ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 405 - 01/02/2001

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Malawi
Les femmes et la propriété foncière


FEMMES


Les femmes constituent plus de 50% de la population mondiale.
Elles font les deux tiers du travail, ne reçoivent qu’un dixième du revenu mondial 
et ne possèdent que 1% des ressources mondiales

La plupart des femmes de l’Afrique australe sont engagées dans l’agriculture, et pourtant elles ne possèdent pas la terre qu’elles cultivent et même n’en contrôlent pas les revenus. Plus de 70% des foyers ruraux dépendent des femmes, qui sont chargées de toute la production de la nourriture et de sa préparation. Leur travail comprend également le binage, le sarclage, et même la pêche.

Mais quand on parle de l’économie du pays, tout cela est ignoré; quand on calcule le produit intérieur brut du pays, la plupart des femmes sont cataloguées comme “économiquement non actives”. D’ailleurs, le fait que les femmes portent et nourrissent les enfants, n’est jamais pris en compte.

Dur travail — peu de contrôle

Bien que les femmes fassent presque tout le travail, elles contrôlent bien peu des ressources du pays. Au Malawi, par exemple, les femmes constituent 52% des 10 millions de la population; 85% d’entre elles travaillent dans l’agriculture, qui est la base de notre économie.

La directrice du Comité des libertés civiles (CILIC), Emmie Chanika, nous parle des problèmes qu’ont les femmes quant à la propriété des terres. Dans le cadre traditionnel, dès son mariage, la femme dépend totalement de son mari. L’homme ne comprend pas que le fait d’être chef de famille ne lui donne pas la liberté de s’octroyer les biens de sa femme, y compris la terre dont elle pourrait-être la propriétaire. Lorsqu’il apprend qu’un mari est décédé et que sa famille veut s’emparer des terres de la femme, le CILIC conseille à celle-ci d’aller au tribunal ou bien chez le commissaire du district, qui l’aideront si vraiment le terrain lui appartient en propre. Le CILIC l’assistera aussi avec toute la paperasserie. «Ceci pour légaliser la propriété. Dans des cas plus compliqués, nous nous adressons au tribunal de grande instance qui peut engager des poursuites contre ceux qui se sont emparés de la terre de la plaignante».

Voici un cas typique. Grace Fundi, une veuve résidant au village de Ndanga, dans le district de Mulanje, était le seul enfant de sa famille. A la mort de ses parents, en 1960, elle hérite de toute la terre qu’ils possédaient. Les problèmes ont commencé quand elle se maria, en 1970, car son mari prit le contrôle de toutes ses terres. Elle raconte: «J’ai failli perdre tout ce qu’il restait de mes terres, mon défunt mari en ayant déjà vendu une partie et distribué une autre à certains membres de sa famille, venus s’installer dans notre village. Chaque fois que je lui en faisais des reproches, il répondait qu’en tant que chef de famille il avait le droit de contrôler nos biens. Quand je m’obstinais à défendre mes droits, il menaçait de divorcer. A sa mort, sa famille a voulu s’emparer de toutes mes terres. Heureusement le chef du village est intervenu. Je ne connais pas ces lois qui protègent nos droits sur la terre, et le chef du village non plus d’ailleurs, si jamais elles existent».

La dot

Dans le nord du Malawi, on paye une dot avant le mariage et, après leur mariage, les femmes n’ont plus grand-chose à dire quant à la propriété des terres. Celles-ci sont considérées comme étant la propriété du mari. A sa mort, ce n’est pas la femme qui hérite, mais les frères du défunt mari. Si le ménage a des garçons et des filles, ce n’est pas la veuve qui hérite ni même les filles, mais seulement les garçons.

Un chercheur de l’université du Malawi, Paul Kakhongwe, note que les femmes pour qui la dot (lobola) à été versée sont souvent maltraitées. La lobola est une des causes du rang inférieur que les femmes occupent dans la maison de leur mari. Ce problème d’infériorité s’entremêle avec d’autres facteurs qui contribuent à garder la femme subordonnée, y compris en ce qui concerne le droit de propriété. «Un autre facteur est la loi coutumière qui ne permet pas aux femmes d’hériter les biens de leur défunt époux. Ainsi les femmes sont souvent victimes de la parenté du défunt, qui s’empare de tout ce qu’il avait. Il est malheureux que le Malawi, un pays moderne soi-disant fondé sur la démocratie et des droits égaux pour tous les citoyens, connaisse toujours un système politico-légal basé sur l’héritage patriarcal».

Le silence de la loi

Ofwa Kalolokesya, avocat au Centre de conseils, recherches, éducation et réhabilitation (CARER ), dit que, bien que la loi donne aux hommes et aux femmes les mêmes droits sur la propriété foncière, la pratique est bien différente. CARER intervient en médiateur dans des cas d’accaparement de terres, surtout après la mort du mari. Le gouvernement doit absolument entreprendre une réforme foncière saine et complète pour donner aux femmes les mêmes droits de propriété.

Le gouvernement a l’intention de lancer une nouvelle réforme foncière pour remédier au déséquilibre dans la distribution et la propriété des terres, surtout dans les districts à forte densité de population. Toutefois, même si la Constitution du Malawi donne les mêmes droits aux femmes, on est généralement convaincu qu’en pratique l’influence des institutions gouvernementales, octroyant des droits égaux à tous les citoyens, est bien limitée.


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