ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 401 - 01/12/2000

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 Afrique australe

La liberté de la presse



MEDIAS


La liberté de la presse — ou plutôt le manque de liberté de la presse —
dans beaucoup de pays d’Afrique est source constante d’inquiétude.
L’auteur nous donne une vue d’ensemble de la situation en Afrique australe

Napoléon a dit que «quatre journaux sont plus à craindre qu’un millier de baïonnettes». Si on considère la situation en Afrique australe, il faut en conclure que les médias font vraiment peur. Ils sont l’objet de constantes attaques. La plupart du temps, le problème n’est pas tellement la liberté d’expression, mais plutôt la liberté après l’expression. Les gouvernements prennent des mesures répressives contre des journalistes “dévoyés”. Mais il faut admettre que dans quelques cas, des journalistes se sont mal conduits. Jetons donc un coup d’œil à ce qui se passe autour de nous.

Swaziland: La libéralisation des ondes au Swaziland, tant qu’elles resteront entre les mains du roi, restera évasive. En ce qui concerne la presse, le seul journal national, le “Swazi Observer”, vient d’être fermé. Dans certains rapports publiés, le gouvernement n’avait pas une belle image.

Congo RDC — Le Congo a sa part de problèmes de presse. En plus d’une guerre civile sans fin, il y a continuellement des heurts entre le gouvernement et la presse. En mai dernier, le directeur de “La libre Afrique” fut condamné à trois ans de prison par un tribunal militaire. Avant la sentence il avait déjà fait environ cinq mois de prison préventive. Son crime aurait été «d’avoir provoqué l’armée», celle-ci étant d’ailleurs en même temps le plaignant et le juge.

Angola — Domingo Mussauo, de la radio nationale angolaise, a été enfin acquitté après avoir fait trois mois de prison préventive. Son crime: avoir fait allusion à une lettre que le gouverneur provincial avait écrite au président. Paradoxalement, la Constitution de l’Angola garantit la liberté de la presse, mais la pratique est quelque peu différente, comme ont pu l’expérimenter bien vite ceux qui essayent de critiquer le gouvernement. L’Union des journalistes angolais a accusé la police de se servir de moyens répressifs pour arracher des aveux. Tout cela rappelle ce qui se faisait pendant le régime à parti unique.

Zambie — Déjà en 1968, le président Kenneth Kaunda avait dit: «Dans certaines conditions, la presse est capable de faire ou de défaire des gouvernements». Encore aujourd’hui, la peur de la presse reste très présente dans les corridors du pouvoir en Zambie, bien que Kaunda n’y réside plus. Il n’y a pas beaucoup d’affection entre le journal The Post et le gouvernement. Un journaliste du Post, Sheikh Chifuwe, a été expulsé d’une conférence de presse parce que, selon le ministre du Développement communautaire, le journal dénigre toujours le gouvernement. Un autre journaliste, Dickson Jere, du journal The Monitor, recevait régulièrement des menaces anonymes. C’était après avoir écrit un article accusant le directeur des services secrets zambiens d’être impliqué dans des activités suspectes dans le commerce des armes.

Namibie — En Namibie, il y eut une vague de protestations de la part des parlementaires, exigeant des sévères mesures contre le journal gouvernemental New Era. Ce journal avait rendu les parlementaires furieux en refusant d’être le porte-parole du gouvernement. Ils lui reprochaient de mordre la main de celui qui le nourrit.

Mozambique — Au Mozambique, le ministre de la Justice a essayé à plusieurs reprises, mais sans succès, de forcer le rédacteur du journal Metical, Carlos Cardoso, de révéler ses sources. Le gouvernement voulait connaître l’identité de la personne qui avait envoyé au journal une lettre écrite par l’assistant du procureur général. (Ndlr – Le 22 novembre, Cardoso a été abattu, près de la rédaction de “Metical”, à Maputo, par deux hommes qui ont ouvert le feu à bout portant sur le journaliste, le criblant de balles.)

Zimbabwe — Dans un Zimbabwe survolté, la Cour suprême avait annulé le monopole qu’avait la Corporation de la radiodiffusion du Zimbabwe (ZBC). Celle-ci est sous le contrôle de l’Etat. La Cour suprême déclara que ce monopole, qui lui avait été octroyé sous la section 27 de la loi sur la radiodiffusion, était incompatible avec la section 20 (1) de la Constitution, garantissant la liberté d’expression. On avait espéré que la libéralisation des ondes dans le pays permettrait d’entendre plusieurs voix et opinions. Mais que s’est-il passé? Dans la préparation au référendum constitutionnel organisé par le gouvernement, l’Assemblée constitutionnelle nationale, groupant des organisations de la société civile, avait intenté un procès à la ZBC pour avoir refusé de diffuser ses annonces. Malgré une injonction de la cour, la ZBC persista dans son refus. Pendant la campagne préparatoire aux élections parlementaires de juin, la ZBC avait à nouveau refusé de diffuser les annonces du Mouvement pour le renouveau démocratique (opposition). Ce fut une période très difficile pour les journalistes.

Afrique du Sud — Ces derniers mois, il y eut beaucoup de controverses englobant les médias. Dans un de ces incidents, le Dr Barney Pityana, président de la Commission des droits de l’homme de l’Afrique du Sud, avait essayé de refuser aux médias de couvrir la Conférence nationale sur le racisme. Il justifia ce refus en disant que si ce sujet était mal présenté, les médias pourraient exposer des faits pour lesquels le peuple n’est pas encore préparé. Inutile de dire que cette interdiction ne fut pas approuvée.

La démocratie requiert la liberté et est soutenue par la liberté. L’écrivain français Albert Camus a écrit: «Une presse libre peut être bonne ou mauvaise, mais l’oppression de la presse est toujours mauvaise». Considérant la situation générale de l’Afrique australe, il semble évident que la région a besoin d’une presse libre et responsable, qui donne au peuple une voix alternative. C’est là la meilleure sauvegarde contre la tyrannie.


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