ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 368 - 15/05/1999

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Congo-Brazza

L'armée angolaise toujours très utile


by Sylphes Mangaya, Brazzaville, avril 1999

THEME = GUERRE CIVILE

INTRODUCTION

Avec la reprise des conflits armés,
l'apport des militaires angolais se fait de plus en plus sentir,
tant sur le plan de la sécurité
que sur celui de la formation de l'armée congolaise.

La présence de l'armée angolaise au Congo- Brazzaville, qui a activement participé au retour au pouvoir du général Denis Sassou Nguesso après cinq mois (juin-octobre 1997) d'une guerre civile meurtrière, faisait déjà couler beaucoup de salive.

Au sein de l'opposition congolaise, le ton avait été donné par l'une des grandes figures de l'opposition, Jean-Pierre Thystère Tchicaya, leader du Rassemblement démocratique et du progrès social. Cet ancien maire de Pointe-Noire, ville du pétrole et principal port du Congo, déclarait au cours d'une interview à RFI, le 19 octobre dernier: "la présence angolaise, peut-être qu'elle se justifie pour le pouvoir. Mais je suis personnellement mortifié, parce que j'estime que mon pays est occupé par une force étrangère. Cette armée angolaise a aidé une des parties en conflit a gagner la guerre; mais que fait-elle chez nous? Qu'elle se retire et nous, entre nous, nous réglerons nos problèmes". La réponse du gouvernement par le ministre de la communication, François Ibovi, trois jours plus tard sur la même radio, avait été virulente. "La force publique angolaise est là, ça ne fait de mal à personne. Bien au contraire, cela contribue à sécuriser le pays en attendant que la force nationale le fasse complètement", avait-il souligné, avant d'ajouter que Thystère Tchicaya avait contribué à la destruction de la force publique du pays en se mettant du coté de Pascal Lissouba. Emilio Gueira, l'ambassadeur angolais à Brazzaville, avait rétorqué de son côté: "Le Congo n'a pas encore une armée digne de ce nom et les militaires angolais contribuent à la formation d'une armée républicaine congolaise qui doit assurer la relève".

Une détermination stratégique

Les enjeux de la présence militaire angolaise au Congo- Brazzaville sont de taille. Une chose est sûre, les hommes d'Eduardo Dos Santos, ne sont pas prêts à quitter le sol congolais, vu la complexité de la situation militaire qui prévaut au Congo depuis septembre 1998. A noter aussi qu'en dehors de la détermination d'aider le pouvoir de Brazzaville, Luanda doit elle-même faire face à la reprise de la guerre avec l'Unita de Jonas Savimbi.

Cette détermination repose surtout sur une certaine forme de coopération qui, à en croire certains diplomates, existerait entre les rebellions des trois pays d'Afrique centrale: l'Angola, le Congo et la République démocratique du Congo. C'est sans doute pour cette raison que les trois chefs d'état, Sassou, Kabila et Dos Santos, s'étaient réunis à Luanda à la mi- janvier dernier. Une rencontre qui justifie bien la présence des troupes angolaises dans les deux Congos. Celle-ci "intègre la tactique globale de lutte contre les rebelles de l'Unita que mène le pouvoir de Luanda", confie un officiel angolais.

Cependant, la situation militaire au Congo-Brazzaville ne semble pas une mince affaire pour les troupes angolaises. Malgré leur grande expérience et une discipline de fer qui les caractérise, les soldats angolais éprouvent tout de même des difficultés face aux Ninjas de Kolélas, pourtant très peu équipés, et aux Cocoyes de Pascal Lissouba, à Brazzaville et à l'intérieur du pays. Selon ce diplomate angolais, ces difficultés sont dues essentiellement au fait que l'armée congolaise, bourrée d'officiers supérieurs, est profondément déstructurée: "L'ennemi arrive toujours à percer là où il y a l'armée congolaise. C'est ce que nous avons remarqué depuis le début des affrontements à Brazzaville et dans les régions du Niari et de la Bouenza".

Ce n'est qu'un rappel dont Sassou Nguesso est pleinement conscient. Dans son message de fin d'année à la nation, le président congolais a promis la restructuration de l'armée et de la force publique. Et après avoir nommé le nouveau chef d'état-major, Jacques Ndolou, les militaires congolais ont été invités à regagner la caserne. Sans doute une amorce de la formation d'une véritable armée de métier.

Une cohabitation facile

Généralement, les soldats angolais n'ont pas du mal à sympathiser avec les populations congolaises, qui aiment les appeler "amigos". Des témoignages concordants disent que, dans bien des localités, les gens se sentent plus en sécurité avec eux qu'avec les Cobras. Dès qu'un contingent angolais se retire, l'anarchie s'installe. C'est le cas à Kinkala, capitale de la région du Pool, 75 km au sud de la capitale. Après le retrait des Angolais, les Cobras s'étaient lancés dans des exactions contre la population et contre les anciens Ninjas qui, se sentant traqués, avaient gagné les forêts. C'est cela qui a provoqué leur colère, dont on regrette aujourd'hui les conséquences.

Bien sûr, il y aussi a des débordements. Quelques éléments angolais, friands d'alcool, déployés dans plusieurs villes du Congo, se sont livrés à des actes de pillage, de viol et parfois d'assassinats de citoyens innocents. "Il y a quelques jours, un soir, deux militaires angolais m'ont appelé, pour que je leur fasse la monnaie; chacun d'eux avait un billet de 1.000 fcfa. Je n'avais aucun franc sur moi. Puis l'un d'eux a plongé sa main dans la poche de ma chemise; n'ayant rien trouvé ils m'ont dit de partir vite", témoigne Jean-Claude, un des déplacés Bacongo, quartier sud de la ville, où se sont déroulés de violents affrontements en décembre 1998, et qui a trouvé refuge dans la zone nord de la ville.

Beaucoup de femmes du Congo-Brazza et les prostituées venues du Congo-Kin acceptent de se marier avec des militaires angolais. Ce qui n'est toujours pas vu d'un bon oeil par une certaine opinion. "Ils finiront par nous faire des enfants qui ont le goût des armes", ironise une personne âgée, avant de conclure qu'à cette allure ils risquent de ne plus repartir chez eux en Angola.

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