ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 364 - 15/03/1999

CONTENTS | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS



Malawi

Frissons d'élections


by Patrick Mawaya, Malawi, janvier 1999

THEME = ELECTIONS

INTRODUCTION

Les Malawiens se préparent aux élections législatives et présidentielles de 1999,
mais tout le monde a le trac. Car la question se pose:
"Est-ce que les gens iront voter?"

Il y a un mélange de peur et d'espoir. En fait ces élections provoquent des réactions bien diverses. On s'inquiète de la présence de parlementaires indépendants, de l'apathie des électeurs, du harcèlement des médias et de la façon dont les politiciens présentent leur message.

Georges Claver, directeur exécutif du Forum pour la fondation des handicapés, dit: "En ce qui concerne les élections générales de 1999, je prévois des problèmes ici et là, mais j'ose espérer que ce seront des bonnes élections, pourvu que tous, nous nous en tenions aux règles du jeu". Mais pour nos politiciens du Malawi, ce n'est pas si évident.

L'apathie des électeurs

On s'attend à une certaine apathie chez les électeurs. D'après Georges Claver, "les gens pourraient bien refuser d'aller voter. Ils se demandent à quoi bon voter pour des gens qui ne tiendront pas leurs promesses? A quoi sert de voter pour des gens qui mentent? Mais attention, ajoute-t-il, si les gens ne vont pas aux urnes, nous finirons par avoir un gouvernement qui sera élu par une petite minorité".

Victor Kamanga, un journaliste, remarque: "J'ai le pressentiment que le taux de participation sera faible. On sent de plus en plus d'apathie chez les électeurs. Ils ont perdu tout intérêt dans le processus de démocratisation". Il pourrait bien avoir raison, vu le faible taux de participation aux dernières élections partielles. Même ceux qui s'étaient inscrits sur la liste des électeurs ne se sont pas présentés aux urnes.

Victor Kamanga pense qu'on pourait changer cette apathie par une éducation civique et une vaste campagne pour encourager les électeurs à faire leur devoir de citoyen. Mais une telle campagne devrait être neutre, politiquement parlant. Le but serait d'encourager les gens à voter et de leur expliquer pourquoi ils doivent le faire.

Les parlemententaires indépendants

Le problème des parlementaires indépendants est également une pomme de discorde. Après les élections générales de 1994, plusieurs élus se sont déclarés indépendants. Pourtant ils s'étaient fait élire sur une liste électorale d'un parti politique. Tous les partis au Parlement en furent les victimes: le Front démocratique uni (UDF), le parti du Congrès du Malawi (MCP) et l'Alliance pour la démocratie (AFORD ). Ce qui complique la chose, c'est que la Constitution actuelle du Malawi ne parle même pas de ces parlementaires indépendants. On en est arrivé à ce que l'Assemblée nationale comprenne maintenant: le parti au pouvoir, une opposition et des "indépendants". Des analystes politiques se demandent si ces indépendants ne constituent pas une troisième force dans l'Assemblée nationale.

Le Comité pour la révision de la Constitution, propose ceci: "Si quelqu'un est élu à l'Assemblée nationale sur la liste d'un parti, il ne peut ensuite se déclarer indépendant. Toute déclaration d'indépendance lui fera perdre son siège".

Harcèlement des médias

Le bruit court que les médias sont harcelés, surtout les journaux de l'opposition. Le Daily Times du 26 novembre 1998 mentionnait l'agression du photographe Amos Gumulira et du journaliste commercial Ayam Maeresa, tous deux du même journal. Ils avaient été battus par une bande de voyous dans les bureaux du gouverneur (de l'UDF ) de Blantyre. Selon le journaliste Chikumbutso Mtumodzi, ils ont été battus en présence même du gouverneur Eric Chiwaya, alors qu'ils venaient récupérer une caméra arrachée de leurs mains quand ils faisaient la couverture d'un meeting politique.

A une autre occasion, des partisans du parti UDF ont arraché la caméra des mains du reporter politique du Daily Times, Bright Sonani.

La publication d'un faux journal, le National Agenda, ne fait qu'envenimer la situation. Beaucoup pensent que c'est une ruse de la part de l'UDF, pour contre-carrer les attaques que le vrai National Agenda dirige contre lui. Le parti d'opposition, le Malawi Congress, a interpellé le gouvernement pour lui demander de faire une enquête, mais le gouvernement reste muet, et à ce jour aucune déclaration officielle n'a encore été faite.

A cause de ce harcèlement des médias, on se demande si ces médias seront vraiment en mesure d'informer le public de l'agenda des partis politiques.

Toutefois, le président du Comité des affaires publiques, l'abbé Constantine Kaswaya, a déconseillé aux politiciens de se servir des médias pour des gains politiques. "Laissez les médias faire professionnellement leur travail et diffuser des nouvelles correctes et objectives. Ce n'est un secret pour personne que les médias peuvent diviser et propager un manque de respect", a-t-il dit.

Que faut-il faire ?

De toute évidence, la campagne politique de 1994 a été dirigée contre le défunt Dr. Hastings Kamuzu Banda. Les partis politiques avaient été fondés sur des critères régionaux et, le jour des élections, cette tendance régionale apparut clairement dans les votes. Le Malawi ne peut continuer dans cette voie.

Selon Victor Kamanga, l'avenir ne sera brillant que si la campagne électorale se concentre sur des thèmes nationaux: "La population doit être informée que le pays lui appartient, et qu'elle en est responsable. Les dirigeants sont élus pour le peuple. Le peuple a donc un rôle à jouer, surtout celui d'élire des dirigeants qui répondent à ses aspirations. La population doit être consciente qu'elle fait partie d'un Etat plus vaste et qu'elle doit par conséquent tenir compte des autres tribus et des autres régions. Il faut insuffler aux gens un sens national".

Les dirigeants du Malawi ont été hypocrites dans leur façon d'aborder la politique. Ils ont promis monts et merveilles à cette nation pauvre.

Victor Kamanga dit: "Nos dirigeants sont des propagandistes, ils ne disent pas toujours la vérité. Ce ne sont qu'un tas d'hypocrites. Les Malawiens n'ont pas encore les pieds sur terre; ils s'imaginent que tout va très bien dans le meilleur des mondes, alors que la majorité de la population croupit dans la pauvreté". Et Georges Claver de renchérir: "La démocratie n'a pas de sens si elle ne conduit pas à l'amélioration du niveau de vie des gens. A quoi sert la démocratie à un peuple qui a faim? A un peuple qui ne parvient même pas à nouer les deux bouts? Un peuple qui ne peut même pas se permettre de meilleurs soins de santé?"

Les vrais défis

MacDonald Mizati, un étudiant de troisième cycle au Chancellor College, affirme qu'il n'y a pas assez de conscience politique. Les gens ne savent pas pour quoi voter. Le facteur déterminant c'est la pauvreté, on ne peut l'ignorer. Le peuple ne pense qu'à survivre. Le véritable enjeu des élections n'est pas politique, mais économique.

Pour Georges Claver, "le plus important est d'assurer de l'aide aux groupes désavantagés, tels que les femmes, la jeunesse, les invalides et les handicapés. La démocratie n'a pas de sens si elle exclut certaines parties de la population. La démocratie demande la participation de la masse. Un autre point qui ne peut être ignoré est la façon dont les politiciens présentent leur message politique. Il faudrait une éthique qui bannisse tout langage abusif et qui cherche à unir plutôt qu'à diviser".

END

SOMMAIRE | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS


PeaceLink 1999 - Reproduction authorised, with usual acknowledgement