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La violence prend de plus en plus corps dans la presse à Kinshasa
Il ne se passe pas un jour sans qu’on ne lise dans la presse de Kinshasa des articles qui rappellent les écrits et les paroles que publiaient et diffusaient les journaux et radios extrémistes de Kigali, qui ont déclenché le génocide. Tel ministre est de connivence avec la rébellion, tel autre a détourné un véhicule de l’Etat, tel autre encore mérite la prison ou la pendaison. Ce sont ces genres de titres, noms à l’appui, qu’on retrouve dans la presse congolaise. Cette violence entretenue dans la presse par des personnes bien connues des lecteurs, est devenue un cas d’école. De plus en plus, des chercheurs en communication en font leur sujet de recherche. «La violence politique dans la presse écrite pendant la transition au Zaïre. Cas des journaux Salongo et Umoja» et «La violence symbolique dans la presse écrite. Essai d’analyse du discours conflictuel dans le journal Le Palmarès» sont deux exemples d’études faites à ce sujet par des finalistes en communication de l’Institut des sciences de l’information et de la communication et des Facultés catholiques de Kinshasa.
«Informer confère un pouvoir aux médias», ont écrit E. Dennis et J.C. Merril dans «Les médias en question». Mais, comme tout pouvoir, quand on s’en sert sans les garde-fous que sont la déontologie professionnelle et l’éthique, il y a risque de dérapages aux conséquences incalculables. Surtout que la presse sert d’instrument non seulement d’information, mais aussi d’éducation et d’instruction.
Que constatons-nous dans la presse de Kinshasa? Une catégorie de journalistes-éditeurs, au lieu de présenter des faits vérifiables doublés d’analyses instructives, s’adonne à un exercice dangereux de provocation, de disqualification de certains responsables politiques en utilisant toutes les munitions à leur disposition: injure, dénigrement, accusation gratuite, chantage, attaque personnelle. Ils se sont donné pour mission d’humilier les dirigeants politiques et les autres responsables par leurs articles, titres et caricatures. Même le chef de l’Etat n’est pas épargné par cette presse agressive. Ces journalistes ignorent tout simplement leur responsabilité sociale, préférant manipuler les consciences à leur guise. Ils confondent liberté de presse avec libertinage.
Ils usurpent même la fonction qui revient aux dirigeants politiques et aux magistrats. Ils se font puissants censeurs des responsables politiques, déclarant que tel ministre mérite d’être au gouvernement plutôt que tel autre. Prenant la place des magistrats, ils instruisent, généralement sans exhiber de preuve, condamnent, soumettent la victime à la vindicte populaire. Dans le pire des cas, ils font un appel au meurtre.
Règlements de compte
Certains journaux de Kinshasa sont devenus des instruments de règlement de comptes personnels, d’exhibition de jalousies, de suffisance personnelle et d’autres bassesses propres aux personnes aux ambitions démesurées. Ils ne cherchent qu’à faire du mal, pour nuire à la dignité des dirigeants. Mais là où le pays attend leur apport concret à la consolidation de l’unité nationale et à la reconstruction du pays, rares sont les intelligences de la presse qui s’affirment.
Ces journalistes-éditeurs avancent facilement des choses qu’ils ne sont pas en mesure de prouver. Ils prétendent, sans preuve, que tel ministre a détourné un bien de l’Etat; mais quand on leur démontre le contraire, ils n’ont pas le courage de reconnaître leur faiblesse professionnelle et veulent à tout prix priver la victime de son droit de réponse. Habitués à publier des écrits non vérifiables juste dans l’intention de nuire, ils inventent n’importe quoi pourvu qu’ils puissent atteindre leur cible.
Par ce genre d’articles, ces journalistes-éditeurs, peut-être sans le savoir, entretiennent la division parmi la population. Même ceux qui se prétendent ou s’autoproclament être journalistes ou éditeurs de journaux pro-gouvernementaux, servent très mal le gouvernement. Ils entretiennent un esprit de division qui ne peut que profiter à l’ennemi qui se frotte les mains, s’ils ne sont pas des collabos bien infiltrés pour entretenir la zizanie.
Ambitions
«Ote-toi que je m’y mette», tel est l’objectif réel de ces journalistes-éditeurs. Il est tout à fait légitime qu’ils aient des ambitions, mais non pas en s’appuyant sur une campagne de dénigrement gratuit des autres, une campagne d’ailleurs qui est susceptible de leur attirer des ennuis judiciaires. Mais quand la justice se met à leurs trousses, ils sont les premiers à crier à la violation de la liberté de la presse ou à chercher de la protection politique. Ils oublient que leurs articles peuvent avoir des conséquences incalculables.
Comment un journal, dit sérieux, peut-il écrire par exemple avec un grand titre à la Une, que son éditeur roule dans le meilleur véhicule de toute la presse en RDC, comme si cette voiture était le fruit de la vente des quelques centaines d’exemplaires qu’il imprime? Comment un journal supposé sérieux peut-il écrire avec grand titre que son éditeur s’habille le mieux, qu’il est le mieux chaussé, le mieux coiffé, le mieux parfumé de toute la profession? Il s’agit là d’un discours qui serait plus à sa place dans certains milieux musicaux de la ville. Cela montre que la profession est infiltrée par des personnes sans culture, sans formation journalistique requise, qui voudraient dangereusement transformer ce noble métier en une jungle où on foule aux pieds la loi, l’éthique et la déontologie de la profession. Ce genre de presse, si on ne l’arrête pas rapidement, mettra encore une fois le pays à feu et à sang.
D’où la nécessité de réguler la profession. Le Dialogue intercongolais a envisagé de mettre en place une Haute autorité des médias. Le gouvernement envisage plutôt d’organiser un congrès de la profession pour permettre aux journalistes professionnels de mettre eux-mêmes en place de nouvelles structures régulatrices de la profession, telles que l’Observatoire de la presse et le Haut conseil de l’audiovisuel, des organes qui responsabiliseront les journalistes par eux-mêmes.
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