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Soudan |
DROITS DE L’HOMME
Certains rapports venant de civils font état de graves violations des droits de l’homme et de torture dans le Bahr-el-Ghazal
A Nyala, des rapports venant de civils qui se sont enfuis de la ville de Raga dans le Bahr-el-Ghazal, Sud-Soudan, font état d’une chasse à l’homme, perpétrée par les services de sécurité, contre la population civile. Ils emprisonneraient, sans aucun procès, surtout des intellectuels et des jeunes gens. Certains auraient été torturés, d’autres exécutés en secret.
Au début de l’année, la ville de Raga était tombée entre les mains de l’armée populaire pour la libération du Soudan (SPLA), mais elle fut reprise ensuite par les troupes du gouvernement soudanais (GOS). La population civile s’était enfuie de Raga de peur d’être prise entre deux feux, et la plupart se sont réfugiés dans des camps pour déplacés à Daein, au Soudan occidental. Mais leurs problèmes ne s’arrêtaient pas là; les autorités les ont traités d’une façon inhumaine, empêchant les ONG de leur apporter des vivres. Certains civils, soupçonnés d’être des agents du SPLA, ont commencé à disparaître.
Après la reprise de Raga par le GOS, certains civils ont décidé de rentrer chez eux, pensant que tout irait bien. Mais mal leur en prit. Puisqu’ils avaient fui la ville, les services de sécurité les ont considérés comme des agents du SPLA, et ils furent arrêtés.
Quelques cas
Un instituteur, Sabino Kornelio, qui s’était enfui de Raga, a été arrêté dès son retour et n’a été relâché que récemment, après avoir subi des tortures. Il habite maintenant à Wau.
John Lino, lui aussi instituteur, vient d’être relâché après un long emprisonnement accompagné de tortures.
Archangelo Uyaka, fonctionnaire dans l’administration, a été aussi arrêté, torturé et relâché. Il a eu le courage de publier les noms de ceux qui ont été arrêtés puis relâchés, de ceux qui ont mystérieusement disparu et de ceux qui sont encore en prison.
Paul Juma Bebeshe est supposé être encore en prison, mais on est sans nouvelles de lui.
John Rubano, un jeune catholique, a été emprisonné et torturé pendant deux semaines, avant d’être relâché.
Patrick Pio Gosumomo, un intellectuel, fut arrêté à la sortie de la messe du dimanche: personne ne sait où il se trouve.
Il y a aussi William Silgata, un comptable et père d’un prêtre catholique, curé de la paroisse de Raga. Arrêté, ligoté et mis en prison, il est libéré après plusieurs jours; mais il est paralysé suite aux mauvais traitements subis.
Secondo Primo, assistant médical, Sisto Bingrowo, contrôleur des finances, et Albert Karama, instituteur, sont tous trois en prison. On est toujours sans nouvelles d’eux.
Kamal Bimoro, chauffeur au service de l’Eglise catholique, a été emprisonné et torturé jusqu’à la mort. Cette mort semble être un «mystère calculé»: on l’a probablement sorti de sa cellule la nuit et tué par balles. Le pistolet dont on s’est servi a été placé sur son corps pour donner l’impression qu’il s’était suicidé...
La liste des victimes ne fait que s’allonger.
Les mujahidins
En général, tous ceux qui sont revenus à Raga n’ont pas pu retourner dans leur maison ou leur propriété. Selon la politique du gouvernement, les «mujahidins» (saints guerriers dans une guerre sainte) ont le droit divin de se livrer au pillage dans toute ville qui tombe en leurs mains. Et pourtant, les civils de Raga sont tous des Soudanais, et le GOS prétend se battre pour défendre tous les Soudanais sur le territoire national! Mais il le fait d’une façon discriminatoire. Ce qui l’intéresse c’est la terre du Sud-Soudan et non la population, dont la plupart sont des Africains noirs de religion chrétienne.
Quand les mujahidins envahissent une ville, ils font des ravages. Cela fait partie de la politique d’islamisation du gouvernement, comprise dans son projet connu sous le nom de «Mohsru Al-Hadari» (en français: «projet d’orientation»). Cela peut sembler assez vague, mais ils en comprennent le sens. C’est un projet d’islamisation pour lequel tous les moyens sont bons: contrainte, terreur, mariages forcés, corruption, et des “faveurs” comme l’emploi ou des objets de luxe.
Quand on interroge le GOS au sujet des atrocités commises par les mujahidins, il répond que ces gens-là agissent sans ordres des autorités. Mais voilà près de treize années que ça dure! Pourquoi le GOS ne fait-il rien pour y remédier?
Quand les troupes du gouvernement reprirent Raga, elles ont pillé la ville, sous prétexte qu’elles doivent appliquer la politique du GOS pour l’arabisation et l’islamisation. Même les biens des Eglises n’ont pas été épargnés. Le commandant Ismali Kakum s’est approprié d’une voiture de l’Eglise catholique, portant la plaque EE 7867. En fait, tout le programme de pillage et de chasse à l’homme aux soi-disant “agents” se faisait sous le contrôle d’Ismail Kakum. (Il fut plus tard remplacé par le lieutenant colonel Mahomed Al-Amin).
Les pillages et les arrestations continuent. Il n’y a pas encore de gouvernement civil à Raga. Les citoyens sont toujours à la merci des soldats, qui les terrorisent. Et pourtant, de plus en plus de civils, surtout du groupe ethnique Furge, sont revenus à Raga, à cause des dures conditions à Daein.
Début mai, les ONG n’avaient pas encore eu accès à Raga. Il n’y a plus de services d’éducation sauf l’endoctrinement à l’idéologie islamique dans les Khalwas (écoles islamiques). Même le matériel des écoles appartenant aux Eglises a été pillé et transporté à Khartoum comme butin de guerre.
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