ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 408 - 15/03/2001

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Burkina Faso
Un plan décennal comme thérapie


EDUCATION


Un diagnostic de l’école burkinabé a abouti à l’adoption d’un plan décennal
de développement de l’éducation de base

Depuis le 2 octobre 2000, les élèves burkinabé ont repris le chemin de l’école. Mais ce fait n’occulte pas les tristes réalités auxquelles est confrontée l’école burkinabé. En effet, outre la crise sociale qui secoue le pays depuis le 13 décembre 1998, date de l’assassinat du journaliste Norbert Zongo, un acte crapuleux qui a occasionné de sérieuses perturbations scolaires (des mois entiers de grève), il faut dire que l’école burkinabé est dans l’impasse. Ces dernières années, elle enregistre ses taux les plus bas de réussite scolaire. Cette baisse de niveau, aux dires des pédagogues, est liée à l’inadaptation du système éducatif à son environnement économique, culturel et social. De nos jours, les langues se délient de plus en plus pour critiquer le système éducatif en cours. Un diagnostic a abouti à l’adoption d’un plan décennal de développement de l’éducation de base en 1999.

Un mot d’histoire

Le Burkina Faso a vu la création de ses premières écoles au début du siècle dernier. Les premiers établissements scolaires de Ouagadougou, Gaoua et Tenkodogo se sont ouverts entre 1898 et 1903. L’implantation de ces “embryons d’écoles” était le fait des militaires qui en assuraient la direction avec l’aide d’interprètes. L’arrivée de quelques enseignants qualifiés a ensuite fait disparaître ces écoles de postes au profit d’écoles de village et d’écoles régionales. D’autres écoles encore furent créées par les missionnaires. Etant donné le sérieux de ces établissements, leurs fondateurs reçurent même le mandat des responsables administratifs pour prendre en main la formation des cadres militaires en ce temps. La collaboration ira bon train jusqu’en 1909, date à laquelle en France la Chambre des députés adopta des lois consacrant la séparation de l’Eglise et de l’Etat.

Au titre de l’année 1949, il fut accordé à l’actuel Burkina Faso 79 écoles primaires mixtes, dont 20 privées; 10 écoles de filles, dont 7 privées; 3 écoles modernes et un cours normal. Tous ces établissements, qui réunissaient au total 8.355 élèves représentant un taux de scolarisation de 2%, étaient organisés autour de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso.

L’indépendance du pays en 1960 n’apportera pas de modifications profondes au fonctionnement du système scolaire. Il faudra attendre 1965 pour voir l’adoption d’un nouveau texte, le décret 289 bis, réorganisant l’enseignement dans le territoire. Les différentes composantes du système scolaire vont fonctionner sur la base de ce décret jusqu’en 1996, année de l’adoption de la loi d’orientation de l’éducation. Avant cela, il faut dire qu’à défaut de pouvoir réaliser une réforme approfondie de son système éducatif, le Burkina avait procédé à des aménagements de ses différents programmes d’enseignement.

La longue marche

En 1976, tenant compte des critiques exprimées contre le système, les bases d’une première réforme furent posées dans le pays à travers l’élaboration d’un document intitulé “réforme de l’éducation, dossier initial”. Cette réforme proposait un enseignement préscolaire pour assurer l’éveil des enfants, un cycle d’enseignement de base d’une durée de huit ans, et un cycle de spécialisation et de recherche. L’objectif primordial de cette réforme était de réussir la liaison entre la formation et la production. Le projet entrera dans sa phase expérimentale à partir d’octobre 1979 avec l’appui de l’UNESCO et du PNUD . Basée sur l’utilisation des langues nationales comme support d’enseignement, cette réforme connut un triste sort et fut abrogée par le Conseil national de la révolution en septembre 1984, pour “non-conformité avec les réalités et les aspirations des populations qui dénonçaient la ruralisation de l’école”.

La Révolution démocratique et populaire (RDP) lance alors une nouvelle réflexion, en 1984, qui devait aboutir à la mise en place d’un système éducatif démocratique et populaire. Au nombre des innovations proposées on pouvait lire: “Elle devra déboucher sur la transformation de l’école en un instrument au service de la Révolution. Les diplômés qui en sortiront devront être non au service de leurs propres intérêts et des classes exploiteuses mais au service des masses populaires”. Malheureusement cette réforme, qui prônait un changement radical par rapport au système en vigueur, rencontrera l’opposition d’une certaine élite. Tout cela a conduit à son annulation en septembre 1986, en raison du coût exorbitant occasionné par la multiplication des centres techniques et professionnels.

Ces diverses tentatives, comme on le voit, traduisent la persistance d’une insatisfaction et d’une situation de crise au sein du système éducatif burkinabé. Pour en sortir, on multiplia des ateliers de réflexion dont celui qui a porté sur “l’évaluation de l’éducation de base” tenu en 1989 et qui a défini l’éducation de base comme étant un “processus destiné à dispenser à tout Burkinabé un minimum éducatif correspondant aux besoins et potentialités du pays. Elle doit être la base d’une éducation permanente et intégrale qui vise à améliorer les conditions d’existence et à assurer la promotion individuelle et collective”. La mise en œuvre de ces recommandations a abouti à la création de classes multigrades et de classes à double flux expérimentées depuis la rentrée scolaire 1992-1993, alors que des écoles bilingues démarraient à la rentrée 1999-2000. Ces innovations aujourd’hui portent leurs fruits en ce sens qu’elles ont permis de scolariser beaucoup d’enfants à moindre coût.

Mais les difficultés perdurent. Le système éducatif burkinabé n’arrive pas à résoudre tous ses problèmes. Les difficultés qui se posent à l’enseignement primaire agissent négativement sur l’enseignement secondaire, et ensuite sur le post-secondaire. L’invalidation de l’année universitaire 1999-2000 et la fermeture de l’université de Ouagadougou (suite aux multiples grèves) ne sont qu’un côté du problème. Les maux du système éducatif sont de plusieurs ordres. Pour y remédier il fallait faire un diagnostic sans complaisance. C’est ce qui a été fait en 1999 et qui a aboutit à l’adoption du Plan décennal de développement de l’éducation de base, devenu le cadre d’orientation pour les activités à mener pendant la période 2000-2009.

Une éducation pour tous

Document cadre de politique nationale en matière d’éducation de base, le Plan décennal poursuit quatre grands objectifs:

Ce plan décennal relève donc notamment que l’éducation de base non formelle sera repensée et réorganisée après une évaluation scientifique de sa situation. Ce système doit être désormais perçu à la fois comme un outil de développement local et un instrument de promotion scolaire, en particulier dans les zones où la demande est faible.

Pour l’exécution de ce plan qui s’étend sur une période de dix ans (2000-2009), il est prévu trois phases triennales successives. La première phase consacrera la poursuite du programme d’expansion de l’éducation de base pour atteindre des taux bruts de scolarisation (50%), d’alphabétisation (31%) et de scolarisation des filles (44%). Dans la deuxième phase, l’action visera à poursuivre l’effort d’expansion de l’enseignement formel pour atteindre un taux de scolarisation de 58,5%, dont 52% pour les filles, et de l’enseignement de base non formel pour atteindre le taux d’alphabétisation de 37%, ainsi qu’à la mise en œuvre des conclusions et résultats des études réalisées en phase I. Dans la troisième phase, il est prévu de consolider les actions d’expansion du système éducatif de base, d’améliorer sa qualité et pertinence, et de renforcer ses capacités de gestion pour atteindre les objectifs de 70% de taux brut de scolarisation et de 40% de taux d’alphabétisation en 2009. Le taux de scolarisation des  filles devra atteindre le seuil de 65% en fin de plan.

Comme on le voit, l’exécution de ce plan met en exergue la volonté des responsables des enseignements burkinabé de développer des initiatives pour faire sortir le système scolaire de sa léthargie. Des actions d’envergure sont envisagées: la construction et l’équipement de nouvelles salles de classe par an; le recrutement et la formation de nouveaux enseignants par an; la réduction des disparités entre zones, régions et situations socio-économiques des élèves; la promotion de l’initiative privée. Comme autres actions d’envergure, on peut citer la rétrocession à l’Eglise catholique de centaines d’écoles en avril 2000. Un acte qui souscrit au rôle prépondérant joué par les missionnaires dans l’éducation scolaire burkinabé.

Le Burkina Faso, en matière d’éducation de base, est classé parmi les pays les moins avancés (40,05%). La majorité de la population adulte est analphabète (90% en milieu rural). Le taux d’alphabétisation national reste faible (26%) malgré le nombre croissant des inscrits dans les centres d’alphabétisation. Ceci pose le problème de la qualité de l’enseignement dispensé et celui de sa capacité à s’adapter aux besoins très diversifiés des publics cibles. L’adoption de ce plan décennal de développement de l’éducation de base impose aux responsables burkinabé l’obligation de relever le défi.


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