ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 405 - 01/02/2001

CONTENTS | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS


 Cameroun
Le défi de la salubrité



VIE SOCIALE


La campagne contre l’insalubrité, l’opération “villes propres”, a été relancée

Trottoirs encombrés et transformés en espaces commerciaux, jardins publics devenus des pâturages, ronds-points érigés en aires de jeu par des enfants de la rue, chaussées rétrécies provoquant des embouteillages, gares routières spontanées devenant des îlots de désordre... Tout visiteur qui débarque à Yaoundé ou à Douala, à Garoua ou à Bafoussam et dans les autres grandes villes du Cameroun, est choqué par ces images bizarres de l’occupation anarchique des lieux publics. Des images appelées à disparaître progressivement grâce à l’opération “villes propres” que vient de relancer le gouverneur de la province du Centre, sous l’impulsion des ministères de la Ville et de l’Administration territoriale.

Cette croisade n’est pas une innovation. Il s’agit en effet d’une vieille campagne, qui illustre depuis de longues années les rapports conflictuels entre les communautés urbaines de Yaoundé et de Douala et les commerçants du trottoir. Au lendemain de la création du ministère de la Ville, en 1997, cette dynamique avait déjà amené M. Antoine Zanga, alors en charge de ce département, à conduire un vaste mouvement de libération des trottoirs.

Le “réaménagement” gouvernemental de mars 2000 a donné un nouvel élan à la gestion des cités. Le ministère de l’Administration territoriale a demandé aux préfets, dans leurs départements respectifs, de s’impliquer dans la supervision «personnelle du déroulement des campagnes hebdomadaires d’hygiène et de salubrité, avec obligation de dresser des rapports subséquents». Ces recommandations ont permis d’atteindre une étape importante dans la restauration des campagnes d’hygiène et de salubrité hebdomadaires obligatoires, et la détermination de laisser les trottoirs aux seuls piétons et la chaussée aux seuls véhicules.

De plus, les mesures d’accompagnement sont légion: multiplication des bacs à ordures sur les différentes artères et à l’entrée des édifices publics; interdiction absolue de laisser traîner les papiers d’emballage sous peine d’amende; constitution des groupes de nettoyage dans les marchés des grandes villes; obligation faite aux propriétaires des immeubles riverains des rues principales de procéder au renouvellement de leur peinture tous les ans; édification, enfin, de barrières aussi esthétiques que rigides autour des jardins publics, des ronds-points et des bâtiments administratifs.

En outre, une vaste entreprise de réhabilitation de la voirie municipale des villes de Yaoundé et de Douala est en cours, afin d’améliorer l’état des routes existantes. Ceci est un des aspects importants du volet “Infrastructures” du Programme triennal de lutte contre la pauvreté, élaboré conjointement par le gouvernement camerounais et les institutions financières de Bretton Woods, dans l’optique de l’admission du Cameroun au sein des pays devant bénéficier de la remise de leur dette.

La salubrité par la répression.

Au fil du temps, à Yaoundé notamment, les actions dont l’objectif est d’embellir la capitale et d’en améliorer la circulation routière avaient perdu de leur efficacité. «Parce que les interventions ne sont pas suivies de manière systématique, les populations réinvestissent aujourd’hui les positions abandonnées hier», indique le délégué auprès de la communauté urbaine de Yaoundé. C’est pour cette raison que la formule actuelle se veut différente. Des mesures répressives devront intervenir dans la lutte afin de favoriser les efforts du gouvernement: «les marchandises seront saisies, et nous allons engager des poursuites judiciaires», précise le gouverneur de la province du Centre, Etame Massoma. Cette phase répressive se veut conforme aux dispositions de la loi, qui classe l’occupation des lieux publics parmi les délits répréhensibles.

L’opération a désormais un caractère permanent, les forces de l’ordre étant invitées à inscrire la libération de la chaussée, des trottoirs, les parvis des édifices publics et des lieux de culte au rang de leurs missions quotidiennes. Aujourd’hui, on assiste à la destruction des kiosques précaires, des étals et autres caisses en bois ou en cartons qui peuplent les différents coins de la capitale du Cameroun.

Vers la fin des villes villageoises

Avec l’opération “villes propres”, on veut inculquer aux Camerounais une véritable culture de la ville. Une nouvelle attitude citoyenne à laquelle les Camerounais sont constamment conviés par des écriteaux et affiches présents sur tous les points sensibles de la capitale. Ceux-ci invitent à «jeter les ordures dans les bacs et à dénoncer les contrevenants aux agents communaux» ou à «cultiver le réflexe BAO» (bac à ordures). Mieux, il s’agit d’en finir avec ces “villes villageoises” où des bergers ont pris l’habitude de faire paître leurs moutons sur le gazon des jardins publics, où des espaces verts deviennent très rapidement des champs de fortune, où des ménagères réchauffent leur ndolè (une sorte de légume local pour assaisonner les sauces) ou leur tapioca sur les devantures des édifices publics et sèchent leurs habits sur le parvis des églises, où on braise la viande devant l’entrée des mosquées, et où les maîtres-bottiers du dimanche vendent leurs souliers en plein rond-point.

Il est donc question d’en finir avec les cités offrant des images bucoliques. D’où cette explication du ministre de la Ville: «La ville camerounaise de demain devra cesser d’être cette fête foraine où il est permis à tous les clowns d’arriver à l’heure qui leur convient pour mettre à jour le numéro de leur choix».

Pour l’heure, l’opération “villes propres”, enclenchée le 23 octobre 2000, reste encore perçue par une bonne frange de la population comme une simple opération de lustrage de ce pays qui accueille le très important sommet France-Afrique à l’aube de 2001. Pour l’opposition camerounaise, dont l’essentiel des militants se recrute au sein des commerçants, il ne s’agirait que d’une opération de charme du parti au pouvoir en prévision des échéances électorales (municipales) prévues en janvier 2001. Mais selon les observateurs, il était temps de donner une image plus positive de nos cités par la mise en place d’une ère nouvelle où toutes les villes camerounaises vont cesser d’être des villages de brousse.


SOMMAIRE FRANCAIS | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS


PeaceLink 2001 - Reproduction authorised, with usual acknowledgement