ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 427 - 01/02/2002

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Madagascar
Riz et blanchiment d’argent


CORRUPTION

Un fort soupçon de blanchiment d’argent de Ben Laden par l’importation de riz pakistanais
pèse sur Madagascar. La polémique a obligé le président Ratsiraka à démentir la chose.
D’autant que sa famille pourrait y être impliquée...

Madagascar, le plus gros consommateur de riz du monde, a toujours importé du riz pakistanais. Mais cette année son volume a connu une hausse très importante et tout à fait anormale: on est passé de 180.000 tonnes en temps normal, à plus de 310.000 tonnes en début d’année (2001), informe Alphonse Ralison, président du groupement professionnel des industries de riz. En plus, ce riz pakistanais est vendu à un prix défiant toute concurrence sur le marché malgache.

Avec les nouveaux outils d’information et de communication, tous les importateurs connaissent le prix de revient du riz à la sortie du port, qui oscille entre 1.800 fmg (0,27 euros) et 1.900 fmg le kilo. «Comment se fait-il que certains le vendent à 1.300 fmg à la sortie du port?», demande le groupement professionnel. D’autant que les importateurs de ce riz bradé ne sont même pas des professionnels, s’indigne le groupement, mais des bijoutiers pakistanais avec pignon sur rue au centre ville d’Antananarivo.

Depuis la fin de l’année dernière, le président de la République, en son nom personnel, a mis en place dans les quartiers populaires de la capitale des petites gargotes qui offrent à la population défavorisée des repas à prix modique: 250 fmg le plat. En fait, il a toujours procédé à ce genre d’opération à l’approche des élections.

Mais qui approvisionne ces gargotes?, se demande-t-on. Des généreux donateurs, répondent les intéressés sans plus de précision. Il est de notoriété publique pourtant dans la Grande Ile, que les membres de la communauté indo-pakistanaise sont les principaux “bailleurs de fonds” des politiciens à Madagascar, et tout le monde soupçonne les importateurs de riz pakistanais d’être les fournisseurs des gargotes présidentielles qui sont gérées par sa fille.

Ben Laden?

Quelques mois avant les attentats qui ont touché les Etats-Unis, une agence de presse indienne présentait Madagascar comme l’un des pays où Ben Laden blanchit son argent à travers le riz pakistanais. Après les attentats du 11 septembre dernier, face aux interrogations aussi bien nationales qu’internationales, et face à la polémique qui commence à dépasser le territoire national, le président de la République a dû monter au créneau pour démentir ces allégations.

Plus exactement pour déclarer qu’il n’existe pas de preuves tangibles pour affirmer que Ben Laden blanchit son argent dans la Grande Ile à travers le riz pakistanais. Quant au prix du riz bradé sur le marché malgache, il s’agit tout simplement d’un résultat de la loi de l’offre et de la demande, selon l’explication de Ratsiraka. «De toute façon, lance-t-il, si on fait le calcul, le coût du riz pakistanais qui arrive chez nous avoisine les 60 millions de dollars, c’est-à-dire rien du tout face à la richesse de Ben Laden». Une remarque qui a fait tiquer plus d’un.

Les banquiers à Madagascar de leur côté avancent que, pour le moment, ils n’ont pas de preuves sur un éventuel blanchiment d’argent dans la Grande Ile. Mais ils font remarquer qu’il est difficile de contrôler le blanchiment d’argent, s’il y en a. Ceci dans la mesure où l’économie de Madagascar tourne surtout à partir du secteur informel. Et la banque n’intervient qu’au 4ème ou 5ème niveau, si encore elle intervient.

Conséquences

Les conséquences de cette histoire sont multiples. Au niveau international, si jamais les soupçons se vérifiaient, il faut s’attendre à des sanctions des pays occidentaux qui sont nos principaux bailleurs de fonds. Et au niveau national, le monde rural malgache se trouve dans un état tragique, car les paysans n’arrivent plus à écouler leur production sur le marché local. N’ayant pas le choix, ils sont obligés de brader leur production, avec tout ce que cela implique. Pourtant Madagascar est un pays à vocation agricole avec 75% de paysans. Et, comme le riz constitue l’alimentation de base des Malgaches, tous les paysans cultivent du riz. C’est la tradition.

Malheureusement, Madagascar a toujours adopté une politique pour les citadins, qui sont prompts à renverser le régime s’ils sont mécontents et déterminés. Et le riz est une denrée politique depuis toujours. Les paysans pour leur part sont toujours des laissés pour compte, utiles seulement pendant les élections en raison de leur nombre.


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