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by Percy F.Makombe, Zimbabwe, août 1999
THEME = ELECTIONS
L'auteur nous emmène faire le tour de la scène politique au Zimbabwe
Quand, en 1990, le ZANU-PF abandonna son statut de parti unique, ce fut un moment de joie et d'espoir sans égal pour ceux qui voient dans le multipartisme le symbole de la lutte pour la démocratie. Si le seul nombre de partis est le meilleur indice de la démocratie, le Zimbabwe est alors un pays très démocratique, lui qui peut se vanter d'avoir 15 partis politiques. Et certains signes laissent présager que de nouveaux partis se formeront avant les élections générales de l'an 2000.
Les élections de l'an 2000 se situent dans un contexte de mécontentement, au milieu de problèmes économiques qui ont réduit le revenu disponible de la population. Le mécontentement s'est traduit par des manifestations massives à travers tout le pays lancées par le Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU). Elles ont contraint le gouvernement à supprimer la taxe pour le développement et l'augmentation de 2,5% de la taxe générale sur les ventes.
Comme aux élections précédentes, le problème de la terre est devenu un sujet de contestation. Le gouvernement est impatient d'obtenir des terres pour y installer 118.000 familles. Il étudie aussi la question de la législation fiscale sur les terres à laquelle on avait songé en 1997 mais qu'on avait laissée en suspens.
Le ZCTU poursuit maintenant la formation d'un parti qui s'occupe des intérêts des ouvriers. En février, plus de 30 organisations civiles se sont réunies sous la bannière de la Convention nationale populaire des travailleurs. La Convention a décidé de créer un mouvement politique, à transformer plus tard en un parti politique, et le ZCTU a reçu la tâche de prendre la tête de ce processus. Le mouvement a pris le nom de Mouvement pour un changement démocratique (MDC) et Morgan Tsvangirayi du ZCTU a été mentionné comme dirigeant éventuel. Ceci a apparemment irrité les membres de ZANU-PF, au pouvoir, qui estiment que le ZCTU ne pourra désormais plus représenter effectivement les intérêts des ouvriers. (Ndlr - Le 11 septembre, le MDC a formellement vu le jour, sous la direction des leaders syndicalistes Gibson Sibanda et Morgan Tsvangirayi, respectivement président et secrétaire général par intérim du parti).
Un nouveau venu sur la scène politique est l'Union des démocrates du Zimbabwe (ZUD), dirigée par Margaret Dongo. Dongo est un ancien membre du ZANU-PF. Le ZUD accuse le ZANU-PF d'intimider ses membres. A la fin du mois de mars, Munyaradzi Chihwehsete, jeune président provincial de ZUD, a été attaqué et laissé inconscient à Chitungwiza. Le ZUD accuse le ZANU-PF de cet incident. Le secrétaire administratif du ZANU-PF rejette évidemment ces accusations.
L'opposition ne manque pas de dirigeants qui administrent leur parti selon un système appelé "contrôle à distance", en référence à des leaders qui gèrent leur parti à partir de l'étranger. Le président du Front démocratique populaire (PDF), Austin Chakaodza, est professeur de politique internationale en Grande-Bretagne. Canaan Moyo, qui dirige le Parti de la liberté, a participé aux entretiens de Lancaster House en 1979. En 1980, il était président, pour la province du nord du Matabeteland, de l'Union du peuple africain du Zimbabwe (ZAPU), le plus grand parti de l'opposition de l'époque. Parti en Grande-Bretagne en 1985, il est revenu au Zimbabwe cette année. Le Parti de la liberté a en grande partie concentré son recrutement à Johannesbourg, en Afrique du Sud, où il cherche à atteindre des milliers de Zimbabwéens forcés de quitter leur pays à cause de l'environnement économique hostile.
Un des plus grands partis d'opposition, le Mouvement d'unité du Zimbabwe (ZUM) est dirigé par Edgar Tekere, exclu du ZANU-PF en octobre 1988. Tekere aurait dit à la radio: "la démocratie au Zimbabwe est aux soins intensifs, où il s'est décomposé avant de mourir". On dit qu'il avait fait pression sur le ZANU-PF du président Mugabe pour qu'il abandonne la voie du parti unique. En 1994, le ZUM a fusionné avec le Conseil national africain uni (UANC), de Mgr Abel Muzorowa. Muzorowa avait goûté au pouvoir comme Premier ministre du bref gouvernement Zimbabwe-Rhodésie durant un accord interne avec Ian Smith.
Les étudiants des institutions supérieures ont toujours été une épine dans le pied du gouvernement. En 1998, l'université du Zimbabwe (UZ) a été fermée pendant cinq mois, suite à des manifestations. En 1996, le professeur Gordon Chavunduka, alors vice-chancelier de l'UZ, a fermé l'université pour une semaine après des batailles incessantes sur le campus entre étudiants et police. A l'époque, Obey Mudzingwa était président du Conseil représentatif des étudiants. Renvoyé de l'université à cause de cela, il a maintenant créé un parti, la Convention du peuple du Zimbabwe (ZPC). Le parti promet d'accélérer le processus de redistribution des terres.
Un autre parti aspirant à détrôner le ZANU-PF est le Parti démocratique. Son ancien dirigeant Davidson Gomo est actuellement à Londres, où il prépare un doctorat en philosophie. Le dirigeant actuel, Wurayayi Zembe, dit que Mugabe est... "coupable de dictature, de corruption et de grave mauvaise gestion de l'économie". Il y a encore le Forum Party of Zimbabwe (FPZ), dont le premier président a été Enoch Dumbutshena, premier juge à la Cour Suprême. Son actuel président est Washington Sansole, ancien juge qui a repris une activité privée.
Depuis toujours la province du Manicaland a constitué un problème pour le ZANU-PF. Chipinge, au Manicaland, reste un bastion du parti d'opposition ZANU-Ndonga, du Rév. Sithole.
Il semblerait que la province du Matabeleland sera aussi un problème pour le ZANU, lors des prochaines élections générales. Un parti dénommé ZANU-2000 gagne du terrain dans la province. Ce parti est né du mécontentement de ceux qui n'ont pas admis l'accord d'unité signé en décembre 1997 et qui fusionnait le ZANU-PF avec le PF-ZAPU. Un de ceux qui veulent faire revivre le PF-ZAPU, Qhubani Moyo, affirme: "le ZANU- PF et le PF-ZAPU n'ont jamais fusionné. En fait, le PF-ZAPU a été absorbé par le ZANU-PF".
Selon un commentateur politique de l'UZ: "Une caractéristique des partis d'opposition au Zimbabwe, c'est qu'ils ne manifestent pas une opposition, mais de la haine. La plupart des opposants sont d'anciens politiciens recyclés, qui n'ont rien de neuf à offrir. Certains sont trop régionalistes pour avoir une signification nationale".
Tandis que l'opposition se prépare pour les élections de l'an prochain, sa plus importante pierre d'achoppement est l'apathie des électeurs. Alors qu'aux élections de 1980, 94% des 2.900.000 électeurs avaient voté, le nombre est descendu à 80% en 1985. En 1990 ce fut pire: 2.600.000 votants sur 4.800.000 d'électeurs possibles. Les élections de 1995 ont été une comédie, car une conférence consultative multipartite avait décidé de boycotter les élections parlementaires de 1995 et celles présidentielles de 1996.
Les élections au Zimbabwe ont été caractérisées par le manque de formation des électeurs et le désordre des listes d'électeurs. C'est ainsi que Margaret Dongo a contesté la perte de son siège au Parlement de Harare-Sud, au profit de Viviene Mwashita, en 1995. Le tribunal, jugeant que les listes électorales étaient en désordre, a décidé un nouveau tour des élections, remportées par Margaret Dongo. La Commission de supervision des élections avait précédemment été accusée d'être partisane.
On espère qu'une nouvelle Constitution remédiera à tous ces défauts. Le président Mugabe a nommé une Commission de révision constitutionnelle pour étudier la rédaction d'une nouvelle Constitution. Tendai Biti, avocat constitutionnaliste déclare: "La majorité des personnes reprises sur la liste a des liens avec le ZANU-PF". L'Assemblée nationale constitutionnelle (NCA), groupement de syndicats, d'organisations non gouvernementales et des Eglises, a refusé de faire partie de la Commission constitutionnelle. Le seul élément positif de toute cette affaire c'est que les conclusions de la Commission seraient soumises à référendum.
La prolifération de groupes divers et politiquement très assurés, rend difficile l'obtention d'un consensus. Cela se complique encore du fait que certains groupes politiques, qui continuent à critiquer le ZANU-PF, ont avec lui plus qu'une ressemblance passagère. Si les Zimbabwéens arrivent à être prêts pour les élections l'an prochain, ils se trouveront enfermés dans une étreinte mortelle, entre un parti au pouvoir inefficace et une opposition désorganisée.
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