ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 401 - 01/12/2000

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Ouganda

La malaria n’épargne personne



SANTE


La malaria peut affecter tout un pays. L’Ouganda n’y échappe pas...

Le Dr Sebbaale, directeur d’une clinique privée à Kampala, s’est vu retirer sa licence car l’enfant d’un citoyen influent était mort des suites d’une malaria mal soignée. Il n’était qu’un des 110.000 enfants en dessous de 5 ans qui chaque année meurent de malaria, maladie bien plus mortelle que le sida et catastrophique pour l’économie d’un pays. En Ouganda, on estime qu’elle est la cause de 50% de l’absentéisme au travail.

Dans les années 1960, le système médical ougandais était impressionnant. L’hôpital de Mulago était considéré comme la “Mecque” pour les malades venant du Kenya, du Congo-RDC et de la Tanzanie. Puis ce fut le chaos: les nombreuses guerres civiles du pays et les troubles sociaux sans fin, ainsi qu’un changement du climat, ont contribué à propager à nouveau la maladie.

Le défrichement dans les districts du sud-ouest a entraîné une hausse de la température et favorisé des conditions dans lesquelles la malaria peut se développer. D’après la NEMA (Administration du contrôle de l’environnement national, un organisme gouvernemental qui s’intéresse surtout aux problèmes d’environnement), la propagation de la malaria résulterait de la déforestation et des excavations de puits à briques et de mares à poissons, terrain idéal de reproduction pour les moustiques. On peut donc s’attendre à des conflits entre les besoins de l’économie et l’éradication de la maladie. Mais tout d’abord il faudrait réduire les ravages environnementaux, causés par l’homme, qui favorisent la malaria.

Constructions de barrages

Un exemple: la construction d’un barrage occasionne des inondations et un accroissement des régions recouvertes d’eau, terrain de reproduction de la malaria et d’autres maladies propagées par l’eau. En Ouganda, il y a au moins six barrages en projet et on frémit en pensant aux ravages que ces barrages pourraient occasionner après leur construction.

Loti Pottinges, membre du “Réseau international des rivières”, basé aux Etats-Unis, s’inquiète des effets environnementaux que peut produire la construction de trop de barrages dans une région trop petite. «L’exploitation du Nil pour des stations hydroélectriques et pour le tourisme ouvre de larges perspectives; mais je me demande si on a suffisamment évalué le prix que l’Ouganda devra payer. L’Ouganda a-t-il tous les éléments en main pour se rendre compte des effets que causeraient trois barrages sur une distance de moins de 4 km?».

Pottinges et beaucoup d’autres écologistes internationaux s’opposent à la construction du barrage de Bujagali de 450 millions US $, capable de produire 250 MW, surtout à cause des effets environnementaux à long terme et à grands risques pour la santé. Ce barrage sera à moins de 5 km du barrage de Owen Falls et d’un autre barrage d’extension, tous les deux capables de produire 480 MW.

L’Ouganda projette d’exporter de l’électricité dans les pays voisins, dit le président Museveni, qui pousse à la construction du barrage de Bujagali, financé par des intérêts américains. Il est encore plus intéressé par l’argent que cela rapportera et par le prestige du projet. «Après tout, le cumul de projets ne peut qu’améliorer les soins de santé». Mais on peut se demander si les dirigeants ougandais savent où ils mènent le pays. Pottinges souligne le danger sanitaire causé par ces grands barrages, parce qu’ils favorisent la propagation de maladies telles que la bilharziose. «Les gens doivent être conscients des aspects négatifs attachés à la construction de ces grands barrages», dit-il.

Des médicaments inefficaces

Le manque d’un contrôle valable des médicaments importés met en danger la vie des gens. Certaines autorités sanitaires auraient permis l’usage des médicaments venant surtout de l’Inde, qui pourtant manquent de composition chimique adéquate. L’Ouganda est ainsi devenu un paradis pour toutes sortes de marchands de médicaments. Les médicaments d’origine indienne sont très populaires parce qu’ils sont bon marché. Mais certains inefficaces et beaucoup d’Ougandais en ont mauvaise opinion. «J’ai eu la malaria et j’ai pris des médicaments pendant des semaines, sans résultat», dit Semugooma Fred. «C’est alors que mes amis m’ont dit que les médicaments venant de l’Inde ne sont pas efficaces». C’est pourquoi des pharmaciens sans scrupules et des médecins, ayant encore une grande provision de ces médicaments, ont essayé d’en changer l’étiquette, trompant ainsi le client persuadé que le médicament vient de Grande-Bretagne ou d’Allemagne, où les médicaments sont très chers mais très appréciés. L’existence d’un personnel médical malhonnête est un gros problème, et de plus en plus les diplômes médicaux ougandais sont examinés minutieusement.

Extirper la malaria

Pour chasser la malaria, il ne faut que quelques techniques simples. Certains endroits de Kampala très fréquentés, favorables à la réproduction des moustiques, devraient être débroussaillés. La migration des gens des régions rurales vers les villes devrait aussi être endiguée. D’après les statistiques, la plupart des résidents de Kampala vivent dans des endroits surpeuplés, ce qui facilite la propagation de la malaria.

Le gouvernement a fait quelques efforts pour lutter contre la maladie. Dans son budget, le ministre des Finances, Gerald Sendawula, a annoncé une réduction des taxes à l’importation sur les moustiquaires. Mais seulement 5% des Ougandais s’en servent, et pourtant des moustiquaires imprégnées d’un insecticide peuvent sauver des tas de vies, comme le démontrent les chiffres venant d’autres pays.

Un autre défi pour le gouvernement est de rétablir la confiance dans le système sanitaire du pays. Les Ougandais ne sont pas très enclins à consulter un médecin en cas de maladie. On sait que des membres du service médical peu scrupuleux ne donnent que des moitiés de doses, pour que le patient revienne. Restaurer la confiance dans les services médicaux est une priorité absolue et les gens doivent apprendre à se faire soigner le plus vite possible.

Le gouvernement reconnaît qu’il a trop tardé à adopter une bonne stratégie contre la malaria. Le premier pas à faire est celui des médicaments appropriés. On a créé un centre de contrôle pour la gestion des données de toutes les recherches sur la malaria et pour développer la recherche en rapport avec ce programme. Un système d’alarme et de surveillance devrait être prévu et mis en œuvre à partir de la plus petite unité politique. Les 49 districts de l’Ouganda doivent préparer et mettre en œuvre des plans de prévoyance pour les mesures à prendre en cas d’une malaria épidémique; ils seront aidés par les centres nationaux de contrôle et de surveillance épidémiologique. Le gouvernement cherche aussi de l’aide venant de l’extérieur pour sa campagne contre la malaria, mais beaucoup de scientifiques sont d’avis que des attitudes d’autonomie seraient plus efficaces pour éradiquer le fléau.


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