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Afrique du Sud - Le grand défi: la création demplois
ACTION SOCIALE
La création de
nouveaux emplois est, pour les Sud-Africains,
le défi le plus important dans la première décennie de ce millénaire
Pour le citoyen sud-africain, la création de nouveaux emplois devrait être en ce moment la préoccupation prioritaire du gouvernement. Bien sûr, il y a dautres problèmes: manque de services sociaux, de compétences, de moyens déducation, et un taux galopant de criminalité. Mais pour qui est sans travail, le chômage est le premier des problèmes. A quoi sert de dire aux millions de chômeurs dattendre quelques années, durant lesquelles une stratégie correcte de marché sera mise en place? Depuis 1994, le fossé entre favorisés et démunis na fait que sélargir. Une étude sur la distribution des revenus durant les années 1991-96, réalisée par Wharton Economic Forecasting Associates (WEFA ), un cabinet international dexperts-conseils, la confirmé: les riches continuent à senrichir, alors que les pauvres, essentiellement de la communauté noire, deviennent de plus en plus pauvres. En 1996, 40% parmi les ménages noirs les plus pauvres avaient un revenu de 20% plus bas quen 1991.
Tendances
Il y a pourtant eu «une redistribution notable du revenu en faveur de groupes prélablement désavantagés». Létude, intitulée «Gagnants et perdants: lévolution de la distribution du revenu en Afrique du Sud dans les années 1990», montre que les Noirs ont une place plus importante dans lélite économique du pays et que les divisions des classes sont moins liées à la race quon ne le pensait. Ces tendances nont fait que saccroître depuis que le gouvernement du Congrès national africain (ANC) a lancé, en 1996, son Programme de croissance, demploi et de redistribution (GEAR) un essai prudent de gestion économique, qui doit toutefois encore stimuler une croissance solide ou une redistribution importante du revenu aux pauvres. Andrew Whiteford, coauteur de létude avec Dirk Ernst van Seventer, soutient que ces tendances sont plus apparentes dans la communauté des Noirs. La proportion des ménages noirs parmi les 10% les plus riches est passée de 9%, en 1991, à 22% en 1996. Le revenu total des Blancs est tombé de 59,5% à 51,89%, et la proportion des ménages blancs dans les 10% les plus riches en Afrique du Sud a dramatiquement chuté de 95% à 65%.
Cette étude a aussi constaté que plus de 90% de laugmentation du revenu des Noirs et des autres groupes ethniques proviennent de laccroissement de léconomie et que moins de 10% sont attribuables à la redistribution. Entre 1991 et 1996, la part du revenu des métis est montée de 6,8% à 7,9%, et celle des Indiens de 3,8% à 4,5%. Mais, en même temps, les inégalités dans le revenu entre les parties les plus riches et les plus pauvres parmi les métis et les Indiens nont fait que croître.
Daprès Whiteford et dautres analystes, la création à grande échelle de nouveaux emplois est indispensable si on veut réduire cette inégalité. Zwelinzima Vavi, le secrétaire général du Congrès des syndicats de lAfrique du Sud (COSATU ), réclame des mesures immédiates et un débat national pour sattaquer à ce quil appelle «la bombe à retardement» du chômage et de linstabilité sociale. De 1991 à 1996, le nombre de Noirs dans des emplois à haute compétence avait augmenté de 80 %, mais le total des Noirs au travail diminuait de 2%. Ce sont les gens peu ou pas qualifiés qui ont été le plus touchés. A elle seule, lindustrie des mines dor, autrefois le pivot de léconomie, a perdu 200.000 emplois. En 1987, elle employait 530.000 personnes. Dans les années à venir, des dizaines de milliers demplois seront supprimés dans le secteur de la fonction publique et des entreprises parastatales à cause de la privatisation et dautres formes de restructuration. Il y aurait 54.000 fonctionnaires de trop dans le secteur public, la plupart dans la province orientale du Cap. LAfrique du Sud nest pas le seul pays à avoir une fonction publique pléthorique et trop peu efficace, dont les salaires compriment les dépenses dans dautres domaines plus productifs. Certains pays sont connus pour sêtre attaqués vigoureusement au problème, et sen portent bien; dautres ont essayé de lignorer, et en supportent les conséquences.
Les syndicats
Le gouvernement ANC sest engagé à dépenser moins pour les salaires du secteur public et plus pour linvestissement des capitaux. Tout en essayant déviter toute confrontation avec les syndicats, il ne se laissera pas détourner de sa politique économique. Les syndicats continueront leurs manifestations contre la perte demplois, et suivront de près les plans du gouvernement pour changer la législation du travail et réduire le service public. Certains hauts fonctionnaires du gouvernement affirment que, plus tard dans lannée, seront présentés des amendements aux lois sur les relations sociales, les conditions de base pour lemploi et linsolvabilité, pour supprimer certains aspects qui empêchent la création de nouveaux emplois.
Charles Tromp, consultant social, est daccord avec le gouvernement et les syndicats qui ont pris des mesures pour un marché du travail bien agencé, mais, dit-il, «avec un chômage qui monte en flèche et le rand sud-africain qui se bat contre des devises bien solides, comme le dollar américain ou la livre sterling britannique, cela ne servirait à rien de vouloir trop régler le marché du travail; ceci pourrait effrayer les investisseurs potentiels et forcer les petites entreprises de fermer. Nous devrions plutôt être plus fle-xibles dans nos lois sociales».
Beaucoup dinvestisseurs locaux sont inquiets de la rigidité des lois sociales, du sida et dun taux de chômage de 30%. Mais des personnes bien placées avertissent que cela ne changera pas du jour au lendemain. «Bien sûr, nous devons protéger les travailleurs sud-africains contre toute exploitation, mais en même temps nous devons être prêts à attirer les multinationales,réduisant ainsi larmée des chô-meurs», dit Tromp.
Pour certains, si on assouplit les lois sociales, on augmentera la création de nouveaux emplois. Les compagnies qui avaient joui de la protection de lEtat au temps de lapartheid, sont maintenant en but à une compétition mondiale. Malgré la croissance économique, des emplois continuent à être supprimés. Selon une étude de la WEFA sur les perspectives de lemploi en Afrique du Sud, en 1997 on avait perdu 143.000 emplois, alors que léconomie avait connu une croissance de 1,7%. En plus, la population active sétant accrue de 320.000 personnes, le chômage connut un accroissement rapide. Chez Milani, secrétaire général de la Fédération des syndicats de lAfrique du Sud, note que malgré une croissance positive, on continue à supprimer des emplois à un rythme alarmant. Alors que la richesse augmente, de plus en plus de travailleurs sappauvrissent.
Une enquête menée par le Conseil de recherche des sciences humaines à Pretoria révèle que plus dun million demplois ont disparu dans la dernière décennie. Le COSATU estime que, ces 10 dernières années, sur une moyenne de 350.000 chômeurs entrés chaque année dans le marché de lemploi, 50.000 seulement ont trouvé du travail.
Cela est très inquiétant. Les dirigeants des syndicats soutiennent quil est vital que léconomie puisse créer de nouveaux emplois, mais quil est aussi vital de garder au travail ceux qui y sont déjà. Vavi souligne que le taux élevé de criminalité et lincidence croissante du sida sont inextricablement liés: ce sont-là des signes dune grande instabilité sociale. Pour les syndicats, les inondations catastrophiques dans le nord et lest du pays sont loccasion de mettre en pratique ce quils ont prôné depuis longtemps. Les premières estimations des dommages causés par les pluies sélèvent à des centaines de millions de rand, et Vavi croit que cest là une excellente occasion, à moyen terme, de réduire les rangs des sans-emploi.
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