CONTENTS | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS
Ouganda |
FINANCES
Petit à petit, le dollar US devient un moyen de paiement en Ouganda.
Il
a la préférence du gratin de la société ougandaise et des propriétaires
asiatiques de Kampala...
Le shilling ougandais continue à s’effriter et progressivement le dollar prend sa place. En 1987, le président Museveni avait introduit une réforme de la devise, pour remplacer l’“ancien” shilling par un “nouveau” shilling. Appelé le “dollar Museveni”, le nouveau shilling valait 100 anciens et le dollar US valait 65 shs nouveaux. Depuis lors, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts: un dollar vaut maintenant 1.750 shs. Selon le Dr Suruma qui dirige le bureau économique du Mouvement de la résistance nationale (NRM, au pouvoir) et qui a été gouverneur adjoint de la Banque centrale de l’Ouganda, le shilling s’est déprécié de 3.000%.
“Celtel”, qui a été la première compagnie de téléphonie mobile à s’installer à Kampala (en 1995) et qui compte 27.000 abonnés, établit actuellement ses prix en dollars US. Le service de télévision par câble de l’Afrique du Sud Multi-Choice, qui a 5.000 abonnés, fait de même. Beaucoup de propriétaires dans des banlieues chic exigent que les loyers soient payés en dollars. Cette pratique s’est étendue à d’autres secteurs de la capitale: les propriétaires au centre ville de Kampala demandent aussi que tout soit payé en dollars. C’est le cas par exemple de City House, un grand bâtiment géré par Sudhir Ruperalia, un Indo-Asiatique dont les locataires sont des petits commerçants. Ceux-ci grincent littéralement des dents de frustration car, à cause de l’instabilité du shilling, les affaires vont mal et les loyers deviennent de plus en plus élevés.
Des hommes d’affaires bien établis sous-louent leurs magasins à des petits commerçants pour une somme de $100 par mois, pour une petite parcelle. Ceux qui ont réussi, trouvent ridicule de vouloir continuer à faire du commerce en Ouganda, et la plupart dirigent leurs activités vers les pays avoisinants pour échapper aux taxes trop élevées.
En octobre 2000, dans l’espace d’un mois, la «question dollar» a obligé 80 personnes à fermer leurs entreprises. Ceux qui ont réussi malgré tout à garder la tête au-dessus de l’eau, ont du faire face à Sudhir, qui leur disait de vider les lieux s’ils ne parvenaient pas à payer les loyers. Il faut souligner que Sudhir est le propriétaire de la plupart des bâtiments stratégiques à Kampala et qu’il a beaucoup d’influence dans les cercles gouvernementaux. En conséquence, il n’y avait pas beaucoup de places où aller, sans tomber dans ses mains... Le gouvernement a dit aux commerçants qu’ils devaient s’adapter aux nouvelles mesures économiques. Mécontents, beaucoup d’entre eux ont voté contre Museveni lors des dernières élections présidentielles.
L’Ouganda est un des pays africains que les institutions de Bretton Woods ont mis en évidence, le citant comme un exemple de réussite économique. Le pays s’est soumis à toutes les exigences imposées par ces institutions, sans en changer un iota. Ces exigences comprenaient entre autres l’ouverture de son économie et la libre circulation des devises étrangères. Alors, dans certains quartiers, on trouve que le shilling est bon à être jeté à la poubelle. En fait, le shilling ougandais est faible, surtout parce que la production ne suffit pas pour le soutenir.
Diversifier l’économie
Frank Griffith, directeur de la Barclays Bank et président de l’Institut des banquiers de l’Ouganda, a critiqué «la dollarisation» de l’économie ougandaise, qui a créé un manque artificiel de devises étrangères, rendant ainsi la vie très difficile aux importateurs. Il y a eu un temps où les devises étrangères dépendaient surtout du café, qui rapportait 65% des ressources. Mais le café a reçu un vilain coup sur le marché mondial. L’Ouganda se rend compte qu’il perd de plus en plus son avantage compétitif, surtout à cause du manque de main-d’œuvre, lié aussi à la pandémie du SIDA.
On a essayé de diversifier les exportations. Parfois avec précipitation. Le récent embargo européen sur le poisson ougandais a coûté $100 millions à l’économie du pays. En fait, l’Ouganda a peu de choix pour diversifier ses exportations. Il s’est tourné maintenant vers les mines. La Banque centrale a mis $15 millions à la disposition d’hommes d’affaires qui pourraient mettre sur le marché d’autres produits, mais sans beaucoup de succès.
La bureaucratie ougandaise constitue un vrai cauchemar pour les investisseurs potentiels. Après cela, il y a encore des tas de problèmes à régler, tel que le système téléphonique notoirement peu fiable et le droit foncier qui ne fait rien pour assurer les investisseurs. Les étrangers n’ont pas le droit de posséder des terres. Ils ne peuvent que les prendre à bail. Aussi, ce n’est pas étonnant qu’ils laissent le pays à d’autres.
Encourager les firmes locales
Par ironie du sort, les investisseurs locaux n’ont pas la vie facile parce que le gouvernement leur préfère les investisseurs étrangers. Pourquoi donne-t-il des réductions généreuses de taxes aux investisseurs étrangers et s’en prend-t-il aux investisseurs locaux? «Il faut que le gouvernement comprenne qu’à long terme ce sont les locaux qui seront les plus intéressés dans le progrès économique de ce pays», dit Tona Kanyomozi, économiste et ex-ministre. «Si des problèmes arrivent ici, les investisseurs étrangers prennent le premier vol disponible et s’en retournent chez eux».
Les industriels locaux ont essayé à maintes reprises d’insister sur ce point, à chaque rencontre avec les officiels du gouvernement. James Mulwana, ancien président de l’Association des industriels de l’Ouganda, qui compte 500 membres, a dit à Emmanuel Mutabile (alors ministre des finances et actuellement gouverneur de la Banque centrale), qu’il n’est pas juste de faire subir la concurrence des étrangers à des firmes ougandaises qui se battent pour démarrer. Il pense qu’il faut maintenir, du moins pour le moment, les taxes sur les produits importés, afin de permettre aux firmes locales de grandir. Il dit aussi que les industriels ougandais sont sur-taxés: ils payent 40% des taxes perçues alors qu’ils contribuent à 10% de la production économique du pays.
Il faudrait qu’on écoute un peu mieux des gens comme Mutabile!
SOMMAIRE FRANCAIS | ANB-BIA HOMEPAGE | WEEKLY NEWS