ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 363 - 01/03/1999

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Sierra Leone

Le paradis détruit


by Alpha Rashid Jalloh, Sierra Leone, février 1999

THEME = GUERRE CIVILE

INTRODUCTION

Il fut un temps où la Sierra Leone était considérée comme
un paradis en Afrique de l'Ouest.
Mais les choses ne sont plus ce qu'elles étaient...

Après huit ans de guerre continue entre les gouvernements successifs et le Front révolutionnaire uni (RUF), sans qu'une partie puisse l'emporter sur l'autre, le gouvernement et certains pays ouest-africains, surtout le Nigeria, tentent maintenant d'amener les deux camps à la table des négociations.

Freetown

Pour la première fois en huit ans, les habitants de Freetown ont été atteints de plein fouet par la guerre. L'invasion de Freetown par les rebelles, le 6 janvier 1999, a créé une situation cauchemardesque à laquelle beaucoup ne parviennent pas encore à faire face. L'incendie des habitations par les rebelles a laissé 150.000 personnes sans toit. "La majorité d'entre nous n'a pas les moyens de reconstruire une maison car nous ne pouvons pas rassembler les millions de léones nécessaires", dit Jemie Savage, une des nombreuses victimes de Kissy.

Près d'un tiers des maisons de Kissy, Calaba Town et Wellington, districts de Freetown, ont été incendiées. Freetown elle-même a essuyé également la folie incendiaire des rebelles, mais l'ampleur des incendies ne peut se comparer à ce qui s'est passé dans ces trois districts situés tout près. La plupart des gens hésitent à aller au travail parce qu'ils ont perdu presque toutes leurs affaires personnelles. "Je n'ai plus que deux pantalons et une chemise à mettre. J'ai tout perdu, même mon uniforme. Comment puis-je aller travailler?", dit Musa Sesay, officier de police chassé de chez lui.

Les personnes déplacées doivent loger soit chez des parents, soit dans des écoles ou des hôpitaux. Les conditions de vie en ces lieux sont assez déplorables.

Aller d'un côté de la ville à l'autre est devenu fort difficile. Les voitures et autres véhicules garés le long des trottoirs ou dans des garages ont été brûlés par les rebelles lorsqu'ils se sont retirés de la ville. Ce qui a causé une grande pénurie de moyens de transport.

Des vivres, on peut en obtenir au marché, mais à des prix exagérés. Beaucoup de gens ne parviennent pas à assurer un repas par jour. Les rebelles sont allés de maison en maison extorquant argent et nourriture avant de se retirer dans la brousse.

Le nombre de morts est estimé à 5.000, bien qu'il n'y ait pas de données au sujet du nombre de personnes ayant réellement péri dans les incendies. Les rebelles ont abattu et tué les gens, sans aucune distinction. Certains ont été brûlés vifs dans leur propre maison.

L'église de la Trinité (une église anglicane) et celle de Truscott ont été rasées. Ceux qui ont cherché refuge dans les églises ou les mosquées n'ont pas été épargnés. A Wellington, à 7 kilomètres du centre de la ville, le journaliste Paul Mansaray du Standard Times, sa femme, ses deux enfants et tous ceux qui s'étaient réfugiés dans l'église avec lui ont été abattus. Des postes de police ont été incendiés.

Où allons-nous?

Peut-on à l'avenir éviter pareille situation? Beaucoup de journaux font maintenant appel au dialogue avec les rebelles.

Dans une émission radiodiffusée dans tout le pays le 7 février, le président Ahmad Tejan Kabbah a promis de dialoguer avec les rebelles et de permettre à leur leader emprisonné, Foday Sankoh, de rencontrer d'autres membres de son mouvement rebelle pour établir leurs exigences. Il déclara que les rebelles devraient déposer les armes et "être prêts à parler de paix sans conditions préalables". Le message a été reçu avec soulagement par les citoyens lassés de la guerre.

Même si la vie normale est rétablie à Freetown et dans les régions avoisinantes, la présence de quelques rebelles, surpris de temps à autre dans les rues, rend la population quelque peu nerveuse. Dès qu'une personne identifie un de ces rebelles ou de leurs "collaborateurs", on les traite sans ménagement et on les fusille.

Les journalistes ont toujours peur de reprendre leurs activités normales. Même si les journaux paraissent, la plupart des journalistes disent qu'ils ne se sentent pas en sécurité. On doit se rappeler que quand les rebelles sont entrés dans Freetown, ils ont cherché à savoir où trouver les journalistes. Au moins six journalistes ont été tués. Par deux fois ma maison a été attaquée et j'ai appris qu'un des rebelles avait menacé de "s'occuper de moi s'il me voyait". J'ai dû me réfugier chez un voisin.

Maintenant, les choses se sont quelque peu calmées. Mais où va la Sierra Leone? Le plus gros problème des habitants de Freetown est de trouver un toit, de la nourriture et des vêtements. Le gouvernement n'a pas les moyens de subvenir aux besoins de tous. Notre seul espoir c'est l'aide humanitaire venant de l'extérieur.

Vivre dans ce qui fut un jour un paradis en Afrique de l'Ouest est devenu un cauchemar.

END

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