ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 413 - 01/06/2001

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Ouganda
Les migrants économiques


ECONOMIE


Emigrer pour trouver ailleurs renommée et fortune:
une richesse pour le pays

Il fut un temps où le président ougandais Yoweri Museveni traitait les émigrants économiques de traîtres. Maintenant, il encourage ses compatriotes à quitter leur pays et à tenter de trouver ailleurs une vie meilleure pour eux et leur famille. «L’argent qu’ils envoient au pays, dit-il, aide notre économie et permet à beaucoup d’enfants d’aller à l’école».

Les responsables gouvernementaux sont donc contents et ne décrivent plus les Ougandais qui ont cherché “des nouveaux pâturages” comme étant des pécheurs et de mauvais patriotes. Même l’expression “Nkuba Kyeyo”, employée jadis péjorativement pour désigner des Ougandais partis chercher un travail quelconque à l’étranger, est devenu un compliment. Littéralement cette expression signifie “balayeurs de rues”, mais les personnes ainsi qualifiées l’acceptent volontiers.

Récemment encore, le ministre Gilbert Bukenya a rencontré le Haut Commissaire britannique en Ouganda, pour discuter des perspectives d’avenir des Ougandais qualifiés, travaillant en Angleterre, afin qu’ils puissent envoyer de l’argent chez eux et aider ainsi à améliorer l’économie du pays. L’Angleterre est une destination favorite pour les Ougandais, et les restrictions pour obtenir le visa pour entrer en Grande-Bretagne ont été allégées surtout pour les travailleurs qualifiés.

En effet, la Grande-Bretagne cherche de la main-d’oeuvre qualifiée en certains domaines. «Les médecins sont très demandés ici», dit Grace Bisase, une Ougandaise travaillant en Angleterre. «Pour les Britanniques, il est plus rentable de recruter dans les pays en développement, car former un médecin britannique en Grande-Bretagne coûte bien plus cher».

Même les politiciens promettent du travail outre-mer, dans leur campagne électorale. Nasser Sebaggala, candidat à la présidence, avait promis à des personnes non qualifiées que, s’il était élu, il trouverait du travail pour 100.000 d’entre eux dans les Etats du Proche-Orient. Mais un pays occidental reste la destination préférée, et ceux qui parviennent à obtenir un visa de travail l’exploitent au maximum. C’est là qu’est le danger. Ils en abusent, ils veulent trop en faire, et finissent par devenir des loques humaines. La perspective de tous ces beaux shillings ougandais (le taux d’échange est très favorable) qui leur permettraient de bâtir une maison ou d’acheter des terres, pousse certains à travailler 18 heures par jour, ce qui mène au désastre.

La situation à Kampala

La région de Kampala est l’endroit par excellence pour acheter, grâce à ses livres sterling, du terrain ou des briques et du ciment pour construire. Des terrains en friche sont maintenant pleins de belles maisons. L’expansion des zones résidentielles a dépassé toute attente et les services publics ont toutes les peines à suivre.

La compagnie d’électricité ougandaise (UEB) est un de ces services en difficultés. Elle ne peut pas fournir assez de courant pour connecter jusqu’à 100.000 nouvelles maisons chaque année (ce sont les chiffres du gouvernement). La Société nationale des eaux et des égouts, est un autre service avec les mêmes problèmes. Elle n’arrive pas à fournir un système d’égouts à certains de ces nouveaux faubourgs de Kampala, même à Muyenga, un faubourg de gens riches. Evidemment, les résidants ne sont pas contents. Muyenga a été mal planifié et développé, des nouvelles maisons ont été construites dans tous les sens. Les rues ne sont pas adaptées et les visiteurs éventuels ont toutes les peines du monde pour arriver à destination. D’après les autorités, 600 maisons devront y être démolies, si on veut améliorer la situation. C’est un sujet brûlant, surtout que beaucoup de ces maisons appartiennent à des politiciens!

Le plus gros de l’argent venant d’outre-mer sert à payer des nouvelles constructions. Kampala ne fait que s’étendre. La cité qui avait été à l’origine “construite sur sept collines”, s’étend maintenant sur 21 collines. Cette expansion, jamais vue jusqu’ici, est devenue un cauchemar pour les services publics! Les plus chics sont les quartiers de Nakasero et de Kampala, tous deux en haut d’une colline, non loin du centre de la cité. Ce sont des quartiers jouissant d’un environnement agréable et de grands jardins. Autrefois, ils avaient été réservés aux communautés asiatiques et européennes et aussi à quelques fonctionnaires de haut rang. Les maisons sont bien construites et entretenues. D’autres faubourgs, comme Mbuya et Naggulu, sont aussi en voie d’amélioration.

L’exode des cerveaux

Beaucoup de professionnels et de travailleurs qualifiés quittent le pays pour chercher fortune ailleurs. Selon le Dr Japheth Nzaramba, il n’y a plus que 910 médecins qui travaillent au pays, et le rapport médecin-patients ne fait qu’empirer, bien que l’Ouganda forme plus de médecins qu’auparavant. Il explique: «Beaucoup d’entre nous auraient préféré être patriotes et rester au pays, mais voyez ce que gagne un médecin chez nous! Cela ne vaut pas la peine de travailler en Ouganda». La même situation s’applique à l’exode des enseignants. Le système d’éducation de l’Ouganda est désespérément à court d’enseignants dans le secondaire et les hautes écoles. Et la situation est devenue encore plus critique à cause du nombre croissant des élèves dans les écoles primaires, suite à l’aide donnée par les bailleurs de fonds pour universaliser l’éducation primaire. On s’attend à ce qu’en 2003, un million d’élèves entreront dans les écoles secondaires, alors que leur capacité actuelle n’est que de 490.000 élèves.

Malgré tout, cela n’a pas l’air d’inquiéter Museveni. Pour lui, ce qui importe c’est que les travailleurs qualifiés émigrés envoient leur argent au pays; c’est un signe que l’Ouganda profite de l’âge de la globalisation.


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