ANB-BIA SUPPLEMENT

ISSUE/EDITION Nr 452 - 15/03/2003

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Ghana
Querelles sans fin


PERSONNALITES


Le précédent et l’actuel président du Ghana ne parviennent pas à s’entendre.
A l’occasion des fêtes de Noël, Rawlings a refusé le cadeau que lui avait offert le gouvernement. 
Ce qui montre aux Ghanéens l’animosité qui existe entre les deux.

 Les relations entre le président John Kufuor et son prédécesseur, John Rawlings, qui lui céda le pouvoir en 2001, se sont envenimées. Beaucoup a déjà été dit et écrit à ce sujet. Ce que la plupart des Ghanéens croyaient n’être que les différends politiques habituels, basés sur une rhétorique de partis, s’est mué en une dispute hargneuse.

Les Ghanéens ont commencé à se rendre compte jusqu’à quel point la situation s’était détériorée, quand Rawlings refusa les cadeaux que le gouvernement lui avait offert, en signe de bonne volonté, à l’occasion des fêtes de Noël. Son explication? Il n’a besoin de rien de la part du gouvernement de Kufuor.

Ce qui est curieux, c’est que John Atta Mills, vice-président du temps de Rawlings et qui a toujours l’intention de s’opposer à Kufuor aux élections de 2004, a refusé lui aussi les cadeaux du gouvernement. Il avait pris la décision de n’accepter aucun cadeau de Noël, dit-il. Mais pour beaucoup de Ghanéens, Rawlings lui aurait demandé de refuser les cadeaux.

Bien que Rawlings et Kufuor soient connus pour être diamétralement opposés, ils avaient fait un geste de réconciliation lors de la visite d’Etat du président de la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo, en 2001. Des photos de Kufuor et de Rawlings s’embrassant, avaient paru en première page des journaux, à la grande joie des Ghanéens.

Mais, depuis lors, cette cordialité a disparu. Certains en rejettent la responsabilité sur ce qu’ils appellent «les déclarations irréfléchies» de Rawlings, qui n’arrête pas de reprocher au gouvernement actuel d’être le pire que le pays ait jamais connu.

Pourtant, la plupart des Ghanéens pensent plutôt le contraire. Ils reprochent à Rawlings ses piètres résultats concernant les droits de l’homme, son népotisme, son ineptie, sa corruption et l’appauvrissement des Ghanéens pendant les quelque vingt années de son gouvernement. L’opinion générale est qu’après deux décennies, Rawlings et sa cohorte n’ont laissé qu’un héritage de pourriture et de mauvaise gestion des institutions de l’Etat, ainsi que des pratiques frauduleuses massives, qui ont ruiné le pays. Or, depuis qu’il n’est plus au pouvoir, Rawlings accuse souvent le gouvernement actuel d’excès et de duplicité.

Préoccupations

En août dernier, les choses se sont exacerbées lors de l’inauguration de la section féminine du Congrès national démocratique (NDC), le parti dont Rawlings est le leader. Il a rallumé une fois de plus les passions en demandant aux Ghanéens de ne pas attendre les élections de 2004 pour mettre fin à «la pourriture dans le gouvernement du parti de Kufuor», le Nouveau parti patriotique (NPP). Il dit aussi que la population devrait avoir recours au «défi positif» en attendant les élections.

Le gouvernement n’a pas tardé à réagir. Ainsi que bon nombre de Ghanéens, il avait l’impression que Rawlings préparait quelque chose. Le sentiment général était que Rawlings cherchait à exciter les gens à renverser le gouvernement. Incidemment, vers le même moment, Rawlings a acquis quatre voitures blindées.

Beaucoup de gens se rappellent que Rawlings, même après avoir été élu président, a exprimé son profond dédain pour la politique multipartite. Il y avait donc lieu de s’inquiéter.

La réponse de Dan Botwe, secrétaire général du NPP, a été immédiate: «Le NPP comprend difficilement pourquoi Rawlings choisit de saper le processus démocratique à la moindre occasion. Son dernier appel aux armes et sa vision hypocrite de ce qu’il appelle le “défi positif”, devraient être condamnés par tous les Ghanéens avant qu’ils ne laissent des marques désastreuses dans les esprits d’aventuriers démagogues».

Finalement, la machinerie de la sécurité s’est mise en marche. Le Bureau des enquêtes nationales (BNI) a interpellé Rawlings à propos de l’achat des voitures d’une valeur de $136.200, enregistrées à son nom. Rawlings a répondu que des «amis» les avaient achetées pour lui. Mais il refusa net de donner l’identité de ces bienfaiteurs. Il aurait même dit qu’on «devrait lui couper la tête avant qu’il ne révèle l’information qu’on exigeait de lui». Irrité par son comportement, le gouvernement lui enjoignit de restituer quatre des cinq voitures qu’il avait.

L’histoire des voitures

Le leader de la majorité au Parlement, Papa Owusu Ankomah, prenant la défense du gouvernement, rappela que les privilèges des anciens présidents sont clairement indiqués dans le rapport Greenstreet. (Le Comité Greenstreet avait été chargé de prendre des mesures adéquates pour pourvoir au bien-être des anciens chefs d’Etat). Il est évident, dit-il, que Rawlings ne peut pas disposer de cinq voitures comme primes de mise à la retraite.

Le porte-parole du gouvernement, Kwabena Agyepong, nie que Rawlings ait été spolié de ses privilèges. «Nous ne l’avons dépouillé de rien. Nous nous en tenons à ce qui est écrit. Nous nous sommes donné beaucoup de mal pour assurer une passation des pouvoirs en douceur et nous lui avions permis de prendre ces voitures, mais son comportement prouve qu’il n’en est pas digne».

Quelques jours après qu’on ait appris que Rawlings venait d’acquérir quatre land cruisers blindés, flambant neufs, il y a eu un débat au Parlement. Le NPP dit à l’ex-président que, s’il était vraiment un homme intègre comme il le prétend, il devait divulguer l’identité de ses «philanthropes».

Tout était donc prêt pour une montée d’agressivité. Rawlings a affirmé récemment que sa hargne contre Kufuor et son gouvernement s’explique par les injustices qu’ils infligent à lui et aux fonctionnaires de son parti. En effet, le gouvernement a lancé des poursuites judiciaires contre certains ministres de Rawlings soupçonnés de détournement de fonds de l’Etat. Un ex-ministre adjoint des Finances, Victor Selormey, a été emprisonné pour fraude. Selon Rawlings, il s’agit d’une «chasse aux sorcières». Mais tout se déroule selon la loi.

Il est important de noter que l’ancien vice-président Mills, considéré par certains médias comme “le toutou de Rawlings”, semble prendre le même chemin (ce qui met ses supporters mal à l’aise). La décision de Mills de refuser les cadeaux du gouvernement, a tout l’air d’avoir été inspirée par le refus de Rawlings quelques heures auparavant. Un journaliste, Haruna Atta, a dit: «La coïncidence est trop apparente. Rawlings reçoit un cadeau et le refuse. Une heure plus tard, Mills aussi reçoit un cadeau de Noël et les messagers ont à peine frappé à la porte qu’il est là en personne pour les renvoyer».

Bien que Rawlings et Mills aient refusé les cadeaux de Noël, Kufuor dit qu’il continuera d’offrir des cadeaux aux hommes d’Etat. «C’est une tradition louable dont nous avons hérité et nous continuerons à l’observer». Il espère que les Ghanéens apprécieront son geste.

Ceux-ci sont d’avis que ces refus sont regrettables, surtout que la présentation de cadeaux de Noël est faite pour entretenir l’unité, l’harmonie et la paix dans le pays. L’instabilité actuelle dans la sous-région est fort proche. Les Ghanéens en sont conscients.


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