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by Sarah Tanou, Burkina-Faso, juillet 1998
THEME = ORGAN. INTERN.
Le président burkinabè, M. Blaise Compaoré,
a succédé à M. Robert Mugabe, président du Zimbabwe,
aux commandes de l'Organisation de l'unité africaine (OUA),
lors du 34e sommet qui s'est tenu à Ouagadougou du 8 au 10 juin dernier.
Ce sommet, marqué par des événements imprévus,
a voulu marquer un tournant décisif dans la vie de l'organisation.
Le peuple burkinabè et son gouvernement ont été très honorés de la tenue du 34e sommet de l'OUA à Ouagadougou, sur la "terre des hommes intègres". C'est ce qui ressort des mots de bienvenue du président Blaise Compaoré à l'endroit de ses pairs et des délégués au sommet de l'OUA: "Les Burkinabè ont accueilli la décision de l'OUA de tenir son 34e sommet à Ouagadougou comme une marque de confiance et d'amitié de leurs frères africains."
Dans ce même discours, le président faisait remarquer qu'"au cours de ces dernières années, on a beaucoup parlé de la marginalisation de l'Afrique sur la scène mondiale" et qu'il souhaitait que "ce sommet de Ouagadougou contribue à renforcer notre engagement à bâtir une Afrique plus unie et plus forte." En organisant ce sommet, le Burkina voulait en effet apporter un changement à l'organisation.
Après 35 ans d'existence, à l'orée du 21e siècle, l'OUA devait apporter aux Africains une nouvelle vie de cohésion faite d'actions concrètes, et devait leur donner des réponses adéquates aux nombreux défis qui interpellent le continent. Le président l'a souligné: "Si les frères fondateurs ont laissé un héritage inappréciable, la situation actuelle du monde et de l'Afrique exige une révision de la Charte de l'Organisation de l'unité africaine; cette mutation indispensable impose à l'Afrique et à l'OUA des ajustements et une rationalisation de leurs méthodes d'opération. Cela devra se traduire par la restructuration du secrétariat général de l'organisation pour adapter ce levier d'unité au nouveau contexte de la mondialisation. En outre, l'OUA devra adopter une nouvelle vision sur les questions de développement économique et social et opter pour les meilleures solutions en vue d'assurer au continent la paix, la stabilité, la sécurité, bref l'environnement indispensable à un développement humain durable".
Deux mois avant l'ouverture du sommet, le président Compaoré a pris son bâton de pèlerin pour se rendre chez tous ses pairs et les inviter à venir à Ouagadougou afin qu'ensemble ils décident de l'avenir de leur continent, qui ne veut plus accepter la marginalisation à laquelle il est confronté.
La participation à ce 34e sommet a constitué un record. Vingt-huit chefs d'Etat ou de gouvernement, plus la République démocratique arabe sahraouie (RASD), se sont retrouvés à Ouagadougou du 8 au 10 juin. Malgré le décès brutal du président Abacha, du Nigeria, qui a fait peser une atmosphère lourde sur le sommet, le Burkina a réussi sa tâche africaine. L'arrivée de Nelson Mandela (qui, dans son dernier mandat présidentiel, a tenu à venir dire au revoir à ses pairs), et le nombre record de chefs d'Etat, lui ont donné un cachet particulier.
Le major Buyoya, du Burundi, et Yasser Arafat, le président palestinien, ont mis à profit cette tribune pour se faire entendre. Le premier, pour parler de l'embargo sous lequel ploie son pays et qui ne cesse de faire des victimes; dans cette situation, en effet, l'appui de ses pairs lui est plus que nécessaire pour "tenir le coup". Le second, dont le parcours politique est lié à l'Afrique, entendait renforcer la sympathie des Africains à la cause du peuple palestinien et, pourquoi pas, arracher un soutien ferme contre les positions israéliennes qui remettent en cause les accords d'Oslo. Le conflit entre l'Ethiopie et l'Erythrée a aussi tenu la vedette au sommet.
Le sommet de Ouagadougou se voulait un sommet de réflexion et de décisions, où les discussions et les prises de position l'emportent sur les discours-fleuves vides de contenu. Un thème a été soumis à la réflexion: "Etre Africain au 21e siècle".
Force a été de constater que la place qu'occupe l'Afrique dans le concert des nations n'est guère reluisante. L'Afrique reste le continent qui n'a pas réussi à amorcer son décollage économique; c'est aussi le continent le plus mal gouverné par manque de démocratie; le continent des guerres tribales et fratricides, des conflits et des génocides; le continent de la misère et du sous-développement. Les exemples illustrant ce triste tableau ne manquent pas. L'Africain du 21e siècle est parti pour être un homme malheureux.
Et pourtant, si triste soit le constat, si grand le défi à relever, les Africains restent convaincus de la possibilité de travailler à atténuer cette "fatalité". Ils comprennent que, désormais, le succès se trouve dans l'action poursuivie, la persévérance dans l'effort et dans le culte du travail.
Beaucoup d'atouts sont entre leurs mains: l'Afrique est un continent riche: ressources du sous-sol, minerais à ciel- ouvert et main-d'oeuvre abondante et bon marché (par exemple, le sous-sol de la Rép.dém. du Congo, riche de tous les minerais...). Le continent peut se prendre en charge, s'assumer sans apport extérieur. L'aboutissement des efforts repose sur l'éducation et la formation, gages de la qualification des ressources humaines.
Il ne serait pas pardonnable qu'au 21e siècle, l'Afrique demande encore, outre une aide au développement, des hommes d'ailleurs pour l'aider à mettre en chantier certains projets de développement. Le 21e siècle sera le siècle de l'espoir, de la prospérité économique, de la bonne gouvernance et de la culture démocratique pour l'Afrique, parce qu'elle aura pu prendre en mains son propre développement.
Pour répondre à son objectif de renouveau, le 34e sommet de l'OUA a dû opérer des changements et remanier certains textes, notamment ceux de la Charte de l'OUA ne répondant plus aux situations actuelles. Des questions concrètes ont été débattues, et plusieurs ont trouvé un commencement de solution, comme par exemple la création d'une Cour africaine des droits de l'homme et des peuples. Dans la même ligne, on peut citer la décision de la levée unilatérale de l'embargo aérien qui frappe la Libye (pour des raisons humanitaires, religieuses, etc.); et aussi la levée de l'embargo économique contre le Burundi, à condition que les parties en conflit se retrouvent pour négocier et trouver une issue favorable au cours de ce sommet.
D'autres questions, qui n'ont pas trouvé l'adhésion de tous les chefs d'Etat, devront être rediscutées par les ministres des Affaires étrangères en février 1999. C'est notamment le cas du retrait de la République arabe sahraouie démocratique, et le retour du Maroc dans l'organisation continentale. Sont aussi restées en suspens des questions comme celle d'un groupe devant enquêter sur le génocide au Rwanda. Quatre ans après ces événements malheureux, on constate que rien de concret n'a été fait.
Malgré ces quelques réserves, on peut dire que le sommet de Ouagadougou a marqué un tournant décisif dans la vie de l'organisation continentale. Les points essentiels se sont focalisés sur les problèmes économiques. Un accent particulier a été placé sur l'urgence d'une intégration sous- régionale renforcée car, pris individuellement, les Etats africains sont très fragiles. L'ouverture vers les autres est indispensable pour sortir de la marginalisation.
Certains secteurs primordiaux de cette intégration doivent être développés: les transports, les communications et les télécommunications. Une exposition sur les nouvelles techniques de la communication et de l'information accompagnait le sommet. Pour la stabilité du continent, la nécessité d'une sécurité au sein de chaque pays s'est fait sentir; pour les chefs d'Etat, ce sujet est d'une importance capitale et appelle à une bonne gestion, à une bonne gouvernance.
La promptitude mise à exécuter certaines décisions a couronné ce 34e sommet de l'OUA; ainsi l'envoi d'émissaires en Ethiopie et en Erythrée. Une mission conduite par le nouveau président de l'OUA, Blaise Compaoré, son secrétaire général, M. Salim Ahmed Salim et d'autres personnalités.
Un long chemin reste à parcourir encore! Mais, "malgré les divisions apparentes et les nombreux débats, l'OUA a peu à peu bâti l'unité de l'Afrique", constatait le doyen des chefs d'Etat africains, Nelson Mandela.
L'histoire de l'Afrique témoigne qu'il en est bien ainsi, mais certains domaines restent à la traîne: les processus démocratiques sont en déclin dans plusieurs pays. Les dérives démocratiques mènent à des bains de sang. De 1960 à nos jours, le continent africain a connu plus d'une trentaine de conflits avec leur cortège de malheurs, des millions de morts, des millions de réfugiés. Or, les textes fondamentaux ne donnent aucun pouvoir d'intervention à l'OUA dans les conflits qui éclatent chaque jour en Afrique.
Aujourd'hui, il est grand temps pour les Africains d'asseoir un cadre viable et opérationnel pour la prévention, l'endiguement et le règlement des dits conflits, pour le renforcement de la coopération, de l'intégration et du développement. L'OUA doit encourager toutes les démocraties et aider les Africains à atteindre la maturité démocratique.
Rendez-vous à Alger en 1999.
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