ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 442 - 15/10/2002

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Sierra Leone
La Commission vérité et réconciliation


DROITS DE L’HOMME


Après dix ans de guerre civile,
une Commission vérité et réconciliation vient d’être créée en Sierra Leone
pour donner aux différents opposants l’occasion de se rencontrer

En 2000, selon les dispositions du traité de paix de Lomé (signé en juillet 1999 par le gouvernement et les rebelles), une Commission vérité et réconciliation (TRC) a été promulguée au Parlement. Le but principal de cette Commission est de donner aux différentes parties l’occasion de se rencontrer, invitant les victimes et les auteurs à révéler ce qui s’est passé pendant la guerre. Le pays a été déchiré par cette guerre brutale. C’est surtout le Front révolutionnaire uni (RUF) qui en porte la responsabilité, mais des soldats renégats y ont également leur part.

Le 18 janvier 2002, lors d’une cérémonie symbolique dans laquelle on brûla des armes et des munitions, le président Ahmed Tejan Kabbah déclarait officiellement que la guerre était finie. Mais les relations entre les différentes parties de la population restaient acerbes. Le lancement de la TRC par le président Kabbah, le 5 juillet 2002 à Freetown, fit enfin naître l’espoir de réaliser la réconciliation.

La TRC sierra-léonaise

Lors de la cérémonie du lancement, le président annonça que la TRC aura pour mission d’enquêter et de faire un rapport sur les causes, la nature et l’étendue des violations des droits de l’homme: «La Commission fera un rapport impartial et historique des atrocités qui ont été commises contre des civils innocents durant ces dix années de guerre. Cependant, cela ne devra pas se limiter à un rapport; la TRC se doit d’être un processus thérapeutique».

La guerre, fit observer le président, a créé des divisions entre les familles, entre voisins et amis. Le monde politique s’est disloqué. «Les canons se sont tus, mais les traumatismes dus à la guerre persistent toujours. C’est pourquoi la TRC est et doit être considérée comme un instrument de réconciliation nationale, comme un autre moyen pour renforcer la paix».

Les membres de la commission viennent de différents pays. «Je suis très heureux du choix et de la participation de la communauté internationale», a déclaré le président Kabbah, tout en lançant une mise en garde: «Personne, même pas le président, ne doit vouloir contrôler, diriger ou influencer la Commission ou ses membres dans l’accomplissement de leurs fonctions. Les membres seront renvoyés s’il s’avère qu’ils se méconduisent». Il insista aussi sur l’intégrité et l’indépendance de la Commission, et fit appel à chacun pour coopérer à son travail. «Je sais qu’il sera pénible et même humiliant pour certains de raconter ce qu’ils ont vécu. Cependant je les encourage à se présenter et à coopérer à ce travail d’union nationale».

La tâche de la TRC

La tâche de la TRC est un travail d’Hercule. «Plusieurs factions se sont affrontées dans cette guerre civile, dont les soldats de l’armée sierra-léonaise et les forces gouvernementales», a dit le porte-parole du parti du RUF, Eldred Collins, ajoutant que les forces pro-gouvernementales, y compris des mercenaires venant de l’Afrique du Sud, ont aussi commis des violations des droits de l’homme.

Mais qui déterminera ce qui s’est réellement passé? L’évêque Joseph Humper, président de la TRC, dit que la Commission doit être impartiale. «Pourquoi était-ce la population civile qui constituait la cible principale, au lieu des forces armées qui s’opposaient? Pourquoi ont-ils fait de nos femmes et de nos enfants des objets de plaisirs et d’outrages au cours de cette guerre? Pourquoi s’en sont-ils pris délibérément à nos bâtiments et autres infrastructures, les prenant systématiquement pour cible? Qu’est-il advenu de nos proches qui ne sont pas encore revenus, alors que la guerre est finie? Il faut une réponse à ces questions. Même si nos proches ont été tués au cours de la guerre, leurs familles ont le droit de savoir ce qui est arrivé, pour qu’elles puissent leur donner au moins une sépulture décente. Notre peuple a droit à des explications. Ce n’est qu’en abordant franchement ces problèmes que nous pourrons déterminer le chemin à suivre».

Les Nations unies ont beaucoup aidé à l’établissement de la TRC. Il faut remarquer aussi que c’est la Mission des Nations unies en Sierra Leone (Minusil) qui a épaulé le processus de désarmement. Le représentant spécial de Kofi Annan en Sierra Leone a déclaré: «Pour bâtir une paix vraiment viable dans l’avenir, la Sierra Leone doit d’abord regarder en arrière. Même si cela peut être pénible, les Sierra-Léonais doivent pouvoir s’informer, discuter et arriver à assumer les événements qui ont eu lieu au cours des conflits de ces dix années. Le but de la TRC n’est pas de rouvrir des vieilles blessures, mais de les examiner pour pouvoir les guérir et de pouvoir ainsi avancer vers un avenir meilleur».


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