ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 441 - 01/10/2002

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Congo-Brazza
Morose investiture


POLITIQUE


14 août 2002. Sassou Nguesso, élu président de la République le 10 mars dernier
à près de 90% des voix, a enfin été investi dans ses fonctions par la Cour suprême

Lors de sa prestation de serment, Sassou Nguesso a bénéficié de l’assistance réconfortante de plusieurs chefs d’Etat africains: Omar Bongo du Gabon, Idriss Déby du Tchad, Obiang Nguema de Guinée équatoriale, Joseph Kabila de la RD Congo, Félix Patassé de Centrafrique, Amani Toumani Touré du Mali, Joachim Chissano du Mozambique, et de nombreuses personnalités tant européennes qu’africaines.

Dans son discours d’investiture, le président congolais a reconnu que le Congo a vécu une décennie difficile, marquée «par une instabilité politique, institutionnelle et sociale, une régression économique, une désagrégation du tissu social, une aggravation de la pauvreté, une précarité sociale, accentuée par la quasi-faillite des finances publiques». Pour de nombreux Congolais écrasés par la misère, c’est encore un discours de plus dont ne sortira rien de concret. «Ce n’est pas nouveau tout cela. Ce que cherchent les jeunes, c’est le travail», se désole un étudiant de l’université Marien Ngouabi à Brazzaville. Un vieux retraité ajoute que l’essentiel pour lui c’est de percevoir régulièrement sa pension, qui depuis dix ans est devenue une denrée rare.

En 1997, au terme d’une terrible guerre, Sassou Nguesso chasse le président Lissouba et se proclame président, tout comme en 1979 quand il était arrivé au pouvoir par un putsch, pour y rester jusqu’en 1992. Plusieurs dirigeants des partis, inquiets, prirent le chemin de l’exil, car ce retour marquait la fin des libertés fondamentales.

C’était une mauvaise appréciation. Le nouveau régime se voulait plus démocratique que le précédent. Au point même qu’une des figures de l’opposition, le professeur Côme Mankassa, resté au pays, déclarait il y a quelques mois: «La transition instaurée en octobre 97 et qui s’est achevée le 9 août dernier, n’a pas placé le Congo sous un régime de parti unique. Elle a plutôt laissé le champ ouvert à l’expression diversifiée. Le multipartisme a été maintenu, la liberté garantie.»

Ce, avec bien sûr quelques fausses notes de temps en temps. «Seuls les partis et associations politiques de la famille des Forces démocratiques unies (FDU, au pouvoir) étaient libres de tout mouvement pour mener à bien leurs activités politiques. Les réunions des partis politiques étaient conditionnées par une autorisation des autorités compétentes. Il n’était pas facile pour l’opposition de communiquer avec le grand public», souligne le rapport de synthèse de la Ligue congolaise pour le système électoral (Licose), publié le 16 août à Brazzaville.

Des défis énormes

Si l’homme fort du Congo a réussi à transformer sa victoire militaire en victoire politique par les urnes, les défis qu’il doit relever dans un pays meurtri par dix années de guerres civiles sont énormes. Les industries hors pétrole, déjà peu développées avant les guerres et qui représentation à peine 7% du PIB global, ont été en partie détruites par les guerres, notamment à Brazzaville, Dolisie, Loutété et Nkayi (dans le sud).

Le chef de l’Etat a en outre affirmé qu’il tient à ce que l’Etat soit véritablement impartial, et que la dépolitisation des postes publics de responsabilités soit une exigence. Cela devrait s’accompagner de l’amélioration du professionnalisme des agents de l’Etat. Or, on sait que depuis avant les années 80, l’Etat a été le plus gros pourvoyeur d’emplois dans le secteur moderne. Ses recrutements ont été faits le plus souvent sans études des besoins réels des services, ni évaluation des compétences requises pour les postes attribués. Au Congo, la primauté des critères subjectifs dans l’attribution des responsabilités publiques, au détriment de la probité morale et de la compétence, est une règle entretenue par le clientélisme politique.

Il faut également signaler que Sassou arrive à un moment où la circulation des biens et des personnes dans beaucoup d’endroits au Congo reste difficile en raison des situations créées par les conflits. Exemple, sur «l’axe nord du pays on compte une vingtaine de barrages gardés par des hommes en armes. A chaque barrage, les passagers sont systématiquement fouillés. Ce qui est loin d’être une opération de contrôle d’identité. Sur l’axe sud, plus précisément à l’entrée de Dolisie, la police, la gendarmerie... rackettent les transporteurs et les commerçants», poursuit le rapport de la Licose.

Le chef de l’Etat congolais ne s’est pas clairement prononcé sur l’avenir politique des exilés congolais, notamment Pascal Lissouba, Bernard Kolelas (ex-maire de Brazzaville), Yombi Opango..., des figures qui redoutent de revenir au pays. Alors que le peuple congolais, fatigué des guerres sauvages, estime que le dialogue entre le président et ses opposants mettrait définitivement fin aux conflits qui déchirent le Congo depuis une décennie.

D’autre part, Sassou n’a rien à redouter du côté de la nouvelle Assemblée nationale. Son parti, le Parti congolais du travail (PCT) détient la majorité absolue. Et selon la nouvelle Constitution, votée le 20 janvier dernier, l’Assemblée ne peut pas renverser le président et vice versa. Il espère donc plutôt une opposition constructive.

Des problèmes délicats demeurent encore vivaces. Des poches d’insécurité existent toujours dans la région du Pool, où le pasteur Ntoumi et ses maquisards ninjas, fortement armés, continuent à narguer les forces gouvernementales. «En raison de cette situation, le Congo a toujours des milliers de citoyens à travers le monde», note le mémorandum du collectif des ONG congolaises des droits de l’homme. C’est dire que le septennat du nouvel homme fort du Congo ne sera pas une sinécure.


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