaine de créateurs seront retenus: six Européens, vingt Africains, deux Américains, un Japonais et un Chinois. Le festival permettra par ailleurs aux opérateurs économiques africains et occidentaux de rencontrer les créateurs, les artistes, des décideurs politiques et des financiers au cours d'ateliers et de colloques. Les visiteurs et spectateurs qui feront le déplacement, verront leur séjour agrémenté par des visites de sites touristiques du désert et de la ville d'Agadez et en particulier le site du patrimoine mondial de l'Aïr- Ténéré.
En fin de compte, l'essentiel sera de porter l'art à son sommet et de laisser aux invités le souvenir d'une soirée inoubliable. Un livre, une vidéo et un CD seront réalisés pour garder à jamais cette mémorable soirée où l'on verra évoluer soixante mannequins féminins (Européennes, Africaines, Asiatiques), dix mannequins masculins et vingt-cinq danseurs et danseuses.
Au volet des parrainages et soutiens, notons que le festival a reçu le soutien prestigieux des présidents algérien, malien, sénégalais, nigérien, ivoirien et gabonais; du directeur général de l'UNESCO, de l'ACCT, du président de la fédération française de couture du prêt- à-porter, des couturiers et des créateurs de mode, ainsi que de nombreux sponsors et partenaires tels Air-Afrique, la coopération chinoise, la coopération française et la CEE. Autant de personnes et d'institutions qui sont convaincues qu'il n'y a rien d'insolite à organiser un défilé de mode en plein désert.
Faire se rencontrer l'Afrique, l'Europe, l'Amérique et le reste du monde est un rêve qui entre dans la logique des choses, lorsqu'on est nationaliste et artiste, lorsqu'on a une griffe internationalement respectée, lorsqu'on a un vaste réseau de relations, et lorsqu'on s'appelle Alphadi. Par ce rêve, le Niger tout entier se sent concerné, honoré de pouvoir accueillir un monde aussi sélectif, qui vient séjourner sur son sol, avec pour seule motivation la recherche d'une plus grande convivialité entre les hommes et entre les nations.
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