ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 437 - 01/07/2002

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 Ghana
Où en est l’éducation?


EDUCATION


Un peu partout l’éducation laisser à désirer, semble-t-il.
Au Ghana on se demande surtout quel genre d’éducation il faudrait au pays pour le redresser?

Comme dans tous les pays, le gouvernement du Ghana est très soucieux du sort des jeunes Ghanéens massés sur les trottoirs d’Accra et d’autres grandes villes, qui, pour gagner un peu d’argent, vendent du pain, des laisses de chiens et même des chiots. Leur agilité à courir autour des voitures qui circulent, tout en essayant de vendre leur marchandise aux passagers, est un spectacle à voir! Ces jeunes sont le produit d’un système d’éducation qui leur avait promis une formation technique très utile pour leur avenir. Et pourtant, il semble que toutes ces belles idées soient loin de résoudre les problèmes réels. Bon nombre d’étudiants, formés de cette façon, courent toujours les rues, au grand dam des autorités.

Le sort de ces étudiants a été décidé dans les années 1980, quand le gouvernement a lancé une série de réformes, voulant accélérer et soutenir la croissance économique. Le système scolaire a été remanié et on a introduit les JSS (Junior Secondary Schools, écoles secondaires juniors), où les enfants étaient supposés compléter leur éducation de base et recevoir une formation professionnelle pour entrer dans le marché du travail. Mais, par une combinaison de facteurs, tout le programme a connu une destruction progressive.

Pendant des années, dans presque tout le pays, le niveau dans beaucoup de JSS est resté très bas. «La plupart des enfants ne recevaient qu’une formation théorique; dans beaucoup d’écoles, le manque d’outils rendait la formation pratique impossible», dit l’enseignante Juliana Amoah. «On manquait de manuels, de mobilier et même d’enseignants; la lecture, dans certains cas, était pratiquement nulle».

Le programme de réforme de l’éducation a commencé à décliner quand on s’est rendu compte que les hauts fonctionnaires n’y croyaient pas. Régulièrement, ils plaçaient leurs enfants dans de bonnes écoles, tout en claironnant la nécessité du système des JSS. Ajoutons qu’à cause du manque de consultation avec l’Association nationale des enseignants du Ghana (GNAT), il y a eu peu de réponses de la part des enseignants. Sans aucun doute, ces facteurs ont érodé la confiance dans la viabilité du système.

Les résultats?

La qualité du système scolaire du Ghana a décliné depuis le début du Programme d’ajustement structurel. Le rapport de 2000: “L’impact de l’ajustement structurel sur l’accès à une éducation tertiaire de qualité”, affirme que: «les résultats sont restés très médiocres, malgré le prêt de plus de 400 millions de dollars de la Banque mondiale et toutes les réformes institutionnelles qui ont suivi».

Selon le rapport, la grande partie des prêts de l’étranger (85%) a aidé à financer l’éducation de base, laissant le secondaire et le tertiaire pratiquement sans financement. De plus, les fonds des donateurs ont été investis principalement dans l’infrastructure et n’ont pas servi à améliorer la qualité de l’éducation. Il en résulte que le Ghana produit maintenant des étudiants qui n’ont pas les connaissances nécessaires. «En fait, on a favorisé un niveau du système et négligé les autres», dit Kwame Addo, étudiant à l’université du Ghana.

Au niveau de l’école primaire, beaucoup d’enfants quittent l’école pour aider leurs parents; on estime à 40% le taux de ceux qui abandonnent l’école. Par conséquent, il faut craindre que d’ici 2020, la population du Ghana sera largement illettrée. La situation ne fait d’ailleurs qu’empirer, car les frais d’écolage viennent de monter en flèche dans le secondaire et de plus en plus d’étudiants n’ont pas de place dans les universités, parce qu’ils n’en ont pas les moyens.

Dans l’enseignement tertiaire, les inégalités sont encore bien plus grandes: les nantis augmentent leur niveau de formation, alors que les pauvres restent de plus en plus à la traîne. Les familles qui réussissent, avec beaucoup de mal, à trouver de l’argent pour payer les frais de scolarité, doivent le faire en réduisant drastiquement les dépenses ménagères de première nécessité. L’impact de cette politique est surtout ressenti par les femmes et les filles. «Moins d’éducation pour les filles ne fait qu’accroître le taux de pauvreté parmi les femmes», dit Amoah.

Une vision pour l’avenir

Malgré tout, la vision de l’avenir de l’éducation reste remarquable. Elle est centrée sur la volonté de donner plus d’importance à l’éducation scientifique et technologique et de rendre l’enseignement plus accessible aux filles. Il y a aussi d’autres projets, notamment l’installation de «la formation à distance» (une formation pour des élèves qui, sans aller à l’école, étudient à distance par ordinateur). Cette méthode très flexible a déjà été introduite au niveau tertiaire. Des institutions post-secondaires (y compris les instituts pour la formation des enseignants) ont ainsi été élevés à un niveau tertiaire complet, partageant les frais dans le financement de l’enseignement.

Pour un pays qui veut donner la priorité à l’enseignement technique, il est étonnant que seulement 1% du budget pour l’éducation ait été récemment alloué à l’enseignement professionnel et technique. Ces allocations sont «insuffisantes, vu le nombre d’étudiants dans ce secteur», dit Lawrence A. Clocuh, directeur régional de l’éducation pour le grand Accra. «Il est clair que si ce secteur est une priorité, il devrait recevoir plus d’attention».

Dans les hautes écoles, le grand problème des étudiants est de trouver l’argent pour les «frais d’usage», c’est-à-dire les charges qu’imposent les administrations des universités pour le logement, les repas et l’utilisation des laboratoires et des bibliothèques. Le problème de trouver l’argent dans l’éducation a toujours été un point très sensible politiquement parlant, surtout dans les universités où, pendant des années, les étudiants avaient joui de la scolarité gratuite. Vers la fin de 1999, les étudiants firent une courte grève pour protester contre l’augmentation de ces «frais d’usage».

Aujourd’hui, le gouvernement doit faire face à des choix difficiles. Depuis 1992, la Constitution garantit à tous une éducation de base gratuite et obligatoire. Et comme près de 40% des enfants du Ghana ne peuvent toujours pas aller à l’école primaire, presque tout le budget de l’éducation devrait être alloué aux écoles du degré inférieur. Alors la question est là: le gouvernement doit-il augmenter son budget pour améliorer la qualité de l’enseignement pour les privilégiés qui peuvent aller à l’école primaire, secondaire, et même supérieure? Ou bien doit-il diminuer le financement de l’enseignement tertiaire, pour permettre à 30% d’enfants, condamnés sinon à l’illettrisme, d’aller à l’école?

Les universités

A part quelques améliorations superficielles, les infrastructures des universités ne se sont pas sensiblement développées dans le même laps de temps, d’où certaines détériorations tant au point de vue des conditions que de la qualité. Elles n’ont pas assez de moyens pour s’occuper d’un si large groupe d’étudiants. Pour faire face aux frais d’entretien, sans parler d’extensions, les universités ont été obligées d’augmenter le montant de certaines contributions à charge des étudiants. L’an dernier, le prof. Ivan Addae Mensah, vice-recteur de l’université du Ghana, déclara avec raison que son université était une “Université pauvre très endettée” (UPTE). Somme toute, des pays comme le Ghana cherchent de l’aide par le biais de l’initiative des “pays pauvres très endettés” (PPTE). Alors, pourquoi les universités ne pourraient-elles pas en faire autant?

Beaucoup d’étudiants ont compris maintenant la nécessité des «frais d’usage», mais se hérissent sur le prix qui augmente, soulignant les difficultés qu’éprouvent les familles pauvres à payer ces dépenses. En principe, ils acceptent les «frais d’usage», mais ils insistent pour que le gouvernement et d’autres sources en assument la part du lion.

Ce qui est moins controversé, et que certains proposent, ce sont de nouvelles taxes sur certaines activités. D’autre part, la générosité du public à récolter des fonds et à donner des bourses d’études dans les assemblées de districts, les contributions volontaires des Eglises, des associations d’anciens élèves et des communautés locales, ont déjà pu aider des étudiants désavantagés.

Le gouvernement veut maintenant corriger ces anomalies. Il veut réviser tout le système d’éducation pour qu’il puisse répondre aux défis actuels. Un comité a été mis sur pied par le président John Kufuor, pour sonder le public sur la meilleure façon de réformer le système. Ces deux derniers mois, un comité de 29 personnes a fait le tour du pays pour solliciter des avis sur toute une série de problèmes. Il devra présenter son rapport au président sur ce que les Ghanéens souhaitent que le gouvernement fasse.

Il y a beaucoup de possibilités différentes pour résoudre les problèmes de l’éducation. Même des pays développés n’ont pas encore trouvé les solutions adéquates. Mais il est important de comprendre que si rien ne se fait rapidement, le Ghana pourrait affronter une catastrophe économique sans précédent.

En fait, l’enseignement tertiaire frôle le désastre si aucune disposition n’est prise pour aider ce niveau d’enseignement, mais en même temps, l’illettrisme se répandra si l’éducation de base n’est pas plus encouragée. Alors, quelle voie le gouvernement doit-il prendre? C’est le dilemme auquel il doit faire face.


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