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by Augustine Deke, Zimbabwe, octobre 1998
THEME = SIDA
Au Zimbabwe, plus que jamais, le fléau
du sida fait peur.
Un sentiment d'impuissance domine.
Le Zimbabwe a une population de 12 millions d'habitants. Les statistiques révèlent que 1,5 million sont séropositifs et que 350.00 ont le sida avéré. Parmi les personnes infectées, 60% sont des adultes et environ 15% des enfants. Si rien n'est fait pour contrôler l'hécatombe dans les années à venir, la durée moyenne de vie pourrait être réduite à environ 45 ans.
Depuis son indépendance en 1980, le Zimbabwe a subi pas mal de désastres, causés par la nature ou par l'homme, mais aucun n'est à comparer avec le sida. Le Dr Mhloyi, directeur des Etudes de population à l'université du Zimbabwe, ne comprend pas les raisons qui poussent le gouvernement à déclarer un événement "désastre national".
Lors d'un atelier organisé à Harare en juillet 1998, elle déclara: "Quand il y a un accident d'autobus avec 40 morts ou plus, ce qui n'arrive pas souvent, il est déclaré "désastre national". Or nous avons ici une maladie qui tue au moins 70 personnes chaque semaine (estimation bien en-dessous de la réalité, beaucoup de décès n'étant pas enregistrés), et pourtant cela n'est pas déclaré "désastre national"!".
En l'an 2000, on s'attend à ce que l,8 million de personnes soient infectées, et plus de 600.000 enfants devenus orphelins. C'est en effet un désastre national en préparation!
Depuis que le sida a commencé à se propager à travers le pays, 26 groupes se sont formés pour venir en aide aux victimes. Ces groupes reçoivent de l'aide venant de 19 organisations donatrices.
Mais lorsqu'il s'agit de soins médicaux généraux, il faut souligner qu'on compte 7.692 personnes par médecin et 1.639 par infirmière. Les soins hospitaliers sont à deux doigts de l'effondrement. Qu'est-il donc arrivé? En 1996, beaucoup de jeunes docteurs et infirmières s'étaient mis en grève pour réclamer des meilleures conditions de travail: ils furent licenciés. Depuis lors, les hôpitaux manquent de personnel. L' année d'après, 230 infirmières démissionnèrent de leur emploi au ministère de la Santé, laissant un total de 2.000 places vides dans le pays.
Les Eglises, les syndicats et les guérisseurs traditionnels sont divisés sur la façon de combattre le sida.
Les Eglises - Le Conseil des Eglises du Zimbabwe (ZCC) dispose d'une personne à plein temps qui coordonne un programme d'éducation sur le sida, en commun avec d'autres Eglises et communautés. Le ZCC publie aussi plusieurs revues d'information sur le sida. Mais les Eglises ne parviennent pas à s'entendre sur la question du préservatif pour des relations sans risque. Certains membres de l'Eglise affirment que les condoms encouragent la promiscuité, qui est contraire à l'enseignement de la Bible.
Les guérisseurs traditionnels - L'Association nationale des guérisseurs traditionnels du Zimbabwe (ZINATHA) dispose d'un budget annuel de 1,25 million de dollars zimbabwéens (ZWD) pour soigner les sidéens. Mais des différences de cultures et de croyances ont poussé beaucoup de Zimbabwéens à refuser les services du ZINATHA, mettant en cause leurs méthodes de guérison; ils se servent surtout de tatouages et de morsures, et pas mal de gens se demandent si l'organisation n'aide pas plutôt la maladie à se propager.
Les syndicats - Le Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU), dans ses 30 agences locales, donne aussi à ses travailleurs affiliés des informations sur le sida, à travers des personnes spécialement formées pour ce faire. Le sida fait surtout des ravages parmi les ouvriers spécialisés, ce qui a de mauvaises répercussions sur l'industrie, car ces ouvriers sont difficilement remplaçables à court terme.
Les ouvriers demandent qu'un "Code national sur le sida et l'emploi" soit inséré dans un document légal, pour protéger les personnes infectées sur les lieux de travail. La Confédération des employeurs du Zimbabwe (EMCOZ) préférerait qu'on instaure des lignes de conduite sur les soins à donner au sida, plutôt que d'élaborer un statut. Le EMCOZ craint qu'un document légal sur le sida constitue un précédent pour d'autres maladies, tels que le cancer ou les maladies du coeur.
Il y a eu plusieurs tentatives pour arriver à un accord amical et opérationnel, pour protéger les droits des ouvriers et les intérêts des employeurs. Le ZCTU, le EMCOZ, la Confédération des industries du Zimbabwe, le Service d'information sur le sida d'Afrique australe et les représentants du gouvernement ont élaboré une ébauche de code pour aborder les conditions des travailleurs séropositifs. Selon ce code: "Les employeurs et les employés doivent discuter et négocier un ensemble de prestations sociales pour l'interruption de l'emploi pour des raisons médicales. Cet ensemble comprend la pension, le logement, l'emprunt et le coût des soins de santé". En fait, les employeurs ne sont pas tellement contents de ces dispositions du code. Ils disent que l'Association nationale de sécurité sociale couvre déjà les soins de santé des employés, et que, de toute façon, les ouvriers sont déjà couverts par le Plan des pensions des travailleurs.
Le gouvernement a eu plusieurs discussions avec les parties intéressées. Mais soudainement, en août 1998, sans aucune consultation préalable avec les employeurs, il publia une ordonnance stipulant que les employeurs discriminant les employés séropositifs devront payer une amende de 5.000 ZWD ou subir un emprisonnement ne dépassant pas six mois, ou les deux ensemble. Ces nouvelles dispositions furent imposées alors que les entreprises, essayant désespérément d'augmenter la production et d'ajuster les dépenses courantes, forçaient les ouvriers infectés du sida à s'en aller.
Le gouvernement a installé un organisme de protection: le Programme national de contrôle du sida (NACP), qui doit mobiliser et aider les autres organisations non gouvernementales dans la lutte contre le sida. A ce jour, le NACP a manqué complètement d'ardeur au travail, n'offrant que "du thé et de la sympathie" et rien d'autre. Le Dr. Mhloyi reproche au NACP de n'avoir aucun mandat légal et politique pour obliger les départements gouvernementaux à respecter leurs propres directives.
En juillet 1998, plus de 3.000 Zimbabwéens demandaient au gouvernement de montrer clairement son engagement et une stratégie bien définie pour combattre le sida. Les Zimbabwéens veulent plus que des belles paroles. Ils demandent entre autres au gouvernement de subventionner les médicaments employés dans la trithérapie, que beaucoup de malades ne peuvent se payer.
En août 1998, le vice-président du Zimbabwe, Simon Muzenda, exhortait les politiciens à parler plus souvent du sida: "Cacher l'existence du sida a été notre plus grande faiblesse". Le même mois, une délégation de 12 Zimbabwéens se rendait en Uganda pour y étudier leur stratégie de contrôle et de prévention du sida.
On ne peut pas espérer grand-chose du gouvernement de Mugabe, qui connaît un cauchemar économique après l'autre. L' une des conséquences peut se voir dans les prisons, où l'homosexualité règne parmi les prisonniers. Le Zimbabwe a 40 prisons d'une capacité de 16.000 internés. Pour le moment il y en a 18.000, 2.000 de plus qu'ils n'en peuvent abriter. Rien d'étonnant que le sida ait fait des ravages parmi les détenus.
Face à cette impuissance, beaucoup de médecins en viennent à dire que pour le moment le meilleur médicament c'est l'abstention de tout rapport sexuel et la fidélité aux principes moraux. L'avenir s'annonce mal.
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