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POLITIQUE
Un parti politique new-look au Kenya
Le 18 mars 2002, naissait un nouveau parti politique par la fusion de l’Union nationale africaine du Kenya (KANU) et du Parti national pour le développement (NDP). C’était un grand tournant dans la position du leader du NDP, M. Raila Amolo Odinga: de membre de l’opposition radicale, il devenait membre du gouvernement et du parti au pouvoir.
M. Raila est un des ceux qui ont milité pour le multipartisme au Kenya. Suite aux changements à la Section 2-A de la Constitution de 1991, qui avait fait du Kenya un Etat à parti unique, M. Raila était devenu membre du Forum pour la restauration de la démocratie (FORD) dont son père, feu M. Jaramogi Oginga Odinga, était le dirigeant. Le FORD se divisa ultérieurement en deux: le FORD-Asili et le FORD-Kenya. Après la mort d’Oginga, M.Michael Kijana Wamalwa lui succéda à la tête du FORD-Kenya. Il y a eu des divergences d’opinions entre M. Wamalwa et M. Raila. Celui-ci, après avoir pris la tête d’une faction du FORD-Kenya, quitte le parti fin 1996, expliquant qu’il a pris cette résolution pour mettre fin à ses interminables disputes légales avec Wamalwa. Il a remis sa démission au président de l’Assemblée nationale dans une lettre datée du 31 décembre 1996. Déjà le 19 décembre 1996, il s’était fait expulser du parti par son Conseil exécutif.
Lors d’une conférence de presse, M. Raila expliqua qu’il avait quitté le FORD -Kenya, parce que ce parti refusait le changement, mais qu’il n’avait nullement l’intention de se présenter aux présidentielles. Il pensait, toutefois, devoir trouver une forme de gouvernement responsable, humaniste et démocratique. «J’ai quitté le FORD -Kenya tout en sachant que Wamalwa est incapable de me battre dans n’importe quelle contestation politique. Je ne suis pas un lâche, je ne jette pas l’éponge», a-t-il dit. «J’ai décampé parce que les chamailleries prévalaient, et que les solutions politiques ne se trouvent pas dans des procès inutiles. Les membres du FORD-Kenya n’ont rien à dire dans la direction du parti. Ne prenez pas mon départ pour de la lâcheté. Les procès ont été dirigés par une main invisible. J’ai quitté le FORD-Kenya pour créer un précédent dans la création d’institutions démocratiques. J’ose espérer que cela donnera un nouveau ton politique à la société kényane». Ensuite, M. Raila est devenu le leader du NDP. En 1997, il se présente aux élections présidentielles, arrivant à la troisième place après le président Daniel arap Moi et le président du Parti démocratique, M. Mwai Kibaki, leader officiel de l’opposition.
Vers l’union politique
Assez rapidement, M. Raila s’est rapproché de son adversaire politique antérieur, le président Moi, et du KANU, au pouvoir. Dans les deux camps politiques, on l’a montré d’un doigt accusateur comme un “courtisan de l’ennemi”. «Une accusation injuste, répliqua M.Raila. La bataille pour la démocratie est une bataille de longue haleine. Depuis l’arrivée de la démocratie multipartisme en 1992, nous avons parlé contre les autres, et non pas avec les autres. Il est temps qu’il y ait un peu de bonne volonté et un esprit de concession de part et d’autre, pour pouvoir institutionnaliser une démocratie multipartisme. Ce n’est ni de la faiblesse ni un compromis, pour autant qu’on évite de compromettre les principes fondamentaux et les objectifs de la lutte pour la démocratisation».
Par après, cet esprit de “coopération” se développa en “partenariat”, ce qui agaça l’opposition. Au Parlement actuel, la majorité du KANU étant moins forte que dans le passé, les stratèges de l’opposition pensaient qu’une opposition conjuguée sans répit pourrait peut-être faire tomber le gouvernement par une motion de censure.
M.Raila maintient qu’il n’a pas modifié sa politique. «Je n’ai pas dévié des principes et de la politique auxquels je crois. A aucun prix, je ne voudrais transiger avec mes principes politiques. On n’a rien fait miroiter devant mes yeux, et aucune promesse ne m’a été faite».
Le partenariat commençait à prendre forme. Le 18 décembre 2000, M. Raila dit que son parti allait fusionner avec le KANU et qu’un nouveau parti politique serait créé, notant toutefois que le NDP n’avait jusqu’alors reçu aucune invitation de la part du KANU. Il précisa que si cette invitation était faite, il faudrait aplanir d’abord les différences entre les politiques des deux partis.
Le 11 juin 2001, le président Moi nomme des membres du NDP dans son cabinet, M.Raila Odinga devient ministre de l’Energie, le Dr Adhu Awiti, ministre de la Planification et du Développement, et MM. Joshua Orwa Ojode et Peter Odoyo deviennent respectivement ministres adjoints de l’Education, des sciences et de la technologie, et des Affaires étrangères. Se réjouissant de ces nominations, M. Raila dit qu’il «considérait cela comme un grand exploit dans le processus de la démocratisation».
Le 18 mars 2002 est le jour historique où la fusion est devenue effective. Ce jour-là, on a procédé à l’élection conjointe des responsables du nouveau parti, peu après la dissolution du NDP. Cela se passait au centre international sportif Moi de Kasaran, à Nairobi. Le président Moi, seul candidat en lice, est présenté par M. Raila Odinga, avec l’appui de M. Uhuru Kenyatta, et élu comme président national du nouveau parti. Les vice-présidents furent élus sans opposition: MM. Kalonzo Musyoka, Katana Ngala, Uhuru Kenyata et Musalia Mudavadi, respectivement des provinces de l’est, du centre et de l’ouest.
M. Raila a été élu secrétaire général à la place de M. Joseph Kamotho, qui au dernier moment avait décidé de ne pas se représenter pour ce poste. (M. Kamotho avait d’abord refusé de céder sa place, malgré la demande des autres membres du KANU). D’autres responsables du parti élus sont M. Nicholas Biwott (secrétaire d’organisation) et M. Mohammed Yusuf Haji (trésorier).
Le nouveau parti porte toujours le nom de KANU. Et pourtant, dit Habel Nyami de la Commission électorale du Kenya, «quelle est la réforme la plus urgente dont les partis politiques africains ont besoin pour s’adresser aux masses? A mon avis, ils devraient tout d’abord changer leur nom, pour qu’ils puissent refléter l’image d’organisations qui s’occupent vraiment des gens venant de tous les groupes ethniques».
Ce n’est pas la première fois qu’un autre parti fusionne avec le KANU. C’était déjà le cas, en 1964, de l’Union démocratique africaine du Kenya (KADU) sous la direction de... M. Daniel Toroitich arap Moi. En tous cas, cette fusion-ci a secoué beaucoup d’hommes politiques dans le pays.
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