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Zimbabwe |
PERSONNALITES
Le président Mugabe n’a jamais caché sa préférence pour le monopartisme
«Il y a plusieurs degrés de violence», disait le président Robert Mugabe, il y a deux ans, au moment de lancer sa campagne pour les élections présidentielle et législatives. Si l’on tient compte d’un des chants de son parti, l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (ZANU-PF), “Le ZANU-PF veut du sang», tout indique que la mission que M. Mugabe s’est donnée, est en train de se réaliser.
Il semble aussi que beaucoup d’analystes n’ont pas su prévoir les conséquences des éclats de M. Mugabe quand, dans les années 1980, étant Premier ministre, il déclarait: «Je suis partisan d’un pays à un seul parti politique». L’idée n’a jamais effleuré la plupart des Zimbabwéens ordinaires, encore en train de soigner les blessures de la guerre d’indépendance, que leur pays allait tomber de la poêle dans les braises.
Son style de gouvernement, émaillé souvent de remarques violentes avant et après les élections, a envoûté beaucoup de Zimbabwéens fatigués de la guerre. Trompés par son charisme, ils n’ont pas pensé à chasser leur leader si cultivé.
Pourtant, certains de ses lieutenants ne se sont pas laissé impressionner. M. Mugabe a commencé par virer de son cabinet le numéro 3 du parti, M. Edgar Tekere. Il avait osé mettre en question la moralité du plan du président de massacrer 20.000 personnes dans l’ouest du Zimbabwe, parce qu’elles critiquaient son gouvernement. M.Tekere a été finalement évincé du ZANU-PF en 1989. La politique de l’époque vivait pratiquement dans le monopartisme, jusqu’à ce que, en vue des élections de 1990, M. Tekere forme son Mouvement pour l’unité du Zimbabwe (ZUM), qui n’existe plus aujourd’hui.
Les admirateurs à l’étranger
Malgré l’aversion de beaucoup de concitoyens pour sa «rhétorique», il semblerait que l’ex-leader de guérilla soit en train de gagner pas mal d’admirateurs en Afrique. Le principal parti d’opposition, le Mouvement pour un changement démocratique (MDC), a le support de la majorité, mais il lui manque des sympathisants courageux et à toute épreuve dans l’ensemble du continent.
Les analystes au Zimbabwe savent que les leaders africains sont séduits par les réformes agraires, pour autant que l’accent soit mis sur le déplacement de la minorité blanche, accusée d’avoir volé, il y plusieurs années, la terre des Noirs. Les leaders africains ne semblent pas admettre que l’anarchie règne au Zimbabwe et que les Zimbabwéens appellent un changement à grands cris.
La plupart des fermiers expulsés de leurs terres quittent le pays avec leurs travailleurs, qui n’ont pas d’autres moyens de gagner leur vie. On ignore probablement que beaucoup de ces travailleurs agricoles sont d’origine mozambicaine, zambienne et malawite. Où est donc le pan-africanisme des leaders zimbabwéens?
Il apparaît de plus en plus qu’au Zimbabwe la population majoritairement noire s’appauvrit, et pourtant les autres dirigeants africains ne font qu’applaudir. Dans un commentaire sur les diatribes de Mugabe contre le Premier ministre britannique, Tony Blair, lors du Sommet de la Terre à Johannesburg, M. Tendai Biti du MDC remarquait: «Ce qui m’écœure, c’est de voir les gens applaudir, surtout après ce qu’il a dit dans son discours». Un haut diplomate africain a exprimé sa déception: «Il semble que rien n’ait changé. On avait espéré une certaine réconciliation, mais l’administration de Harare s’est retranchée et a durci sa position».
Selon des analystes, tant que M. Mugabe se sentira menacé par la popularité du dirigeant du MDC, M. Morgan Tsvangirai, il intensifiera ses éclats venimeux et la violence persistera au Zimbabwe. Certains indices montrent que les sanctions imposées par l’Union européenne commencent à se faire sentir, mais les sautes d’humeur du président continueront jusqu’à ce que s’épuisent son énergie et l’appui qu’il reçoit.
- Stan Dongo, Zimbabwe, septembre 2002 — © Reproduction autorisée en citant la source