ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 417 - 01/09/2001

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Swaziland
La dictature n’est pas loin...


DEMOCRATIE

Le «Décret nº 2, 2001»,
publié le 22 juin 2001 au palais Lozith’ehlezi par le roi Mswati III,
ouvre toute grande la porte à la dictature

L’ignoble «Décret nº 2, 2001», qui annule automatiquement toutes les lois disant le contraire, mine tout ce qui dans le pays ressemble – de près ou de loin – aux garanties fondamentales des droits de l’homme.

Tout comme dans le passé, quand le décret de 1973 avait suspendu la Constitution, ce décret draconien interdit toute activité politique et déclare l’état d’urgence dans le pays. Le roi Mswati s’est accordé les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire, s’attaquant aux dissidents politiques et aux médias indépendants. Le pays se trouve maintenant dans une crise constitutionnelle.

Le roi Mswati a peur d’être dépouillé des pouvoirs absolus que lui a octroyés la proclamation royale de 1973. Aussi, bâillonne-t-il tout mouvement de dissidence politique. La haute trahison, les activités subversives et les infractions à l’ordre public (souvent invoquées pour interdire les meetings et les manifestations) ont été ajoutées à la liste des infractions pour lesquelles le juge ne peut octroyer la liberté provisoire sous caution.

Notons qu’un pareil décret de non-octroi de liberté provisoire en 1993 avait été déclaré inconstitutionnel par la cour d’appel.

Récemment, la Haute Cour a relâché sous caution Mario Masuku, président du Mouvement de l’union démocratique du peuple (PUDEMO, clandestin), qui avait été accusé de sédition. Cela s’est produit après que le tribunal de l’industrie avait annulé l’interdiction d’organiser des meetings faite à l’Association nationale des enseignants du Swaziland et à l’Association nationale des fonctionnaires du Swaziland.

Un décret draconien

Le décret du 22 juin stipule: «Nonobstant toute disposition de toute autre loi, le tribunal devra refuser d’octroyer la liberté provisoire sous caution à toute personne accusée de meurtre, viol, vol à main armée ou d’infraction à certaines sections de la loi de 1964 sur les armes de guerre, à celle de 1953 sur la chasse, à celle de 1929 sur les produits pharmaceutiques, celle de 1963 sur l’ordre public, celle de 1991 concernant le vol de véhicules, celle de 1938 concernant la haute trahison, la sédition et les activités subversives, ou tout autre cas où le tribunal jugera qu’il doit refuser la liberté sous caution».

Le décret impose aussi de lourdes peines pour ceux qui «imitent Leurs Majestés, les insultent ou les ridiculisent». Ceci fait suite à de vaines tentatives de poursuite contre le secrétaire de la Fédération des syndicats du Swaziland, Jan Sithole, et ses collègues dirigeants, accusés d’avoir imité le roi lors d’un meeting des travailleurs. (Sithole est souvent accueilli par des coups de sifflets royaux quand il arrive pour adresser la parole aux travailleurs, et il est accompagné d’une escorte de gardes de corps qui lui font le salut et le protègent).

Il y a encore la section 7 du décret, intitulée «Protection du nom et des actions de Leurs Majestés». Elle stipule que toute personne qui désobéit à un ordre donné par l’Ingwenyama ou par le roi conformément à la loi; qui imite, insulte, ridiculise ou outrage; qui permet qu’on lui présente les signes de respect dus seulement à l’Ingwenyama, au roi ou à la Ndlovukazi, sous n’importe quelle forme... commet une infraction et, s’il est reconnu coupable, sera passible d’une amende ne dépassant pas E 50.000 ou d’un emprisonnement de maximum 10 ans ou des deux.

Médias et système judiciaire

L’interdiction des journaux, des revues et des livres ne passe plus par les tribunaux. Le ministre de la Fonction publique et de l’Information n’est plus obligé de donner les motifs pour lesquels il bannit une publication particulière.

Le décret stipule: «Si une publication (revue, livre ou journal ou tout extrait de ceux-ci) est bannie selon les termes de la loi de 1968, le ministre concerné ne doit pas donner de raison ou de fait légal pour une telle proscription. Aucune action en justice ne peut être introduite en relation avec cette proscription».

Ce qui ferme la bouche aux médias indépendants, en particulier le journal The Guardian et le périodique The Nation. Ces deux publications ont contesté un ordre d’interdiction, et surtout le fait que tout recours au tribunal leur a été rendu impossible.

Le système judiciaire est aussi en bute aux attaques. Selon le décret, la nomination des juges de la Haute Cour à été retirée de la compétence de la Commission judiciaire et est maintenant assignée à Sa Majesté le roi après consultation avec le ministre de la Justice. L’âge de la retraite des juges a été confirmé à 65 ans, infirmant ainsi les arguments du président de la Cour suprême disant que sa mise à la retraite par le roi était inconstitutionnelle.

Le décret habilite aussi le procureur général à nommer temporairement des membres de son cabinet en tant que magistrats, en vue de réduire l’arriéré des cas.

Les forces démocratiques et les organisations des droits de l’homme ont exprimé leur désappointement à propos de l’introduction de cet odieux décret. Le Dr Joshua Mzizi, secrétaire général des associations pour les droits de l’homme du Swaziland a dit: «Gouverner avec des lois brutales n’est pas possible dans une société comme la nôtre».


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