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by Mawutodzi K. Abissath, Ghana, mars 1999
THEME = CULTURE
Il existe en Afrique certaines valeurs culturelles traditionnelles
qu'aucune évolution ni révolution scientifique ou technologique
n'a le droit d'effacer. L'auteur soutient que
bien des maux de l'Afrique disparaîtraient,
si les valeurs culturelles traditionnelles étaient respectées
Un des "joyaux culturels" à respecter est le système de la famille élargie. Traditionnellement, en Afrique, ce système est un moyen d'assurer la sécurité sociale: c'est un système naturel d'aide sociale. Chaque Africain est le soutien, le protecteur et le défenseur de son frère ou de sa soeur. Cela explique pourquoi, dans l'Afrique rurale, surtout dans les villages où les valeurs traditionnelles sont encore observées et mises en pratique, il n'y a pas d'"étrangers" au sens strict du terme. Même les étrangers vivant dans ces villages sont considérés comme fils et filles de la communauté, tant que leur conduite et leur attitude ne vont pas à l'encontre des normes et des coutumes de la population locale.
Voyons un village typique de plus ou moins 300 habitants. Le matin, quand vous rencontrez votre voisin à la rue, vous échangez de longues salutations sur un mode fraternel et cordial. Ici, se saluer a une réelle signification, qui va au-delà de l'expression artificielle de "salut" ou "bonjour" qu'on entend dans les cités et communautés urbaines.
En échangeant leurs salutations, deux Africains se serrent la main ou placent les paumes de la main sur le coeur, montrant qu'ils pensent réellement ce qu'ils disent. Ils demandent sincèrement et franchement des nouvelles de celui qu'ils saluent. Ainsi, les Africains qui utilisent le mode de saluer traditionnel n'oublient jamais de s'enquérir de la santé de leur interlocuteur et de celle de toute sa famille.
Dans d'autres cultures, cette pratique pourrait sembler étrange et prendre vraiment trop de temps; mais c'est comme cela que l'amitié, l'harmonie, l'unité, la paix et la compréhension mutuelle imprègnent les communautés locales. De façon un peu simpliste, on pourrait dire que beaucoup de conflits sévissent actuellement sur le continent africain, en partie parce que certaines de ces valeurs traditionnelles de base n'existent plus.
Dans notre civilisation, aucun père de famille ne se mettra à table sans se soucier de savoir si les autres ont mangé ou pas. Un visiteur inattendu qui arrive pendant le repas, ne sera pas relégué dans une salle d'attente, avec un journal, jusqu'à la fin du repas. On l'invitera cordialement à se joindre à la famille et à partager le repas.
C'est triste à dire, mais aujourd'hui un certain nombre de chefs africains égoïstes ne tiennent plus compte de ces valeurs culturelles de base, grâce auxquelles les Africains se considéraient mutuellement comme frères et soeurs. Ils sont devenus tellement aveugles aux valeurs traditionnelles qu'ils se plaisent à piller les ressources du continent pour répondre aux besoins économiques de pays étrangers (tout en se remplissant eux-mêmes les poches). Et cela, au détriment de leurs concitoyens victimes de la famine, de la maladie et d'une misère noire. On pourrait espérer que finalement ces dirigeants utilisent un peu de leurs gains mal acquis pour améliorer le sort de leur peuple. Mais non. Ces personnes importent des armes sophistiquées, et les retournent contre leur propre population.
Conséquences? Un flot de réfugiés et de personnes déplacées, surtout des enfants innocents et des femmes, portant les châlits et les autres biens personnels sur la tête, errant dans la forêt nuit et jour, sous la pluie ou sous le brûlant soleil tropical. L'Africain moyen souffre terriblement, sans être responsable de ses malheurs. Cette situation pourrait en grande partie être évitée, si seulement nos dirigeants voulaient prendre conscience des valeurs culturelles du système de la famille élargie, où chacun est censé être le gardien de son frère.
Prenons un exemple pratique. En 1983, plus d'un million de Ghanéens vivant au Nigeria furent expulsés à la suite d'un coup d'Etat militaire au Ghana. Le gouvernement civil du Nigeria du président Shagari, mécontent du renversement du gouvernement civil du président ghanéen Hilla Liman, renvoya tous les Ghanéens chez eux. A leur grande surprise, les responsables du gouvernement ghanéens qui étaient allés à l'aéroport, ne trouvèrent aucun réfugié: tous les expulsés avaient des parents ou de la famille élargie au Ghana. Dès l'atterrissage de l'avion, les réfugiés étaient allés tout droit chez des parents et des amis, car ils ne voyaient pas pourquoi ils auraient dû vivre sous les tentes d'un camp de réfugiés dans leur propre pays!
Actuellement, l'Afrique est en proie à des guerres civiles, impliquant aussi d'autres pays. Pourtant, la culture africaine dispose d'un mécanisme intégré pour la solution des conflits. Comment fonctionne-t-il? Quand deux personnes sont en bagarre ou si la mésentente se pointe, le chef et les anciens du village convoquent les belligérants et écoutent leurs histoires. On dit aux deux parties quelle devra être leur conduite à l'avenir; celui qui est jugé fautif est réprimandé et sanctionné. On le prie aussi de présenter ses excuses à la partie offensée. Ce remède peut paraître simpliste, mais il fonctionne efficacement au niveau du village.
Aujourd'hui, au niveau du continent, on souhaite que l'Organisation de l'unité africaine (OUA) joue ce rôle auprès des dirigeants africains lésés. Mais il y a une différence et une difficulté. Lorsque l'OUA veut jouer son rôle de médiateur, des forces extérieures, qui souhaitent trouver des marchés pour leurs armes, continuent à fournir armes et munitions aux "seigneurs de guerre" africains.
Si les Africains désirent vivre dans un continent vraiment libre, ils doivent remettre en valeur les aspects positifs de leurs valeurs culturelles.
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