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by Ratsiazo Léandre Prince, Madagascar, mai 1999
THEME = POLITIQUE
Un projet qui laisse sceptique et un référendum au résultat
contestable.
Le régime n'aura droit à aucune erreur.
De par son découpage territorial par le régime colonial français en 1895, Madagascar a été divisé en six provinces, avec comme chefs-lieux: Tananarive, Fianarantsoa, Tamatave, Majunga, Tuléar et Diégo- Suarez. La situation n'a pas changé durant les trois républiques successives post-coloniales. Antananarivo, érigée en capitale, demeure toujours le poste de commandement central de toutes les décisions. Toute activité et tout mouvement y sont coordonnés, si bien qu'il est coutume de dire que "les régimes se font et se défont à Antananarivo". Les pouvoirs sont donc accumulés dans la capitale, et les autorités provinciales ne sont que l'émanation du pouvoir central et de simples exécutants des décisions imposées.
Les Malgaches, ambitieux de nature et avides d'indépendance, se sont toujours insurgés contre le système colonial de centralisation du pouvoir, dont le but effectif était de "diviser pour régner". D'autant que la répartition des castes malgaches en dix-huit tribus a considérablement favorisé les guerres tribales, tuant dans l'oeuf tout mouvement revendicatif patriotique. Bien que l'indépendance politique fut fêtée le 26 juin 1960, le spectre de la colonisation française se faisait encore sentir par la mainmise exercée sur l'économie.
Réagissant à cette nouvelle forme de colonisation, des nationalistes malgaches se dressèrent contre l'exploitation excessive des différentes richesses malgaches par des sociétés à majorité française. Et ce, en dépit des menaces du régime néo-colonialiste de réprimer toute velléité de contestation.
Depuis toujours, l'autonomie des provinces a été l'aspiration de l'ensemble des Malgaches, soucieux de l'évolution socio- politico-économique de leur province. Mais il faut reconnaître que sa mise en place recèle un réel danger pour l'unité nationale, tellement clamée tant par les ténors du régime en place que par les partis d'opposition.
Depuis l'indépendance, des leaders politiques n'ont cessé de clamer leur souhait de désolidariser leur province d'origine de celle d'Antananarivo. Leur position est restée la même, et la menace de lutte tribale reste l'arme de dissuasion brandie dans le cas de dissensions dans les hautes sphères politiques.
Alors que les uns réclament la décentralisation effective des pouvoirs vers les
provinces, d'autres crient à l'indépendance pure et simple des régions. Pour trouver
une issue à ces idées diamétralement opposées, le président Ratsiraka a décidé de
soumettre à une consultation référendaire
Un Comité national d'appui technique à l'autonomie des provinces (CNATP), présidé par Mr. Rakotomanana Honoré, juriste notoire et directeur du cabinet civil de la présidence de la République, a été institué, et le lancement officiel des travaux du comité a fait l'objet d'une cérémonie fastueuse. Mais à l'instar du président de la République, parti la veille en mission à l'étranger, les membres influents des partis de l'opposition, bien qu'invités, brillaient par leur absence.
Les 17 membres du CNATP ont été sélectionnés selon le respect strict de l'équilibre régional et ethnique, outre leur savoir- faire, leur compétence et leur expérience. Les missions qui leur sont confiées sont d'ordre économique, social, politique et juridique. Ils doivent sillonner les six provinces pour sensibiliser la population sur le bien-fondé de la politique de mise en place des provinces autonomes, conformément à la Constitution nouvellement amendée. En second lieu, ils entreprendront des consultations directes auprès des responsables à chaque niveau, où ils recueilleront des données socio-économiques. Théoriquement, les résultats de ces travaux leur permettront d'élaborer une esquisse de dispositions qui articuleront le projet de texte sur l'autonomie.
En somme, le CNATP aura à proposer un système nouveau permettant de coordonner les aspirations légitimes des diverses composantes de la nation à une autonomie effective, à l'unification du peuple malgache et à l'indivisibilité de l'Etat républicain.
Mis à part les avis contradictoires de l'opposition - dont le rôle immuable à
Madagascar est le sabotage de toute initiative du régime en place - l'angle de vue de bon
nombre d'observateurs et d'analystes politiques diffère de celui des initiateurs et
promoteurs de la mise en place des provinces autonomes. Pour ces observateurs, des zones
d'ombre subsistent toujours et incitent au
Sur le plan financier, alors que l'Etat malgache croule sous les dettes et que la quasi-totalité des Malgaches vit au- dessous du seuil de pauvreté, où le gouvernement trouvera-t-il les fonds nécessaires, qui se chiffreraient à des milliards, pour la mise en place des provinces autonomes, l'organisation des élections provinciales (gouvernorat, conseillers provinciaux), etc.?
Quant à la compétence des futurs responsables provinciaux, auront-ils la capacité requise pour gérer avec art et science leur province, alors que leur expérience d'autonomie se limite au fédéralisme tribal de 1991-1992?
La liste des objections est longue, mais le régime est décidé à concrétiser ce qu'il qualifie d'aspiration populaire, exprimée par une victoire référendaire accouchée au forceps. Au risque d'explosion sociale, le régime n'a droit à aucune erreur pour la mise en place des provinces autonomes, qui pourrait être l'unique recours actuel pour libérer l'économie prise en otage par la politique politicienne.
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