ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 417 - 01/09/2001

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Afrique
Lutte contre une mondialisation néolibérale


MONDIALISATION

Ils sont sept Africains du sud du Sahara, membres de l’association “Nord-Sud XXI”.
Comme les autres personnalités (une quarantaine) de divers coins du monde, 
ils sont engagés dans un vaste mouvement mondial de promotion des droits de l’homme et des peuples. 
La lutte contre une mondialisation néolibérale constitue l’axe central de l’association.

Les Sénégalais Mamadou Dia (ancien président du conseil des ministres) et son épouse Oulimata Bâ Dia, les Burkinabé Joseph Ki-Zerbo (historien) et Halidou Ouédraogo, la Malienne Aminata Traoré (ancien ministre de la Culture), la Burundaise Laurence Ndadaye (épouse du défunt président Ndadaye) et le Béninois Mohamed Abdou, sont les membres africains du sud du Sahara de l’association “Nord-Sud XXI” (21e siècle). D’après les statuts, l’objet de cette ONG internationale est de «promouvoir les droits de l’homme et des peuples, tels qu’ils ont été définis par l’ensemble des déclarations et chartes internationales et nationales, représentant un patrimoine commun de l’humanité, qu’il s’agit d’enrichir en permanence, de diffuser et de rendre effectif au profit de l’ensemble de la communauté humaine».

C’est sur cette base que se sont associées, à titre personnel, des personnalités de haut rang de tous les continents, connues pour leur engagement résolu et désintéressé à la cause des droits de l’homme et des peuples. Outre les Africains cités plus haut, on compte parmi les membres l’ancien chef d’Etat algérien Ahmed Ben Bella (qui assure la présidence de l’association depuis octobre 2000), le Marocain Mustafa Kabbaj, l’ancien ministre égyptien Mohamed Fayek (actuel secrétaire général de l’Organisation arabe des droits de l’homme), le Libyen El Nouri Houmeidi, Souha Béchara du Liban, Romesh Chandra de l’Inde, Ayma Evo Morales de Bolivie... Du nord de la planète, les membres viennent de la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, la Suisse, les Etats-Unis, Chypre, Malte...

Toutes ces personnalités «oeuvrent ensemble, en partenaires égaux, respectueux de leurs différences, afin d’éradiquer les fléaux qui nous assaillent de toutes parts et qui ont noms: pauvreté, chômage, maladies de toutes sortes, analphabétisme, obscurantisme, drogues, guerres fratricides, enfants exploités qui, à la fleur de l’âge, n’ont plus d’illusions», comme a souligné Mme Oulimata Bâ Dia lors de la dernière assemblée générale de l’institution, tenue le 5 mai 2001 à son siège à Genève. Mme Dia a aussi dégagé deux objectifs qui lui paraissent prioritaires: «Combler le fossé qui se creuse de plus en plus et qui sépare les populations du Nord et du Sud», et «défendre la démocratie, menacée partout par le règne de l’argent-roi».

«L’objectif primordial de l’association», toutefois, reste celui «de stopper la dérive dans laquelle nous sommes tous entraînés, riches du Nord et pauvres du Sud, par un monde mis à mal par ses turpitudes et la mondialisation de l’économie du marché», a dit le président Mamadou Dia. «Celle-ci, du fait de ses effets pervers, est devenue ruine de l’âme, source de désordres et de violences. Il convient de redonner sens à la vie et aux choses, à la science et à la technologie. En un mot, il faut ré-humaniser le monde, sa culture et sa civilisation, substituer à la théologie du marché et de l’enrichissement sans bornes la mystique de la libération de l’homme et du bien commun».

Alternatif à Davos

C’est dans cette optique que se situe l’action de l’association “Nord-Sud XXI” qui, depuis sa relance en octobre dernier (après quelques années de ralentissement), est particulièrement active dans la lutte contre le mouvement de «mondialisation néolibérale», comme l’affirment ses membres. Le rapport d’activités et d’orientations, présenté à l’assemblée générale du 5 mai, mentionne notamment: «C’est grâce au président de l’organisation ‘Nord-Sud XXI’, Ahmed Ben Bella, qu’est née l’idée de créer un rassemblement populaire international alternatif au sommet de Davos, auquel participent annuellement les grands capitalistes et politiciens de ce monde, afin d’ancrer, au plus profond de nos sociétés, les valeurs du libéralisme». Ce mouvement alternatif, précise le rapport, a connu son apogée lorsqu’à Porto Alegre, au Brésil, des années de réflexion et d’efforts en faveur d’une remise en question totale de cette mondialisation ont été couronnées de succès.

En effet, du 25 au 30 janvier dernier à Porto Alegre, s’étaient donné rendez-vous plus de dix mille participants venus des quatre coins du monde, pour manifester contre la mondialisation fondée sur un libéralisme total. La participation de M. Ben Bella a permis de «renforcer son rôle dénonciateur de la mondialisation libérale menée par les Etats-Unis et l’Occident industrialisé», indique le rapport d’activités de “Nord-Sud XXI”.

L’équivalent européen de Porto Alegre, dit “conférence anti-Davos”, tenu à Zurich le 6 janvier, a également vu la participation de l’organisation avec la présence d’une importante délégation, dont celle du professeur Ki-Zerbo qui y a été le porte-parole de l’Afrique.

Ben Bella participera aussi aux travaux du comité préparatoire de Porto Alegre 2002. Les réunions de ce comité doivent être l’occasion pour “Nord-Sud XXI” de s’affirmer au sein du mouvement international de lutte contre la mondialisation et d’oeuvrer pour une mobilisation des forces sociales plus importante en Afrique, en Amérique latine et dans le monde arabe. En janvier, on avait remarqué leur faible participation, plus particulièrement celle du monde arabe.

L’organisation a pris part aux réunions méditerranéennes «contre les accords de partenariat euro-méditerranéens» au Maroc, les 16 et 17 juillet 2001 et au «Rassemblement international contre la mondialisation» à Gênes (Italie), du 15 au 25 juillet. Elle participera aussi au colloque au sujet de l’eau «ressource naturelle et bien universel» en Jordanie, du 31 octobre au 2 novembre.

Racisme et discrimination

Mais elle sera surtout active dans la préparation de la “Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance”, programmée du 31 août au 7 septembre 2001, à Durban, en Afrique du Sud.

“Nord-Sud XXI” a organisé un colloque à Dakar, du 26 au 28 juin, sur le thème: “Initiative de Gorée: Traite des Noirs et réparation”. Après d’intenses échanges entre experts venus du Sud comme du Nord, cette rencontre a réaffirmé que: «la traite négrière et l’esclavage transatlantique constituent des crimes contre l’humanité, et que par conséquent ils nécessitent réparations sur les plans politique et matériel, comme sur ceux de l’éthique et de la morale». Les participants estiment également que «si l’holocauste juif a été reconnu comme un crime contre l’humanité, il n’y a pas de raison que la traite et l’esclavage des Noirs ne le soient pas». De même, la reconnaissance de l’apartheid comme crime contre l’humanité ne devrait constituer qu’une étape dans celle de la traite négrière et de l’esclavage transatlantique comme tel.

En même temps, la mondialisation a été dénoncée comme une des «formes contemporaines d’exploitation, de servitudes, d’exclusions et de fractures de toutes sortes». Selon Mamadou Dia, «l’esclavage s’est modernisé en revêtant les couleurs de l’émigration, (...) un exode massif des meilleurs cerveaux et des bras les plus solides du continent africain, dans des situations aussi abominables que par le passé».

Les décisions du colloque de Dakar, reprises dans un document intitulé “Initiative de Gorée”, devraient être défendues à Durban par les ONG du Sud et du Nord. Le document spécifie que «la traite des Noirs, l’esclavage et la colonisation constituent les principales sources de racisme» dans le monde et qu’ils «doivent être élargis aux questions de la mondialisation qui véhicule les mêmes structures perverses d’étouffement et de mépris».

Besoins et attentes

Le département de l’information de l’ONU affirme pour sa part, dans un dépliant, que «la mondialisation elle-même comporte des risques qui peuvent conduire à l’exclusion et intensifier les inégalités, très souvent fondées sur des critères raciaux et ethniques». Et “Nord-Sud XXI” de se poser la question: «N’est-ce pas le cas lorsque le Nord, puissant et riche, affronte le Sud, faible et pauvre, et lui impose ses conditions et ses politiques économiques, financières et culturelles?». La mondialisation, constatent ses membres, «tend à imposer une image exemplaire du monde représenté par l’Occident industrialisé; par conséquent, tout ce qui serait différent n’aurait pas la même valeur».

Sans doute, le Sud a-t-il de grands besoins et attend-il beaucoup du Nord. Mais sous quelles formes et à quelles conditions? Mme Oulimata Bâ Dia les a ramassées en quelques mots: «Le Sud a de grands besoins matériels, financiers, technologiques, un grand besoin d’aide désintéressée, sans sacrifice de sa dignité, et le Sud attend beaucoup du Nord. Mais ce que le Sud attend surtout du Nord, c’est l’exemple de la sagesse, concrétisée par le respect de l’autre, par l’utilisation des découvertes à la sauvegarde de la vie et non à la destruction de l’humanité. Ce que le Sud attend du Nord, c’est également la reconversion de son énorme dette — qui pèse indûment et lourdement sur la croissance de ses économies — en financements de projets de développement».

Et Mme Bâ Dia lance une invitation à toute la communauté internationale: «Puissions-nous, par nos actions, faire apparaître en pleine lumière, le multidimensionnel de l’homme, la gravité de son engagement, l’universalité de ses projets, seules garanties d’une paix durable, d’un monde réhumanisé».


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