ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 393 - 01/07/2000

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Madagascar
La fonction publique sur la sellette


AJUST. STRUCT.


Réforme de la fonction publique
sous la pression des bailleurs de fonds

Depuis plus d’un an, le gouvernement malgache a créé deux comités techniques: le Comité technique pour la réforme du service public, et le Comité de pilotage de la réhabilitation de la gestion du personnel de l’Etat. Leur but: étudier les procédures de la réforme de la fonction publique.

Le gouvernement et ces deux comités ont d’abord procédé au recensement du personnel de l’Etat, dont le chiffre exact n’est toujours pas clair. Le ministère de la Fonction publique avance le chiffre de 134.000 agents, tandis que le ministère du Budget et des Finances en avance un autre, qui diffère encore de celui trouvé par les deux comités. Alors? 125.000? 134.000? 145.000?...

En tous cas, selon le ministère de la Fonction publique, les fonctionnaires à Madagascar ne sont pas pléthoriques, mais ils ne sont pas responsabilisés et ils sont mal structurés. Dans certains départements, les besoins sont supérieurs à l’effectif, dans d’autres c’est le cas contraire. De plus, la qualification du personnel et le manque de moyens dégradent le service public. Le ministère souligne aussi que la réussite de la réforme dépendra des personnes qui occupent les postes clés, essentiels pour faire tourner la machine administrative.

Etat des lieux

Dans tous les départements ministériels, on constate de grandes défaillances au niveau de leurs structures et des comportements des agents de l’Etat eux-mêmes. La déontologie est inconnue des fonctionnaires, dont 1 sur 5 en parle de façon à peu près correcte... Le régime disciplinaire est inadapté. L’appareil administratif est obsolète, en retard de plusieurs décennies, compte tenu des missions fondamentales de l’Etat et du contexte international de l’économie de marché. Il est inefficace en raison du règne de l’arbitraire et de la pratique des “parapluies” politiques qui paralysent les fonctions d’inspection, de vérification et de contrôle.

Cet état des lieux plutôt sombre s’explique par trois raisons: les textes sur le régime disciplinaire sont anciens et incohérents alors que ceux sur la déontologie sont incomplets et inachevés; l’Etat de droit relève encore du domaine de slogan; les agents de l’Etat sont démotivés et frustrés.

La rémunération du personnel de l’Etat demeure la principale revendication de la Fédération des syndicats des fonctionnaires malgaches, et est devenu un cheval de bataille pour les politiciens, surtout de l’opposition. Les fonctionnaires malgaches sont parmi les plus mal payés sur le continent africain, une des causes qui favorise le laxisme, la corruption, l’absentéisme, bref la déliquescence de l’administration publique en général.

Il n’est plus à démontrer que la centralisation excessive de l’administration publique entrave le développement national et entraîne parfois des conséquences néfastes sur le plan socio-économique. L’opinion des usagers, c’est-à-dire les contribuables, ne ménage pas les comportements des agents de l’Etat. La corruption devient une gangrène qui touche presque tous les services de l’Etat. Selon l’enquête réalisée en 1999, 85% des usagers ont avoué avoir donné de l’argent aux fonctionnaires.

Ceci étant, le problème de fond n’est pas seulement les salaires mais aussi le manque du sens de civisme et l’indiscipline, d’autant plus que la politisation de l’administration détruit l’image de la fonction publique. Etre fonctionnaire devient banal et n’a plus de sens: maigres salaires, fonctionnaires sous-employés ou débordés de travail, politique de parti (au pouvoir) à outrance, matériels inadaptés, etc.

Le département de l’Enseignement primaire et secondaire, avec ses 40.000 employés éparpillés dans toute l’île, de même que le ministère de l’Intérieur, relèvent du domaine stratégique du parti au pouvoir, et ce depuis l’indépendance. Ils doivent obligatoirement recruter parmi les proches du président de la République et ont chacun une mission très claire: faire gagner à tout prix aux élections. Pire, même la gestion dans les Forces armées est décevante, bien que leur statut soit différent de celui des fonctionnaires civils. Maintenant, on parle non seulement de “fonctionnaires fantômes” mais également de “militaires fantômes”. Certaine indiscrétion au ministère des Finances révèle un millier de “militaires fantômes” que l’Etat continue à payer au profit de certains hauts dignitaires au sein de l’armée malgache.

Ministères pilotes pour élaborer la réforme

C’est dans cette atmosphère étouffante, que l’idée de réforme est née, plus ou moins dictée par les bailleurs de fonds de Madagascar. Pour être plus objectif, dans cinq ministères dits pilotes on a effectué des audits et des enquêtes auprès des usagers, et fait des échanges avec les différents partenaires de l’Etat. Ces ministères pilotes représentent 75 à 80% du personnel de l’Etat.

Les secteurs visés concernent 3 catégories bien délimitées: Justice et Budget pour la souveraineté de l’Etat; Santé et Education comme mission essentielle de l’Etat; et Travaux publics comme appui à la production pour le développement du secteur privé. On constate des dysfonctionnements du service public dans tous ces départements. L’autonomie des provinces, prévue dans l’actuelle Constitution, préconise aussi nécessairement la décentralisation et la déconcentration des services publics.

Parler de restructuration, cela implique un plan de gestion des ressources humaines et une planification des besoins en matériels et en ressources financières. Il faudra aussi augmenter la masse salariale, avec un meilleur recouvrement des impôts et un contrôle efficace des dépenses publiques. On ne peut cacher toutefois que cette réforme sera lente à élaborer. Elle peut rencontrer toutes sortes de difficultés encore difficiles à cerner.


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