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CORRUPTION
Cette dernière décennie, la Zambie s’est placée en tête de liste
des nations victimes de la corruptionSelon l’opinion générale des Zambiens, on a assisté cette dernière décennie, sous la présidence de Frederick Chiluba, à un accroissement sans précédent de la corruption, qui a ainsi beaucoup contribué à une augmentation de la pauvreté. Mwelwa Muleya, directeur de l’information et de la recherche pour la Fondation pour le processus démocratique (FODEP), l’exprime ainsi: «Il faut noter que la corruption généralisée de ces dix dernières années n’a fait qu’aggraver la pauvreté parmi la majorité des citoyens, tandis que quelques individus se sont enrichis d’une façon excessive».
Le nouveau président Levy Mwanawasa a déclaré une «tolérance zéro» pour la corruption. Depuis trop longtemps, dit-il, la corruption est devenue la règle dans notre société. L’administration de Chiluba a souvent été accusée de ne pas avoir la volonté et ni la détermination de combattre la corruption en haut lieu. En fait, pour répondre à ces accusations sans fin, l’ancien président a demandé qu’on en fournisse les preuves.
Le bruit a couru que Levy Mwanawasa n’est arrivé au pouvoir, en décembre 2001, que parce qu’il avait été trié sur le volet et pleinement appuyé par Chiluba, sans l’appui duquel il ne serait sans doute jamais devenu président. Et, donc, on a dit que Mwanawasa serait trop lié à Chiluba pour oser prendre des mesures contre lui. Il lui restait à prouver que ce n’était pas vrai.
La corruption sous Chiluba
Pour Mwanawasa, l’épreuve de vérité vint plus vite qu’il ne le pensait. En juillet de cette année, le journal indépendant The Post fait des révélations stupéfiantes et irréfutables concernant les vols et les abus de fonds publics sous le règne de Chiluba. Selon ces révélations, la plus importante filière de vols et d’abus, mais certainement pas la seule, était le compte ZAMTROP. Il s’agit d’un compte ouvert dans une succursale londonienne de la Banque commerciale nationale de la Zambie (ZANACO), et tenu par les services de renseignements et de sécurité (ZSIS). Xavier Chungu, directeur du ZSIS, était le seul à en avoir la signature.
The Post publiait une liste des organisations et individus, tant zambiens qu’étrangers, qui des années durant avaient profité de ce compte. Le premier bénéficiaire important ainsi nommé, était le président de la Cour suprême, Mathew Ngulube, présumé avoir reçu $168.000 en pots de vin de la part de Chiluba. L’opinion publique a demandé avec insistance qu’il fasse une déclaration officielle d’innocence ou qu’il démissionne. Il a finalement été forcé de démissionner. Le ministre des Affaires étrangères, Katele Katumba, qui avait été ministre des Finances sous Chiluba, a dû lui aussi se démettre suite aux révélations et aux enquêtes.
Dans un coup d’audace, le président Mwanawasa a pris la décision inhabituelle de convoquer une session spéciale du Parlement. Dans son discours, au mois de juillet, il confirme le scandale du ZAMTROP et révèle d’autres cas dans lesquels la Zambie, sous l’administration Chiluba, a perdu des millions de dollars par vols et abus de fonds publics. Toutefois, il fait remarquer que, d’après la Constitution, il n’a pas le pouvoir de lever l’immunité de Chiluba, et que seul le Parlement a ce pouvoir.
C’est donc au Parlement de faire ce pas. Les Eglises, les étudiants et la société civile ont alors exercé une forte pression sur le Parlement pour qu’il lève l’immunité de Chiluba, afin de pouvoir faire une enquête et le poursuivre en justice. Le 16 juillet, le Parlement votait unanimement la levée de l’immunité de Chiluba: tous les députés ont voté en faveur de la motion! On n’avait jamais vu cela auparavant.
Le lendemain, Mwanawasa, profitant de l’euphorie, déclara dans un discours à la nation: «Plus jamais la Zambie ne permettra aux dictateurs et aux dirigeants corrompus de les gouverner. Ces dirigeants qui veulent encore s’engager dans des pratiques corrompues, doivent faire attention. Les décisions prises auront un effet de dissuasion».
Réactions
Les réactions du grand public étaient cependant mitigées. Certains félicitaient Mwanawasa et pensaient comme lui que ses actions auraient un effet dissuasif, puisqu’elles s’adressaient aux «gros poissons». Mais les partisans et associés de Chiluba condamnaient ces actions, disant qu’il s’agissait de «persécutions dont était victime un homme qui avait tout fait pour que Mwanawasa soit le candidat du MMD aux présidentielles, et aussi pour qu’il gagne ces élections». Ils l’ont accusé de manquer de reconnaissance envers le peuple qui l’avait soutenu.
D’autres encore, surtout certains leaders de l’opposition, ont dit que Mwanawasa ne méritait pas l’éloge du peuple pour son action anti-corruption, parce qu’il n’avait fait que s’approprier ce que d’autres avaient commencé avant lui.
Sakwiba Sikota, premier vice-président de l’Union nationale pour le développement(UPND, parti d’opposition) affirma: «Mwanawasa n’a jamais pris d’initiative en ce domaine, il accepte et approuve seulement à contrecoeur les mesures que d’autres lui imposent. S’ils sont honnêtes et examinent les événements, les Zambiens réaliseront que Mwanawasa n’a jamais pris la tête dans ce combat, mais n’a suivi qu’à contrecœur». Selon Sikoda et d’autres, la déclaration de Mwanawasa sur la «tolérance zéro» est de la pure rhétorique: «Il fait de la publicité à bon marché, mais son cœur n’y est pas».
Seul le temps nous dira jusqu’à quel point Mwanawasa est vraiment sincère.
- Cheela F.K. Chilala, Zambie, novembre 2002 — © Reproduction autorisée en citant la source