ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 362 - 15/02/1999

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Malawi

Jours passionnants


by Akwete Sande, Malawi, décembre 1998

THEME = MEDIAS

INTRODUCTION

A l'approche des élections, les médias
pourront-ils jouer le rôle qui fut le leur il y a cinq ans?

Dans la période préparatoire aux élections générales de 1994, plus de 20 journaux circulaient dans le pays, suite à l'avènement de la démocratie multipartite obtenue par les Malawiens au référendum de 1993.

Avant 1993, les médias étaient contrôlés par le gouvernement. Le pays avait un seul journal The Daily Times et son hebdomadaire-frère, le Malawi News. Le gouvernement contrôlait aussi la compagnie de radio et de télévision MBC. Les médias répandaient les idées de Banda et les opinions contraires n'étaient pas tolérées. Beaucoup de journalistes, surtout ceux qui avaient été formés en dehors du pays (le Malawi n'ayant pas d'école de journalisme), ne pouvaient s'exprimer librement. De ce fait, le journalisme était une profession que les parents ne voulaient pas voir embrasser par leurs enfants. Ils constataient que certains journalistes étaient emprisonnés à cause de ce qu'ils avaient écrit.

Tout changea en 1993. Beaucoup de gens devinrent journalistes. On recommença à acheter des journaux et ce fut une période passionnante de l'histoire du Malawi.

Moins de journaux

Cinq ans ont passé et la situation n'est plus la même. Beaucoup des journaux nouvellement créés, surtout ceux fondés par des aspirants-politiciens, ont plié bagage peu après les élections générales de 1994. Ils n'attirent plus les lecteurs et, de toute façon, les frais d'impression sont devenus prohibitifs.

Et puis il y a la question du professionnalisme. Les gens sont devenus perspicaces et choisissent leurs lectures. L'Association des journalistes du Malawi (JAMA) a fait appel à des donateurs internationaux pour qu'ils soutiennent la formation de journalistes. L'Union européenne a financé l'Institut malawien du journalisme qui s'est ouvert en 1996. Depuis lors, il a organisé de brèves sessions de cours pour débutants et pour journalistes expérimentés. Un Conseil des médias a été créé pour garantir l'adhésion à l'éthique de la profession. On a aussi publié un Code d'éthique.

Malheureusement, la situation n'est pas aussi bonne qu'on l'espérait. Actuellement, moins de dix journaux sont en circulation. Il y a deux quotidiens, les autres sont des hebdomadaires n'ayant que peu de diffusion (une moyenne de 2000 exemplaires et uniquement en région urbaine). Le principal problème est le coût élevé de l'impression.

Edward Chitsulo, ancien éditeur et président de la JAMA, attribue la mort de beaucoup de journaux et leur diffusion limitée à la taxe de 20% que les imprimeurs doivent payer sur le papier-journal importé. Tous les efforts pour que le gouvernement supprime cette taxe ont échoué. La JAMA et le Conseil des médias se sont adressés au gouvernement pour ce problème. "Nous pensons que le prix d'impression des journaux est trop élevé et le prix de vente à 15K par exemplaire (1$ = 42K) est trop cher pour la plupart de nos lecteurs", dit Chitsulo.

Journaux et alphabétisation

Grâce à l'extension de l'enseignement, beaucoup plus de gens savent maintenant lire au Malawi. Mais les pédagogues s'inquiètent de ce que ceux qui quittent l'école au niveau primaire pourraient retomber dans l'analphabétisme par manque de matériel à lire. "Peu importe nos efforts pour faire que nos gens sachent lire et écrire; s'ils ne pratiquent pas la lecture et l'écriture, ils retourneront à l'analphabétisme", dit le professeur Gomo Kumichongwe de l'Institut malawien de l'éducation. Il est convaincu que les journaux ont un rôle important à jouer dans la consolidation des connaissances acquises.

Environ 30% des 12 millions d'habitants du pays sont alphabétisés. Pour augmenter ce taux, le gouvernement a introduit la gratuité de l'enseignement primaire en 1994. Pourquoi alors n'est-il pas prêt à promouvoir l'industrie journalistique? Il y a beaucoup d'arguments. Certains disent que l'administration Muluzi n'aime pas la liberté de presse, même si le président lui-même se proclame champion de la démocratie.

Journaux et démocratie

On dit qu'il tolère la presse libre parce qu'il lui doit sa victoire électorale de 1994. La presse d'opposition a sévèrement critiqué son régime, et pourtant jusqu'ici aucun journaliste n'a été emprisonné pour ce qu'il avait écrit.

La répugnance de Muluzi à entretenir la presse peut se justifier par le type de journalisme pratiqué par les journaux soutenus par l'opposition. Récemment, un membre de l'opposition, Brian Mungomo, a lancé un journal de propagande sous le titre de The National Agenda utilisant des noms fictifs. Ce journal ridiculise tous ceux qui sont au gouvernement. Le gouvernement l'a interdit mais une organisation des droits de l'homme, le Comité des libertés civiques, est intervenue pour défendre la publication, forçant la Haute Cour à se prononcer contre l'interdiction. L'avocat du Comité, Ralph Kasambala, fait valoir que, comme les prochaines élections démocratiques approchent, il doit y avoir diverses voix exprimant des opinions variées. "Le gouvernement a ses propres voix, l'opposition doit donc avoir des moyens de communiquer", dit-il. L'affaire est toujours en justice et le journal continue à paraître.

La création de l'Institut malawien de journalisme avait suscité l'espoir de voir se développer une presse vivante dans le pays. Mais un certain nombre de journalistes font maintenant de la politique ou sont partis vers des horizons plus prometteurs, et ce sont des journalistes sans formation, qui ne s'inquiètent pas d'éthique dans leur travail, qui remplissent les vides.

Au moment où nous écrivons, il ne reste plus que six mois avant les élections, mais il semble n'y avoir aucun enthousiasme dans les médias. Il y a moins de journaux qu'il y a cinq ans à une période similaire; les journalistes gagnent peu et les ventes ont diminué.

Costly Mtogolo, professeur à l'université, a dirigé plusieurs sessions de formation pour journalistes. "Je ne crois pas", dit-il, "qu'il y ait une solution immédiate au problème actuel. Mais on peut penser qu'un journal qui souscrit à une éthique professionnelle sera respecté. C'est de cette façon qu'il attirera de bons journalistes et c'est ainsi qu'un journal peut survivre". Il affirme que, mise à part toute difficulté économique, une personne intelligente achètera un journal qui dit la vérité.

A vrai dire, tout ne va pas bien même dans les rangs des journalistes. Beaucoup d'entre eux sont rapides à condamner la corruption, mais celle-ci les guette aussi. Récemment, le directeur national de l'Institut des médias d'Afrique australe, Bentry Mndhuli, a été suspendu, suspecté de détournement de fonds dans la section du Malawi. Une enquête est ouverte. Son affaire a de plus jeté le ridicule sur la profession. Des journalistes ont aussi écrit des histoires embarrassantes les uns sur les autres, ce qui a encore plus jeté le discrédit sur la profession.

END

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