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by Tshibambe Lubowa, Congo-RDC, octobre 1999
THEME = POLITIQUE
La démocratie cherche encore sa place au Congo-RDC
Au moment où des efforts sont consentis pour amener les belligérants de la crise congolaise au dialogue national d'où sortira un nouvel ordre politique, les autorités à Kinshasa n'arrêtent pas de mettre en place des structures d'un pouvoir monolithique. Les Comités des pouvoirs populaires (CPP), créés officiellement par le décret présidentiel n§ 236 du 6 juillet 1999 comme organe exécutif du pouvoir populaire, viennent de connaître, depuis le 30 septembre, leurs nouveaux dirigeants, à la tête desquels se trouve l'ancien chargé de propagande de l'AFDL, l'ancien ministre de l'Information et de la Presse du premier gouvernement de Kabila, M. Raphaël Ghenda.
Renvoyé du gouvernement Kabila en mai 1998 et emprisonné au centre pénitencier de Makala (Kinshasa) pendant plus de quatre mois pour un problème de mauvaise gestion des fonds alloués à son ministère, M. Raphaël Ghenda prend les commandes des CPP en qualité de secrétaire général, au moment où le gouvernement vient de mettre à la disposition du mouvement 210 millions de francs congolais (46,6 millions de dollars) des 350 millions de francs de crédit alloués à l'économie. Dans la circulaire n§ 1428 du 28 septembre 1999 adressée aux banques agréées, M. Nestor Diambwana, membre du comité directeur des CPP et vice- gouverneur de la Banque centrale du Congo, a donné des instructions précises pour faciliter l'accès des CPP au programme "Appui à l'économie" du gouvernement.
Cette mesure surprenante du gouvernement fait poser la question: que sont ces comités des pouvoirs populaires qui peuvent s'improviser petites et moyennes entreprises et ainsi bénéficier du crédit à l'économie? Le gouvernement voudrait-il créer, à travers les CPP, une nouvelle classe d'entrepreneurs, comme cela avait été le cas sous le régime déchu de M. Mobutu avec les mesures de zaïrianisation et de radicalisation?
Les CPP sont un mouvement politique copié sur le modèle libyen, créé en remplacement de l'ancienne autorité de transition, l'AFDL, que le président Kabila considère maintenant comme "un conglomérat d'aventuriers et d'opportunistes, constitués notamment de gens d'autres nationalités qui passaient pour des réfugiés congolais imposés à la direction révolutionnaire".
Le président Kabila présente les CPP comme étant une autre façon de gouverner, qui fait passer le pouvoir, d'un groupe politique ou d'une clique, au peuple. Définis comme étant non partisans et impliquant l'exercice de la démocratie directe, les CPP ont pour rôle "de fixer la politique à suivre par les services publics, d'en assurer l'exécution et, le cas échéant, de contrôler cette exécution". Ils ont été budgétisés et bénéficient, depuis le mois de mars 1999, de fonds publics pour effectuer des travaux considérés comme prioritaires. Les CPP des universités, des instituts supérieurs, des quartiers et des communes de Kinshasa ont ainsi bénéficié de fonds pour l'exécution de certains travaux d'intérêt public. Mais le manque d'expérience et la mauvaise gestion ont fait qu'il y a eu plus de spectacles que d'actions concrètes réalisées sur le terrain. Ces fonds sont même devenus l'objet de conflits entre différents responsables des CPP à tous les niveaux.
Les CPP sont donc devenus un fourre-tout. On y recourt pour faire de la défense civile; on vient de leur confier la tâche de surveiller tous les mouvements des éléments des forces d'interposition de l'Onu. Ils ont également été chargés de faire la police économique après la prise des dernières mesures économiques gouvernementales interdisant les opérations en monnaies étrangères.
La difficulté consiste dans la marge qu'il faudrait tracer d'une part entre les CPP et les services publics, et d'autre part entre les CPP et les forces politiques et sociales. En tout état de cause, la population ne voit pas encore de place pour la démocratie dans un environnement où un mouvement (les CPP), contrôlé par le chef de l'Etat, voudrait exercer tous les pouvoirs. Kinshasa donne ainsi à la rébellion un beau prétexte de poursuivre la guerre.
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