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DROITS DE L’HOMME
Les violations des droits de l’homme reviennent en force, comme du temps de la dictature de Mobutu
Nous assistons aujourd’hui à Kinshasa comme dans les provinces, à des arrestations arbitraires opérées par la police politique contre des journalistes, des défenseurs des droits de l’homme et des activistes des partis politiques.
Plusieurs membres du principal parti d’opposition, l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) de M. Tshisekedi, ont été arrêtés au mois de mai et gardés dans des cachots. Ainsi, Jean-Baptiste Mulumba, conseiller économique de M. Tshisekedi, a été arrêté le 16 mai au Katanga et amené à Kinshasa dans des conditions inhumaines. D’autres dirigeants de ce parti ont été arrêtés à Kinshasa et emmenés dans des lieux inconnus jusqu’à présent. (Ndlr - Le 12 septembre, JB Mulumba a été transféré à la Cour d’ordre militaire — COM — dont la suppression est demandée par tous les défenseurs des droits de l’homme.)
Quant aux journalistes, après l’arrestation de Ferruzi Sangwele de la radio-télévision nationale, Raymond Kabala, du journal “Alerte-Plus, vient d’être enlevé et est gardé dans un lieu inconnu. D’autres journalistes, comme Jean-Larie Ndankolo du journal»Tapis Rouge", sont pourchassés au fil des jours.
Pendant ce temps, la chasse aux défenseurs des droits de l’homme et membres de la société civile ne s’arrête pas. Ainsi, le bâtonnier Mpinga Tshibasu, président de la Société civile/Kasaï oriental, a été arrêté le 3 juillet à Mbuji-Mayi et amené comme un criminel à Kinshasa. De même, M. Tchèque Mujanyi, président de la ligue des droits de l’homme LIDHO, vient d’être arrêté à Kananga (Kasaï occidental).
A ces quelques cas pris parmi beaucoup d’autres, s’ajoutent ceux des étudiants arrêtés à Kinshasa lors des émeutes sur le campus universitaire en décembre dernier, lorsqu’ils réclamaient la réduction de leurs frais scolaires. Ces manifestations se sont soldées par la mort de trois policiers et deux étudiants. Parmi les étudiants arrêtés, certains ont disparu. Les démarches menées par leurs familles pour savoir où ils sont détenus sont demeurées vaines jusqu’ici.
Pire encore, les familles des personnes persécutées sont aussi pourchassées. C’est le cas de M. Mulumba, dont la femme et le fils aîné ont été à leur tour arrêtés et mis au cachot. La chasse aux militants de l’UDPS s’est encore intensifiée après que, àSun City, Tshisekedi a osé poser sa candidature à la présidence et proposé que la nationalité congolaise soit accordée collectivement aux Banyamulenge. Par la suite, des membres de l’UDPS à Kinshasa ont été enlevés, et l’ancienne présidente de l’UDPS/Mbandaka et trois de ses filles ont été violées par des éléments de la police politique, qui ont saccagé son domicile.
Aux dires de témoins, les conditions de détention de toutes ces personnes arrêtées sont déplorables. Beaucoup d’entre elles sont entassées à plusieurs dans une cellule exiguë, où elles dorment à même le sol et doivent faire tous leurs besoins sur place. Elles subissent aussi des tortures physiques (bastonnades) et morales.
Au moment où l’on parle de réconciliation nationale, l’intolérance politique revient donc en force, alors que la reconstruction du pays devrait débuter par la restauration de la démocratie.
L’affaire Katebe Katoto
M. Katebe Katoto est un homme d’affaires originaire du Katanga. Inconnu jusqu’en décembre dernier, il a fait beaucoup parler de lui depuis qu’il a annoncé, depuis Bruxelles, sa candidature au poste de président de la République durant la période de transition. Depuis cette annonce, la liste des personnes arrêtées à Lubumbashi pour leurs liens avec lui n’a cessé de s’allonger.
Selon ASADHO, une ONG de défense des droits de l’homme, les premières victimes ont été deux membres de la Fondation Katebe, Jean-Pierre Kibwe et Edouard Kasongo. Arrêtés àLubumbashi, ils ont été amenés à Kinshasa et gardés au cachot des services des renseignements. Beaucoup d’autres ont été arrêtés par la suite, notamment le pasteur Emmanuel Lumbu, auquel on reprochait d’avoir béni des vivres que la Fondation Katebe avait remis à quelques Eglises de Lubumbashi pour les déplacés de guerre.
Pendant ce temps, le gouvernement de Kinshasa accuse M. Katebe d’être à la tête d’une rébellion, dont les troupes seraient stationnées en Zambie. Son frère, Moïse Katumbi, menacé d’arrestation, s’est réfugié dans ce pays. Il a qualifié les accusations de mensongères et invité le gouvernement à envoyer des enquêteurs. A son tour, un officiel zambien a qualifié de tendancieuses les allégations de Kinshasa, qui sont de nature à perturber les relations entre les deux pays.
Révolte dans le Bas-Congo
Au cours du week-end du 20-21 juillet, la province du Bas-Congo était en ébullition. Des manifestations organisées à Matadi, Boma, Tshiela, Loanda et Luozi, ont été réprimées brutalement, et plus de 20 personnes ont trouvé la mort. Les manifestants se sont attaqués surtout aux sièges des tribunaux, qu’ils ont saccagés et détruits.
Les raisons de la révolte dans cette province, considérée toujours comme une oasis de paix, sont essentiellement d’ordre politique, la conséquence de frustrations contenues depuis longtemps. Les manifestations étaient conduites par les adeptes d’une secte politico-religieuse dénommée “Bundu dia Kongo”. Son chef spirituel se considère comme le successeur de Joseph Kasavubu et s’autoproclame également descendant des rois du Royaume Kongo, dont il rêve le rétablissement. Le 22 juillet, on aurait dû proclamer l’autonomie de la province du Bas-Congo, prélude du rétablissement du royaume.
En fait, la plupart des Bakongo sont mécontents du pouvoir politique établi à Kinshasa par l’AFDL, qui a fait de belles promesses sans les tenir. La population s’oppose à la dictature de parti unique qui se réinstalle, d’abord avec les CPP (Comités de pouvoir populaire) de Laurent Kabila, et ensuite avec le PPRD, le nouveau parti politique créé tout récemment par Joseph Kabila.
La raison profonde qui est sans doute à la base de la tension qui continue à couver dans le Bas-Congo et dans toutes les provinces, est la situation socio-économique dramatique qui y règne. Les populations de l’arrière-pays sont frustrées d’être abandonnées par le pouvoir. Aujourd’hui, il est courant de rencontrer en milieu rural des personnes (hommes, femmes et enfants) sans habits, parce qu’ils manquent de tout. Les biens de première nécessité, sel, sucre, savon, produits pharmaceutiques, sont introuvables. Les routes n’existent plus. Les fonctionnaires sont impayés. La déception est généralisée.
C’est pourquoi, la population souhaite que la transition soit la plus courte possible, et qu’on aille aux urnes pour choisir des dirigeants qui se sentent redevables devant le peuple.