ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 389 - 01/05/2000

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Togo - La guerre contre le trafic de drogue


DROGUE


Le trafic de drogue prend de plus en plus d’ampleur au Togo depuis près de dix ans

Malgré les efforts du gouvernement, le Togo est devenu une plaque tournante de la drogue dans la sous-région, nous confie un magistrat qui ajoute que, chaque semaine, il y a un bon nombre de trafiquants qui passent au tribunal. Selon le Comité national anti-drogue (CNAD), une structure interministérielle de coordination contre les stupéfiants, en 1997 les forces de l’ordre ont saisi près d’une tonne de drogue et opéré plus de 200 interpellations. Selon le ministre de l’Intérieur, de la Sécurité et de la Décentralisation, le général Sizing Akawila Walla, ses services ont détruit en 1998 plus de deux tonnes de drogue. En 1999, les saisies n’ont pas baissé, au contraire.

L’héroïne et la cocaïne sont contrôlées par des Indo-Pakistanais, alors que les Togolais et les Ghanéens contrôlent le circuit du cannabis. Selon un officier de police, la cocaïne et d’héroïne sont écoulées par avion. La plupart du temps, confirme-t-il, les trafiquants empruntent Ethiopian Airlines et Nigerian Airlines. Selon des hôtesses de Ethiopian Airlines, une fois à bord, les trafiquants déchirent leurs passeports et les remplacent par d’autres, dissimulant ainsi l’origine de leur embarquement. Un magistrat nous a confié que ces trafiquants «élégants et propres, voyagent toujours en première classe». Ils ingurgitent des capsules de drogue soigneusement enfermées dans des préservatifs et boivent de la bière pour les tasser. La police, qui connaît cette pratique, guette les passagers à l’allure louche.

Quant au cannabis, il est cultivé dans les campagnes, surtout dans le sud du pays, loin des regards indiscrets, et est écoulé sur les marchés locaux, béninois, ghanéens et même européens. Les gendarmes réussissent de temps en autre à démasquer ces immenses champs. Les paysans se défendent en disant qu’ils font cela pour joindre les deux bouts, car les prix du café et du cacao ont baissé; mais les juges n’écoutent pas leurs explications et les condamnent à de lourdes peines et surtout à de grosses amendes. Alors que le kilo de café ou de cacao est payé moins de 1.000 fcfa, le prix du kilo du cannabis, lui, dépasse les 20.000 fcfa. De quoi attirer les petits planteurs des campagnes.

Au Togo, les Ibos du Nigeria sont les plus fichés par la police dans le trafic de drogue. Pour dissimuler leur fortune, ils tiennent des commerces de friperies et des boutiques de pièces détachées pour voitures. Ils sont de plus en plus nombreux à Lomé et depuis peu à l’intérieur du pays.

Une lutte difficile

Pour contrer ce fléau, le Togo s’est doté, le 18 mars 1998, d’une nouvelle loi sur le contrôle des stupéfiants qui criminalise le trafic de drogue et punit sévèrement les coupables. Tous ceux qui s’adonnent à la culture, à la production, à la transformation, à l’importation ou au transport international des drogues à haut risque, encourent des peines allant de 10 à 20 ans de réclusion, et des amendes entre 250.000 et 125 millions de fcfa (art. 98 et 99).

Toutefois, dans l’application, les juges sont plus cléments, compte tenu de certaines difficultés. En effet, le trafic de drogue étant un crime, c’est la cour d’assises qui est compétente en la matière. Or, cette cour d’assises ne se réunit qu’une seule fois par an, alors que le nombre de trafiquants arrêtés est assez important. Dans la pratique, donc, ils passent devant le tribunal correctionnel qui allège les peines. De plus, les amendes payées par ces trafiquants n’atterrissent pas toutes, malheureusement, dans les caisses de l’État... Certains magistrats se seraient substitués au trésor public, nous a soufflé un homme de loi.

Selon le ministre de l’Intérieur, «le Togo qui s’est fixé un certain nombre d’orientations, fondées sur le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, oeuvre inlassablement à promouvoir son développement harmonieux et durable dans la paix et la sécurité. Dans ce contexte, notre pays a fait de la lutte contre le banditisme organisé, contre la délinquance juvénile et l’abus et le trafic illicite des drogues, l’une de ses priorités».

Quant au secrétaire permanent du CNAD, le commandant Wanta Badombena, à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre la drogue, il a invité les jeunes à s’écarter de la drogue, en soulignant que «l’usage abusif des stupéfiants entraîne forcément des conséquences néfastes pour l’organisme humain. Le toxicomane court des risques par rapport à la loi, à son milieu social et à sa propre santé».

Les forces de l’ordre, elles, essayent avec les moyens du bord de maîtriser les astuces des trafiquants qui veulent faire du Togo un paradis narcotique.