ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 366 - 15/04/1999

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Afrique

Economies africaines: le défi de la mondialisation


by Alain Agboton, Sénégal, 18 mars 1999

THEME = ECONOMIE

INTRODUCTION

Un forum sur "la compétitivité future des économies africaines" s'est tenu début mars à Dakar.
200 personnes venues de 17 pays d'Afrique ont tiré la sonnette d'alarme.

Qu'est-ce qui empêche le continent africain de s'inscrire avantageusement dans le courant de la mondialisation? Question essentielle. De fait, la compétitivité de l'Afrique se porte mal. Très mal même. Ses économies ne sont pas performantes et l'avenir s'annonce sous d'assez mauvais auspices. La pauvreté est considérable, envahissante et catastrophique. Certes, le continent a enregistré des résultats de croissance encourageants, ces derniers temps, mais ils sont loin d'être suffisants pour atteindre les niveaux requis pour un développement auto-entretenu.

Signaux d'alarme

En 1980, l'Afrique assurait 2,3% du produit brut mondial; 17 ans après, les chiffres indiquent clairement une régression, avec 1,4%. La contribution de l'Afrique aux échanges mondiaux est à moins de 2%. Son potentiel est majoritairement non exploité, constitué surtout de ressources brutes. Les investissements privés directs sont modiques: elle n'en reçoit que 1,5% du montant global. L'aide publique au développement s'essouffle. Résultat: l'Afrique est marginalisée, quasiment étrangère au phénomène sans précédent de la mondialisation, caractérisée par une interdépendance économique rapide et croissante, le développement considérable des échanges de biens de services et des mouvements de capitaux, la diffusion accélérée de la technologie, en particulier dans les domaines des communications, des transports de l'information et de l'automatisation.

Passage obligé, la compétitivité, mue par la productivité (soit au moins 10%) que stimule la concurrence née de la mondialisation, s'avérerait comme un impératif. La compétitivité est devenue "l'élément-clé" du fonctionnement de l'économie mondiale, et elle recouvre une réalité multidimensionnelle: actions concertées et menées autour de la libéralisation et la diversification de l'économie, le développement technologique et la formation des hommes, la création d'un climat politique, juridique, social et culturel favorable aux affaires, au développement de l'épargne et des entreprises.

Les signaux d'alarme ont été tirés par les 200 personnes venues de 17 pays d'Afrique (universitaires, hommes d'entreprise, dirigeants politiques, représentants d'organisations internationales) qui se sont retrouvées, début mars, dans le cadre du Forum "La compétitivité future des économies africaines", organisé par "Futurs africains" du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD).

Cette rencontre ouverte par le chef de l'Etat sénégalais, M. Abdou Diouf, entendait contribuer, de «manière décisive», à la quête de gains de compétitivité. Une rencontre apte à permettre aux décideurs et aux créateurs de richesse d'étudier le positionnement de l'Afrique sur le marché mondial, de discuter sur les initiatives et les projets africains d'amélioration de la compétitivité, de partager des idées sur la gestion des orientations pour tirer profit de cette mondialisation. L'enjeu est continental, d'autant que, pour l'Afrique, l'avertissement est venu de l'Asie en crise. Il fallait dès lors consolider les bases d'un «partenariat de première urgence» et initier des «actions concertées à l'échelle internationale».

Des recettes

La nécessité se fait jour de constituer des organisations régionales, afin de renforcer l'intégration, l'insertion de l'Afrique dans l'économie mondiale. Un enjeu majeur. D'où le devoir pour les Etats africains d'accorder une «haute priorité» à l'éducation, à la santé, à la réforme de l'administration et aux infrastructures.

Les participants se sont penchés sur les conditions pour renforcer la compétitivité, qu'offriraient le cadre macro-économique, la gouvernance, les facteurs de compétitivité au niveau de l'entreprise et l'environnement externe. L'imbrication concomitante de ces éléments devrait être porteuse de progrès, garante de succès.

Première condition, il faut un cadre macro- économique stable, tenir compte des besoins spécifiques du pays, réduire les dépenses publiques en les rationalisant et, en particulier, remettre la dette extérieure de façon réaliste et immédiate.

Quant à la gouvernance, il importe de mériter la confiance des investisseurs à travers la mise en valeur et l'usage d'une certaine transparence. L'harmonisation du droit des affaires, la sauvegarde de la paix, de la stabilité et de la sécurité, le renforcement des capacités de la société civile afin qu'elle participe à la formulation des politiques, la décentralisation de certains pouvoirs et la lutte contre la corruption, ont été autant de paramètres mis en exergue.

Les facteurs de compétitivité au niveau de l'entreprise, troisième condition, ont été un des soucis des participants, qui ont souligné l'importance de disposer d'un personnel qualifié, et donc d'investir dans le domaine des ressources humaines, et d'accompagner cet effort par un contrôle de qualité. En matière de finances, le développement des investissements a été mis en valeur.

Pour ce qui est de la modernisation technologique, autre composante, l'encouragement de la recherche-développement, la facilitation de la restructuration industrielle, la création d'alliances stratégiques, de partenariats, de fusions et/ou d'acquisitions tant au niveau national qu'international, ainsi que l'encouragement de l'"entreprenariat", le rassemblement des petites et moyennes entreprises et la promotion de la standardisation et du contrôle de qualité, ont été ciblés.

En matière d'environnement externe enfin, l'intégration régionale a été vue comme un facteur crucial dans le relèvement de la compétitivité des économies africaines. L'adoption de positions communes concernant les questions de globalisation devra procéder de l'établissement d'un système d'information stratégique continental, un acte propre à permettre d'accélérer l'application du Traité d'Abuja visant à établir une Communauté économique africaine. Devra enfin se développer parallèlement, une capacité correspondante de réaction aux chocs extérieurs, d'adaptation, d'imagination, face au marché globalisé.

Le vice-président de la Banque africaine de développement (BAD), Hamed Bahgad, remarquait au début des travaux que «les perpectives d'une croissance plus robuste sont assombries par la récente crise financière internationale et la baisse des cours des principaux produits de base exportés par le continent africain». Et d'indiquer que l'Afrique «ne pourra renforcer sa compétitivité au sein d'une économie internationale, de plus en plus marquée au coin de la mondialisation, que si nous poursuivons sans relâche les réformes tendant à rationaliser davantage la gestion économique nationale, à diversifier notre structure économique pour qu'elle soit mieux à même de résister aux chocs extérieurs, à encourager le développement du secteur privé pour qu'il serve de moteur de la croissance et à résoudre les problèmes et conflits de société et d'une manière plus générale à promouvoir la bonne gouvernance». Un responsable du PNUD renchérissait: «Il est clair qu'il nous faut être compétitifs si nous voulons assurer notre survie. Il faudra chaque jour renforcer notre capacité à soutenir la concurrence des autres acteurs sous peine de disparition».

La mise en oeuvre de toutes ces conditions devrait fonder et assurer, à l'orée du troisième millénaire, le relèvement de la compétitivité africaine et signer la "renaissance" du continent.

Sur proposition de M. Abdou Diouf, un Comité de suivi, présidé par le Sénégal et de niveau ministériel, a été mis sur pied. Il réunira les représentants des cinq régions du continent et d'organisations ayant parrainé le Forum, à charge pour cette structure d'élaborer un plan d'action.

Cet état des lieux établi, les réformes nécessaires et les voies de salut recensées, et le défi identifié, qu'en restera-t-il? Les paris restent ouverts. «La compétitivité n'est pas un objectif en soi, mais un moyen d'accéder à plus de liberté», s'est-on laissé dire à ce séminaire.

END

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